La phase de transmission du pouvoir, qui n’aura duré que 16 jours, nécessaire pour mener à terme les négociations, est indéniablement marquée du sceau de la « maturité politique » et du « sens des responsabilités » pleinement relevée par l’Union africaine.
Au burkina faso, Le pouvoir civil a pris le relais de la transition militaire qui n’aura duré en fait que deux semaines. Le saut qualitatif prend forme dans la nomination du brillant diplomate, au vécu remarquable, l’ancien ministre des Affaires étrangères Michel Kafando, par le « collège de désignation » de 39 membres majoritairement civils. L’avènement du chef d’Etat intérimaire, préféré à ses concurrents, l’ex-ministre de Thomas Sankara, Joséphine Ouédraogo et le journaliste Cherif Sy, traduit la fidélité aux engagements de la « révolution » et aux exigences de la communauté internationale revendiquant la nécessité d’une transition civile. C’est donc, pleinement conscient de la « redoutable responsabilité » que le nouvel homme fort appréhende « les écueils et l’immensité de la tâche ». Les chantiers de la reconstruction nationale sont colossaux. Le temps du changement démocratique, imposé par la dynamique populaire, traduit l’engagement à « bâtir ensemble une nouvelle société, une société réellement démocratique par la justice, la tolérance et l’union des cœurs ». Ce programme ambitieux a pesé sur le choix final consensuel.
« Le plus déterminant a été son exposé, très efficace », a reconnu Zéphirin Diabré, le chef de file de l’opposition et l’un des 23 du « collège de désignation ». L’un des favoris en puissance, sélectionné et annonçant son retrait de la course, l’archevêque de Bobo-Dioulasso Mgr Paul Ouédraogo, a estimé que « son programme, c’est exactement ce que les gens attendent parce que ça allait droit sur les problèmes de corruption et d’impunité.
Il est extraordinairement en phase avec les attentes de la révolution ». La transition en marche a mis fin au scepticisme de la classe politique et de la communauté internationale redoutant un coup d’Etat ou, du moins, la confiscation du pouvoir par l’armée qui a ainsi répondu de la meilleure manière aux attentes de la société burkinabè. La phase de transmission du pouvoir, qui n’aura duré que 16 jours, nécessaire pour mener à terme les négociations, est indéniablement marquée du sceau de la « maturité politique » et du « sens des responsabilités » pleinement relevée par l’Union africaine. Le nouveau Burkina Faso hérite du choix consensuel du président intérimaire qui sera confirmé par voie constitutionnelle et en charge de concrétiser les dispositions de la charte de transition, entérinée dimanche par les militaires et les civils, à la Maison du peuple de Ouagadougou.
« Aujourd’hui, nous sommes ensemble pour asseoir les bases inébranlables d’une démocratie, véritable aspiration profonde de notre peuple », avait lancé le lieutenant-colonel Zida, longuement applaudi, devant le corps diplomatique et plusieurs dignitaires africains. Aux commandes depuis le 1er novembre, l’armée passe officiellement le relais à une « personnalité civile », prêtant serment le 21 novembre pour se consacrer au lancement du processus électoral. Le président Michel Kafando, qui veut s’adresser aux Burkinabés « dès que cela sera possible », veut relever les défis pour « redonner confiance » et mettre « le cap sur l’avenir ». La gageure est cruciale. Il y va de « la crédibilité » de ce pays du Sahel, dira-t-il.
Larbi Chaabouni