Fabbio Capello a accordé un entretien à FIFA.com dans laquelle il évoque les ambitions russes au Brésil, sa philosophie tactique, ses souvenirs de Coupe du Monde, la technologie sur la ligne de but et son joueur brésilien préféré de tous les temps. Le futur adversaire des Verts au Mondial donne un aperçu sur ce qu’il compte faire avec la Russie
M. Capello, qu’attendez-vous de la Coupe du Monde au Brésil ?
– Nous n’étions pas qualifiés depuis 12 ans pour le Mondial. Brésil 2014 nous permettra d’acquérir une expérience grandeur nature dans la perspective de la Coupe du Monde suivante en Russie. Nous irons donc au Brésil avec un grand intérêt et une volonté de faire un bon tournoi. Mais si notre premier objectif est de permettre à nos joueurs d’acquérir une grande expérience, cela ne nous empêche pas d’être ambitieux.
– Quels seront vos objectifs et les plus grands à relever pour les atteindre ?
– Le premier objectif est de passer le premier tour afin de pouvoir jouer la phase à élimination directe avec tranquillité. Notre ambition est naturellement d’aller le plus loin possible, mais connaissant les difficultés qu’il y a pour passer le premier tour, cela permettra aux joueurs de bien intégrer ces difficultés. Nous aurons plus ou moins tous les mêmes problèmes, comme le climat ou la distance. Mais tout cela ne doit pas être une excuse. Le plus important est d’arriver avec une mentalité de vainqueur et la volonté d’emmagasiner beaucoup d’expérience
– Comment êtes-vous parvenu à relancer votre équipe après les défaites en qualifications contre le Portugal et l’Irlande du Nord ?
– Le discours a été clair et simple : rappeler que nous étions toujours les premiers du groupe et que nous devions continuer à aborder les derniers matchs avec la même volonté de gagner que nous avions au début. Nous n’avons jamais été certains de nous qualifier, surtout après notre match contre l’Azerbaïdjan où nous avons concédé un but inutile. D’une manière générale, il y a eu un niveau de jeu très élevé.
– Quelle est la recette de votre efficacité offensive (20 buts marqués) et de votre solidité défensive (5 buts encaissés) ?
– Nous essayons de développer une certaine mentalité adaptée au football moderne. Aujourd’hui, il faut rester compact et jouer court. Nous nous sommes qualifiés car nous avons trouvé le juste équilibre entre la volonté offensive de l’équipe, sans déséquilibrer pour autant notre système défensif.
– Quelle est votre philosophie de jeu ?
– Dans ma philosophie de jeu, l’équipe doit être parfaitement organisée. Mais dans cette organisation, il faut laisser la possibilité aux joueurs talentueux de pouvoir s’exprimer librement. Le système est défini en fonction du genre de joueurs que vous avez à votre disposition. Avec des joueurs très forts techniquement mais moins physiquement, comme l’Espagne, on peut opter pour un football basé sur la possession du ballon et le jeu en triangle. Mais si vous dirigez une équipe comme la Belgique, où tous les joueurs font plus d’1m86, il est possible de miser sur un football plus physique. C’est à l’entraineur de prendre en compte ces paramètres pour définir son style de jeu. Personnellement, j’ai toujours joué avec plusieurs attaquants mais j’ai toujours eu des équipes bien organisées en défense et prêtes à se projeter en attaque.
– Quels sont vos joueurs-clefs ?
– Je ne crois pas qu’il existe un joueur-clef, mais plutôt une « position-clef ». Les équipes se forment comme un arbre. Le tronc, c’est un peu l’axe central avec un bon gardien, un bon défenseur central, un bon milieu et un bon attaquant. L’équipe se construit autour de cette base. Le capitaine doit être un leader, aussi important dans les vestiaires que sur le terrain. Pas uniquement celui qui fait le tirage au sort des camps avec l’arbitre. S’il n’est pas un leader, ce n’est pas un capitaine.
– Quels sont vos souvenirs d’Afrique du Sud 2010 ?
– J’ai conservé un souvenir que je n’ai pas encore réussi à effacer… Je me souviens de la réunion que nous avons eue pour les entraineurs. J’ai demandé « pourquoi n’avez-vous pas fait venir les arbitres de ligne ? » On m’a répondu que cela n’était pas prévu. J’ai rappelé que nous avions travaillé dur pendant deux ans pour en arriver là, et que pour une simple erreur, un ballon sorti ou non, un penalty sifflé ou non, nous pourrions être éliminés. Et finalement c’est ce qui nous est arrivé ! Je n’ai jamais pu oublier cette réunion restée sans suite, car j’avais prévu sans le savoir ce qui nous est arrivé…
– Êtes-vous en faveur de la technologie sur la ligne de but ?
Absolument ! Ou même en utilisant un arbitre de ligne qui réduit l’erreur à 10 ou 5%.
– Quelle sera l’ambiance de la Coupe du Monde au Brésil, selon vous ?
– Au Brésil, c’est le monde de la fantaisie du football. Espérons que cela sera comme ça. Juste de la fantaisie et du beau football…
– Comment voyez-vous la performance de la Russie au Brésil, en vous projetant déjà sur Russie 2018 ?
– J’ai dit qu’il était important pour nous de nous forger une expérience. Je pense sans y penser à 2018 car pour l’instant, je suis concentré sur le Brésil. Je veux des résultats dans cette Coupe du Monde, que mes joueurs soient concentrés et agressifs, et fassent des progrès au niveau mental. Je veux qu’ils obtiennent des bons résultats dès cette Coupe du Monde.
– Quel est votre joueur brésilien préféré de tous les temps?
– J’ai eu la chance avec la Nazionale de jouer contre Pelé dans un match où il jouait pour l’équipe américaine. Avant, je l’avais juste vu à la télévision. Pendant ce match, je l’ai vu faire deux choses qui m’ont impressionné. J’ai alors compris que c’était bien le plus grand de tous.
– Quel est votre premier souvenir de Coupe du Monde ?
– La finale de Suède 1958 (le Brésil avait battu la Suède 5:2) que j’ai suivie à la télévision en noir et blanc dans un bar. Je me rappelle de deux choses : le fantastique but de Pelé qui n’avait encore que 17 ans et demi, et le penalty que Nils Liedholm, qui jouait alors en Italie, à l’AC Milan, avait transformé avec une grande sérénité.
FIFA.com