Canal+ contre Al Jazeera: La guerre des télés a commencé

Canal+ contre Al Jazeera: La guerre des télés a commencé

Après avoir conquis le ciel arabe et moyen-oriental et successive ment lancé un canal anglophone et des déclinaisons à l’usage de la Turquie et des Balkans, Al Jazeera compte, à partir de ce 1er juin, forcer le marché select de la télévision payante en France, jusque-là sous l’emprise quasi monopoliste de la filiale de Vivendi, Canal+.

Le prochain lancement de la chaîne beIN Sport 1, suivie en août par beIN Sport 2, n’a pas laissé indifférents les actionnaires de la première chaîne cryptée française, qui a accusé le groupe qatari de débaucher abusivement des journalistes de son groupe avant le lancement.



Canal+ s’estime victime d’un «débauchage abusif» de ses salariés. Passant à l’action, et selon «Libération », des huissiers ont débarqué dans les locaux français d’Al Jazeera pour perquisitionner. Information confirmée par Charles Bietry, le patron d’Al Jazeera Sport et ancien responsable des sports à Canal+. Répondant aux accusations de son ancien employeur, il dira que sur 2.000 salariés que compte Canal+, il en a recruté 8 en tout, dont 2 «vedettes».

Canal+, qui affirme que 22 de ses employés ont été débauchés, alors que plusieurs dizaines d’autres ont été approchés, attend les constats d’huissiers pour étudier la possibilité de déposer plainte contre Al Jazeera. Ce n’est pas le premier «incident» entre les deux chaînes puisque, selon des observateurs avertis du PAF, Canal+ serait, très probablement, le principal perdant avec l’arrivée des chaînes du groupe qatari.

Lors de la bataille par la retransmission des principaux championnats de foot, Canal+ avait déjà estimé qu’un « concurrent comme Al-Jazeera qui agit en dehors de toute rationalité économique, c’est une mauvaise nouvelle ». Faux, avait rétorqué Charles Bietry, qui affirme qu’Al Jazeera ne fait que défendre sa position dans le marché français et nie toute accusation d’une possible concurrence déloyale.

La chaîne qatarie s’est donné les moyens pour forcer le marché de la télévision payante en France en déboursant des centaines de millions d’euros dans les droits TV : 150 millions d’euros annuels pour 80% de la Ligue 1 et 61 millions d’euros annuels pour la majorité des matchs de la Ligue des champions notamment.

Quant à beIN Sport, elle sera la seule chaîne à proposer l’intégralité des matchs de l’Euro 2012 et 2016, manière d’encourager les acquisitions pour un prix d’abonnement qualifié d’attractif, tournant autour de 11 euros par mois, selon les opérateurs. Ainsi, et dès le 8 juin, les abonnés pourront suivre tous les matches de l’Euro. Robert Pirès, Jean-Alain Boumsong, Mickaël Landreau et Grégory Coupet feront partie des consultants.

Patrick Viera et Karim Benzema devraient également les rejoindre sur les plateaux après la compétition. Les abonnés auront également accès à tous les matchs de la Ligue 1 (8 matchs en direct et 2 en différé), à tous les matchs de la Ligue des champions (soit 133 en direct et 13 en différé) ainsi qu’à tous ceux de l’Europa League et des matchs des championnats d’Espagne, d’Italie, d’Allemagne ou sud-américain.

Cette incursion du marché français à travers le sport n’est pas l’unique manoeuvre du groupe qatari en direction du téléspectateur francophone, puisqu’Al Jazeera compte lancer, à partir du Sénégal, une chaîne d’information continue en français accessible aux téléspectateurs de l’Hexagone via le satellite et aux francophones du Maghreb.

Une réponse à l’arrivée de France 24 en arabe en plein « printemps arabe ». Créée en 1996, la chaîne est devenue un groupe audiovisuel international qui a tissé un réseau de 65 bureaux dans le monde.

Moncef Wafi