La rentrée politique et sociale se fera, progressivement, à partir de demain 1er septembre. C’est, bien évidemment, la reprise des grands corps comme l’éducation nationale, la communauté universitaire et la formation professionnelle qui marquera la rentrée sociale effective en ce qu’elle concerne des millions d’Algériens, toutes catégories confondues entre élèves, étudiants, enseignants, encadreurs, administrateurs, etc.
Une reprise d’activité générale dans le pays qui, comme d’habitude, et comme partout ailleurs dans le monde, est porteuse d’appréhensions diverses. Cette période charnière de l’année est d’abord synonyme pour les familles algériennes, de dépenses supplémentaires et, pour les diverses communautés qui se «reconstituent» à l’occasion, le moment privilégié pour relancer ou lancer des revendications socioprofessionnelles. En plein été, déjà, plusieurs menaces de grèves ont été lancées, notamment par le corps des enseignants.
C’est, il faut bien le dire, ce corps qui peut, à tout moment, bloquer le pays pour être directement à charge de millions de citoyens. Les pouvoirs publics, c’est devenu la règle, redoutent particulièrement cette période. Même si ce n’est plus le contexte explosif de l’année dernière, marquée par la proximité d’une élection présidentielle atypique, la vigilance est toujours de mise, en haut lieu. A la tête d’un gouvernement faible et presque invisible, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a dû même sacrifier son congé annuel durant cet été pour ne se consacrer qu’à un seul dossier : la préparation de la rentrée sociale.
Ce dossier est tellement sensible que Sellal fut même contraint d’ajourner ses visites à travers les wilayas. Les mouvements sociaux, de plus en plus nombreux et qui gagnent en ampleur ces dernières années, nécessitent en effet un suivi et des préparations minutieuses pour éviter des débordements aux conséquences dramatiques.

Non pas parce que ces mouvements sont de nature violente, mais en raison d’un contexte national et régional des plus incertains. «La paix sociale n’a pas de prix». Cette célèbre phrase de Ahmed Ouyahia, du temps où il était Premier ministre, illustre bien l’état d’esprit des dirigeants en Algérie et ce, depuis janvier 2011. La maîtrise de la rue est une priorité absolue dans l’Algérie d’aujourd’hui.
C’est grâce à la manne pétrolière que Bouteflika a fait face à la vague de contestations de 2011, avec des dépenses que la stricte logique économique réprouve. Et rien n’indique que cette politique «dépensière» sera abandonnée de sitôt dans une Algérie où la violence dans la société prend des proportions vraiment alarmantes. Une violence qui nous a déjà fait rater la rentrée sportive, une première depuis l’indépendance. Kamel Amarni
ÉDUCATION ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR: Une reprise paisible ?
Paisible, sereine, la rentrée scolaire et universitaire 2014-2015 le sera-t-elle ? Pas évident. Malgré le volontarisme, les assurances des deux tutelles ministérielles, différentes organisations syndicales n’écartent pas le recours à la grève. Le 7 septembre 2014 et le 13 octobre 2014 prochains, plus de 9,9 millions d’élèves et d’étudiants rejoindront les bancs des établissements d’enseignement primaire, moyen, secondaire et universitaire (graduation et post-graduation, toutes filières et spécialités confondues) ainsi que de la formation continue.
Auparavant, dès le 31 août, plus de 370 000 enseignants, tous cycles confondus, et des milliers d’autres travailleurs auront rejoint leurs postes. Des milliers de nouvelles infrastructures, de places pédagogiques et capacités d’hébergement et de restauration sont déjà réceptionnées ou en voie de l’être, contribuant à renforcer le dispositif en place et mieux accueillir les étudiants. De fait, c’est la rentrée scolaire et universitaire 2014-2015 qui commence et qui devrait se dérouler dans de bonnes conditions pédagogiques et matérielles.
C’est ce dont les deux ministres, de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Nouria Benghebrit et Mohamed Mebarki, ont assuré à diverses occasions. Qu’il s’agisse des conditions d’hébergement et d’enseignement, la gestion des modalités d’inscription, l’amélioration des conditions socioprofessionnelles des enseignants et autres auxiliaires, la possibilité de résorber progressivement les déficits infrastructurels ainsi que la poursuite des programmes de réforme et d’amélioration de la qualité des prestations et des niveaux de formation, les ministres ont formulé des assurances, affiché un volontarisme visant à démontrer que la rentrée se déroulera sereinement, dans «la stabilité» pour reprendre les propos de la ministre de l’Education nationale. Mais une sérénité que la réalité risque pourtant de remettre en cause.
Engagées dans une dynamique de dialogue avec les deux tutelles ministérielles, les diverses organisations syndicales de l’éducation et de l’enseignement affichent un scepticisme avéré quant à la portée de ce dialogue. Au-delà de leur nature, la plupart des revendications formulées par le Conseil des lycées d’Algérie (CLA), le Conseil national des professeurs du secondaire et du technique (Cnapest), le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest) ainsi que l’Union nationale des personnels de l’éducation et de la formation (Unpef) ou le Syndicat national des travailleurs de l’éducation (SNTE) restent loin d’être satisfaites.
Une insatisfaction, un constat d’échec que les syndicats afficheront clairement, en n’écartant pas le recours à des actions de protestation et autres formes de réaction que leurs instances dirigeantes devront décider durant les prochaines semaines. Or, les travailleurs de l’intendance annoncent déjà une grève de trois jours dès la semaine prochaine, et d’autres organisations pourraient agir de même. Ainsi, la rentrée scolaire pourrait connaître des perturbations quelques jours seulement après son déclenchement.
Des perturbations que les établissements universitaires pourraient également subir les mois prochains. Une protesta qui serait toutefois de moindre intensité. Fer de lance de la protesta universitaire, le Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes) n’a eu de cesse, certes, de tirer la sonnette d’alarme, qualifiant la situation du secteur de l’enseignement supérieur d’alarmante et appelant à la redresser. Néanmoins, tant ce syndicat que d’autres organisations syndicales réputées d’obédience proche des islamistes affichent un certain manque d’offensive.
Sans se prononcer clairement quant à la grève, nombre de syndicats privilégient le dialogue et la concertation concernant le règlement des problèmes socioprofessionnels. Voire, l’Union nationale des étudiants algériens (UNEA) appelle à la tenue d’assises nationales sur le système d’enseignement LMD (licence, master, doctorat). Un système d’enseignement instauré depuis quelques années et dont le bilan reste mitigé, assez satisfaisant selon la tutelle ministérielle mais encore marqué par des dysfonctionnements selon divers acteurs syndicaux et même les étudiants.
Or, les dysfonctionnements du LMD, l’insuffisance ou l’absence de résultats probants dans le règlement des problèmes socioprofessionnels, le déficit en qualité qui persiste et d’autres contraintes objectives ou subjectives risquent d’aggraver une situation déjà tendue. La rentrée scolaire et universitaire 2014-2015 sera-t-elle paisible, sereine ? Pas évident.
C. B.
MONDE DU TRAVAIL: Entre grèves et calme incertain
C’est la rentrée sociale. Elle s’annonce déjà agitée. Plusieurs sujets «chauds» risquent de marquer l’actualité dans nombre de secteurs socioéconomiques et administratifs. C’est déjà la rentrée sociale. Si la situation reste incertaine dans certains secteurs, ce n’est point le cas pour le secteur de l’éducation nationale.
Une brume noire flotte au-dessus des écoles. Déçus par les rencontres bilatérales entreprises depuis la miaoût, avec la ministre de l’Education nationale, les différents syndicats du secteur n’écartent pas le recours à la grève juste après la rentrée scolaire. Nombre de leurs revendications socioprofessionnelles demeurent toujours en suspens. Une insatisfaction qui pourrait se traduire par des perturbations de l’année scolaire 2014/2015. Chez les travailleurs de l’administration publique, la situation reste suspendue au dialogue. Ayant dernièrement rencontré le ministre du Travail, représentant du gouvernement, le Snapap (Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique) reste optimiste.
«Nous restons optimistes tant que les portes du dialogue restent ouvertes», dira Belkacem Felfoul, SG du Snapap. Il souligne qu’une rencontre du bureau national du syndicat avec le ministre du Travail est programmée pour la première quinzaine de septembre. D’ailleurs, poursuit-il, «une autre rencontre est prévue ce lundi (demain ndlr) entre le ministre des Travaux publics et la Fédération des travaux publics, affiliée au Snapap». Toutefois, Felfoul considère que «tout dépend des résultats des négociations».
Contrairement aux années précédentes, le secteur de la Santé semble bien se porter. Point de grève à l’horizon. Selon le SNPSSP (Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique), plusieurs dossiers ont été pris en charge depuis l’arrivée du nouveau ministre. Seul inconvénient pour le syndicat : le retard enregistré dans la prise en charge de certaines revendications. «Il y a un engagement clair de la part du ministre de la Santé pour rattraper ce retard», souligne le président du syndicat, Dr Mohamed Yousfi, qui estime que les relations avec la tutelle sont marquées par «un climat de transparence et de sérénité».
Seulement, rappelle le Dr Yousfi, les deux principales revendications du SNPSSP n’ont pas encore été satisfaites : l’amendement du statut particulier et la révision du régime indemnitaire. Un dossier de la Fonction publique qui date de mars 2011 et qui reste suspendu à l’aval du gouvernement et du Premier ministre. Néanmois, la tension est loin de tomber au sein de certaines entreprises industrielles notamment le complexe sidérurgique d’El Hadjar.
R. N.