L’économie algérienne hors BTPH, agriculture et hydrocarbures n’arrive pas à décoller. L’administration algérienne reste le premier employeur et la commande publique l’unique pourvoyeuse de croissance. La désindustrialisation entamée dans les années 1980 continue et s’approfondit. L’une des raisons de cet état de fait reste la bureaucratisation de l’acte d’investir et de produire.
Cette forte bureaucratisation (redondance et nombre exagérément élevé de documents à fournir aux administrations fiscales et sociales, aux banques et autres intervenants, ndlr) débouche nécessairement sur une probable corruption des agents qui délivrent toutes les pièces nécessaires à la constitution du dossier et de ceux qui sont censés étudier et accorder les autorisations pour le démarrage et l’extension des activités.
Cette bureaucratisation et son corrollaire la corruption ont été affublées du triste nom de «dinar administratif» à la fin des années 1980 par un professeur d’économie algérien. Les freins au développement ne résident plus dans l’absence de porteurs de projets, mais dans cette situation voulue par les pouvoirs publics : tout régenter et tout contrôler. L’Etat et ses démembrements voient toujours en les investisseurs des prédateurs et certains fonctionnaires les considèrent comme des proies. Khalifa, Tonic Emballage et autres BCIA ne sont pas représentatifs du petit capitaliste algérien qui essaye d’avoir un bon salaire, un logement décent, une belle voiture et de pouvoir offrir des vacances à sa famille. Les gros investisseurs ont suffisamment de relations pour pouvoir se faire recommander chez un P-DG de banque ou le DG des impôts, des Douanes, de l’Andi, de l’Ansej ou de la Cnac. C’est le petit commerçant, l’artisan ou le chef de la petite entreprise qui souffre face à l’administration et c’est vers celui-là que les facilitations doivent aller. Vouloir une industrie automobile en Algérie, c’est bien, mais il est impossible qu’elle existe sans des entreprises qui fabriqueraient les lampes, les sièges, les poignées de porte, etc. Ce qui vaut pour l’automobile vaut pour l’électronique, pour l’industrie agroalimentaire, etc. Cette extrême bureaucratisation concerne également le secteur du BTPH où la soumission à un avis d’appel d’offres nécessite en plus de cette dernière le même dossier que celui de l’homologation. La faible bancarisation de
l’économie algérienne devrait pousser les pouvoirs publics à réfléchir à une réelle réforme de la Poste. Cette dernière devrait pouvoir se transformer rapidement en banque universelle car elle est implantée dans la quasi-totalité des communes du pays. Cette forte implantation, sans porter atteinte à la concurrence, devrait permettre aux jeunes porteurs de projets type Ansej de trouver plus facilement un interlocuteur et un financier et, ainsi, désengorger des guichets bancaires souvent saturés par des demandes
de financement.La vie d’une entreprise ne se mesure pas aux exonérations d’impôts et autres taxes. Elle est faite de mille et une petites choses qui sont parfois plus coûteuses que les taxes. Un entrepreneur doit pouvoir passer plus de temps à gérer son outil de production que de courir de bureau en bureau pour avoir l’autorisation de le faire.
Permettre aux gestionnaires de produire et d’investir, donc leur faciliter la vie, est une priorité. Les exonérations d’impôts ou la multiplication des contrôles seraient impossible si les entreprises étaient mort-nées ou avaient vu la vie avec une tare congénitale nommée corruption.La mort du «dinar administratif», donc l’éradication de la corruption, ne sera possible qu’avec une réelle et effective «débureaucratisation» de l’économie nationale. C’est à cela que doit s’atteler le gouvernement !