Câbles de WikiLeaks : les «flops» sur l’Algérie

Câbles de WikiLeaks : les «flops» sur l’Algérie
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Un quart de millions de câbles diplomatiques américains ont été dévoilés par le site WikiLeaks ces dernières semaines. Plus de 1 000 dépêches diplomatiques, classées secrètes ou confidentielles, concernent l’Algérie. Dans un tableau récapitulatif par pays, le site WikiLeaks précise que 523 de ces dépêches sont classées confidentielles.

Au moins 44 d’entre elles ont été classées par le département d’Etat américain comme «secrètes» et 16 autres sont considérées comme étant ultra-secrètes. Ces informations provenant du système de communication utilisé par le département de la Défense américain et le département d’Etat offrent un panorama inédit des négociations d’arrière-salle telles que les pratiquent des ambassades à travers le monde.

Des «fuites» sans grand impact

Les plus importantes «fuites» reprises concernant l’Algérie sont relatives au terrorisme, à la lutte antiterroriste dans le Sahel et aux relations algéro-marocaines. Selon un des câbles de WikiLeaks, lorsque Robert Ford était en poste à Alger comme ambassadeur, ce dernier a estimé, dans ses notes transmises à Washington en 2007 que «le terrorisme en Algérie ne constituait pas une menace pour la stabilité de l’Etat algérien», mais nuisait à la crédibilité de la réconciliation nationale chère au président Bouteflika et l’affaiblissait, sur le plan interne, dans ses relations avec les responsables des forces de sécurité qui seraient partisans de la ligne dure vis-à-vis des groupes terroristes. Il avait affirmé que le mécontentement social permet aux groupes terroristes de trouver de nouvelles recrues.

LG Algérie

Il avait également fait remarquer que la nouvelle stratégie d’Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) d’utiliser des attentats suicides à la voiture piégée nuisait à la crédibilité des forces de sécurité algériennes face à l’opinion publique et face à la communauté occidentale.

C’est, notamment, le cas lors de l’attaque qui a détruit le siège de l’ONU à Alger. L’ancien ambassadeur a critiqué les services de renseignement militaires algériens en qualifiant les spécialistes du renseignement de «groupe épineux et paranoïaque avec lequel il est très difficile de travailler […]» L’ancien ambassadeur poursuit : «Les Algériens ne se précipitent pas pour développer notre relation militaire-militaire. L’évolution est lente […]. L’Africom a offert beaucoup plus, mais les Algériens ont gardé volontairement un pied sur le frein. Ils veulent éviter la dépendance, dans leurs relations militaires, de sorte à éviter que des informations sur leurs activités se propagent parmi les partenaires étrangers.»

Est-ce un tort que de vouloir préserver son indépendance ? Evoquant la politique interne en Algérie, les rapports diplomatiques américains obtenus par WikiLeaks soulignent que le président Bouteflika a confié, en 2009, au général William Ward, commandant en chef de l’Africom, que les militaires ne détiennent plus les clés du pouvoir en Algérie. «La maison est maintenant dans l’ordre», aurait déclaré Abdelaziz Bouteflika au général William avec lequel il s’est longuement entretenu sur l’échiquier du pouvoir en Algérie et les arcanes qui le composent. «Je peux vous dire que l’armée obéit à des civils», a déclaré le chef de l’Etat qui a tenu à faire savoir à son interlocuteur américain que les «généraux» respectent, désormais, «les dirigeants civils».

«Thèses» et «antithèses»

Un autre câble de WikiLeaks soutient que l’Algérie fait de moins en moins confiance au Polisario car «l’armée algérienne aurait plusieurs fois intercepté des éléments du Polisario en compagnie d’éléments d’Aqmi se livrant à de multiples trafics».

Selon plusieurs câbles, l’Algérie et plus particulièrement son président, «dépassés par les événements, cherchent bien à se débarrasser d’un problème qui est aujourd’hui sur le territoire algérien». D’autres câbles détruisent cette thèse de méfiance. L’un d’entre eux précise que la position algérienne a été clairement exprimée dans le compte-rendu d’une audience accordée en mai 2007 par le président Bouteflika à Frances Fragos Townsend, la conseillère du président Bush pour les affaires de sécurité.

«Si je pouvais résoudre le problème, je le ferais. Mais je ne peux pas parler à la place des Sahraouis. Ce qu’il faut, c’est que le Maroc et le Polisario trouvent une solution, et ils peuvent le faire avec l’aide des Américains», a déclaré le chef de l’Etat. A en croire un autre document de WikiLeaks, le président Bouteflika tient à la fermeture des frontières avec le Maroc jusqu’à l’indépendance du Sahara occidental. Néanmoins, il a assuré à des responsables américains, en juin 2006, que l’Algérie ne fera pas la guerre au Maroc. Sur un ton plus ferme, il a dit à Frances Fragos Townsend : «Je ne serrerai pas la main du roi.» En somme, rien de nouveau par rapport à la position officielle connue. Dans une autre occasion, le chef de l’Etat aurait déclaré que «les Français, du fait du poids de leur histoire coloniale au Maghreb, sont incapables de jouer un rôle constructif dans le conflit […]. D’ailleurs, la France n’a jamais vraiment accepté l’indépendance algérienne».

Selon le câble, «elle tente de régler ses comptes avec l’Algérie en appuyant le Maroc». Les câbles de WikiLeaks donnent également l’appréciation du président sur le roi du Maroc. Selon ces informations, le chef de l’Etat aurait déclaré au chef du commandement américain pour l’Afrique que le roi Mohammed VI «n’est pas ouvert et manque d’expérience». Côté marocain, la suspicion n’est pas moindre. Selon les câbles,

les Marocains considèrent que la clé du dossier du Sahara occidental se trouve non pas à Tindouf, mais à Alger : «Le pouvoir est toujours entre les mains de généraux dogmatiques, incapables de bouger et pétrifiés à l’idée du plan d’autonomie présenté par Rabat.» Et la Tunisie dans ce conflit algéro-marocain ? Les câbles de WikiLeaks affirment que le président Ben Ali accuse l’Algérie de bloquer le Maghreb et aurait déclaré : «Les Algériens doivent accepter le fait qu’il n’y aura pas un Etat indépendant au Sahara occidental.»

Dernière importante information donnée par WikiLleaks : les déclarations du chef de l’Etat à propos de l’Égypte et de sa politique vis-à-vis de Ghaza. «Si nous étions dans leur position, nous aurions appliqué la même politique», aurait déclaré le président Bouteflika à ce sujet au général William Ward en novembre 2009 à Alger. Il aurait même ajouté : «L’Algérie appuie l’Egypte dans sa position sur Ghaza», selon un mémo secret de l’ambassade américaine à Alger. Que comprendre de telles déclarations ? Incompréhensible. Ce qui est certain, c’est que l’Algérie ne peut jamais être, géographiquement parlant, à la place de l’Egypte. Sur le plan de la diplomatie, le soutien indéfectible de l’Algérie à la cause palestinienne est palpable.

Dans ces centaines de milliers de révélations données par WikiLeaks et avant de chercher à savoir si c’est une manipulation, une question s’impose : à qui sert cette fuite ? Dans tous les cas, pour l’Algérie, les informations données ne sont pas, dans leur majorité, contraires aux déclarations officielles. Elles citent, il faut le souligner, dans leur majorité une seule source officielle, à savoir le chef de l’Etat lors de ses

entretiens avec de hauts responsables américains.On constate que les câbles diffusés par WikiLeaks ne citent pratiquement que des officiels algériens qui expriment les posi