Le vice-président de la Cour constitutionnelle du Burundi, appelée à se prononcer sur la légalité d’un nouveau mandat du chef de l’Etat Pierre Nkurunziza, a fui le Burundi pour ne pas céder aux «pressions».
Celles-ci sont exercées sur la Cour afin qu’elle valide cette candidature. «En mon âme et conscience, j’ai décidé de ne pas apposer ma signature sur un arrêt, une décision qui carrément est à côté de la loi et qui a été imposée de l’extérieur, qui n’a rien de juridique», a expliqué M. Nimpagaritse. Il se trouve depuis hier à l’étranger, ont confirmé des proches. M. Nimpagaritse a assuré qu’une majorité des sept juges de la Cour estimaient initialement inconstitutionnelle la candidature controversée, mais que ceux-ci avaient subi «d’énormes pressions et même des menaces de mort» pour changer d’avis. Le 30 avril, lors d’un premier délibéré, «aucun consensus n’a pu se dégager» parmi les sept membres de la Cour et «ceux qui soutenaient le 3e mandat étaient mis en minorité», a raconté Sylvère Nimpagaritse.
«Dès le soir du 30 avril, on a commencé à subir d’énormes pressions et même des menaces de mort, mais on a eu le courage de revenir le lendemain pour poursuivre les délibérations», a-t-il poursuivi. «Deux de ceux qui avaient soutenu que le renouvellement d’un 3e mandat violait l’Accord d’Arusha et la Constitution ont eu peur» et ont changé d’avis, a-t-il continué, d’une voix rendue tremblante par la peur et les yeux embués de larmes. «Ils m’ont confié que si jamais on ne se ravisait pas, on aurait humilié le président (Nkurunziza), qu’on risquait gros, qu’on risquait nos vies et qu’il fallait donc rejoindre l’autre camp», a-t-il ajouté, soulignant que les juges s’étaient vu expliquer que signer cette décision devait éviter l’embrasement du pays. La décision de la Cour est attendue avant le 9 mai, date à laquelle la commission électorale doit publier la liste des candidats admis à se présenter à la présidentielle. Mais les opposants au 3e mandat ont d’ores et déjà refusé de voir la Cour constitutionnelle jouer les arbitres. Elle est «composée d’enfants chéris de Pierre Nkurunziza qui n’ont rien à lui refuser», a estimé Pierre-Claver Mbonimpa, un défenseur réputé des droits de l’Homme. La Constitution, comme l’Accord d’Arusha, limitent à deux le nombre de mandats présidentiels. Mais les partisans du chef de l’Etat estiment que le premier mandat de M. Nkurunziza, élu par le Parlement en 2005 comme premier président de l’après-transition, au titre d’un article transitoire de la Constitution, n’entre pas dans le champ de l’article 96 de la Loi fondatementale qui prévoit l’élection au suffrage direct et stipule que le mandat présidentiel n’est renouvelable qu’une fois. Le Sénat, contrôlé par le Cndd-FDD, a saisi la Cour constitutionnelle de la question de la légalité d’un nouveau mandat du président sortant. Le Cndd-FDD a, sans surprise, désigné le samedi 25 avril Pierre Nkurunziza candidat à la présidentielle. R. I. / Agences
