Dix points pour baliser la couverture des élections législatives par les médias. C’est en tout cas le souhait du ministère de la Communication qui a adressé, hier, à l’ensemble des médias une charte impliquant une couverture médiatique éthique et équitable du vote du 4 mai prochain.
La tutelle évoque une ligne éditoriale «équitable, impartiale et objective» ainsi qu’un «sens aigu des responsabilités». Pourtant, le département de Grine outrepasse sa fonction, du moment où il s’immisce, directement, dans la ligne éditoriale propre des médias en les incitant à «ne pas donner la parole à des parties qui appellent au boycott». Une intrusion directe dans le fondé même de la presse indépendante et une remise en question des acquis de la liberté d’expression. Le ministère s’arroge, ainsi, un droit de regard dans le contenu même des médias «tenus à veiller à la sensibilisation des électeurs, sur l’exercice de leur droit de vote» et qui ne doivent «en aucun cas décrédibiliser» ces mêmes élections.
La mise en garde est assez claire pour trahir l’appréhension du gouvernement devant une désaffection des électeurs refroidis par le parlement sortant et surtout les pratiques qui ont entouré les listes de candidats qu’on présente comme étant plus mauvais que leurs prédécesseurs. Et c’est pour anticiper sur une abstention qu’on imagine déjà record, que Grine est monté au créneau avec sa charte à dix points.
Le ministère appelle au «devoir de sensibilisation» des médias alors que leur rôle est avant tout d’informer. Conscient de «leur capacité à façonner l’opinion», l’Etat s’inquiète de «l’impact négatif sur les citoyens, en cas d’inobservation des règles éthiques et professionnelles, usitées en la matière». Cette charte explique, aussi, l’importance de ce rendez-vous électoral qui doit être considéré par les médias «comme un test grandeur nature, qui mettra à l’épreuve leur capacité à se montrer à la hauteur de la liberté d’expression que leur garantit la démocratie». Une manière de culpabiliser, surtout les journaux qui ne font pas parties du «cercle vertueux» de Grine. La charte indique, également, l’accès direct aux médias aux partis et candidats «sur une base équitable et non discriminatoire», proportionnellement «à leur importance tant sur le plan politique que durant la campagne». La tutelle indique, aussi, à l’adresse des médias qu’en termes d’«équilibre, d’impartialité et de modération», ils ne doivent rapporter de la communication des partis en présence, «que les contenus qui revêtent un caractère informatif» tout en évitant «de servir l’intérêt et la cause de groupes partisans, aux dépens d’autres acteurs politiques, en présence.» Le ministère a également averti de l’usage des télés trottoirs qui doivent être bannies, durant la campagne électorale «en tant qu’élément d’évaluation de la notoriété des forces politiques présentes.»
On explique que ces émissions «ne peuvent, en aucun cas, tenir lieu de sondage d’opinion crédible, du fait qu’elles peuvent produire un effet de manipulation sur l’opinion publique.» L’autre aspect est le direct tant craint de débats et déclarations politiques qui risquent de devenir des tribunes critiques contre l’Etat ou «porter atteinte à la sécurité publique» et à la personne du président de la République.