Brahimi, « Genève est une réunion entre Syriens »

Brahimi, « Genève est une réunion entre Syriens »

L’émissaire international pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, a affirmé, hier à Damas, que la conférence de paix à Genève, espérée fin novembre, doit être l’occasion pour les Syriens de décider de leur avenir.

Sur le terrain, des combattants kurdes ont remporté plusieurs succès ces dernières heures dans la province de Hassaké, dans le nord-ouest de la Syrie, entre la Turquie et l’Irak, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH, basé en Grande Bretagne). «La conférence de Genève est une rencontre entre les parties syriennes et ce sont elles, et pas moi, qui vont fixer la phase transitoire et la suite», a déclaré M.Brahimi aux journalistes réunis dans un hôtel de la capitale. L’émissaire de l’ONU pour la Syrie, actuellement en tournée régionale, est revenu à Damas après une absence de six mois à la suite d’une brouille avec Bachar Al Assad. Sa mise au point sur le caractère syrien de la conférence dite Genève 2, défendue par les Etats-Unis et la Russie, intervient au lendemain de la publication d’un entretien donné à Paris à l’hebdomadaire Jeune Afrique. «Ce que je dis, tout haut et à tous les Syriens, c’est que l’Histoire nous apprend, qu’après une crise comme celle-ci, on ne peut pas revenir en arrière. Le président Assad peut donc contribuer utilement à la transition entre la Syrie d’avant, qui est celle de son père et la sienne, et ce que j’appelle la nouvelle République de Syrie», avait-il dit au magazine. Ces propos n’ont pu que heurter les responsables syriens, qui refusent de discuter de l’avenir de Bachar Al Assad et de son droit de se représenter pour un nouveau mandat présidentiel à la mi-2014.

Hier, M.Brahimi a rencontré les opposants de l’intérieur, tolérés par le régime, Hassan Abdel Hazim, chef du Comité de coordination pour le changement national et démocratique (CCCND) et Ali Haïdar, ministre d’Etat chargé de la réconciliation nationale, qui vient aussi des rangs de l’opposition. «Je pense que les États-Unis réfléchissent sérieusement à ouvrir des canaux (de discussion) avec la Syrie. Il est encore trop tôt pour en parler car ce pays n’a pas arrêté son soutien politique et médiatique» (à l’opposition), a déclaré M.Haïdar. Un autre opposant devenu vice-Premier ministre, Qadri Jamil, a déclaré «avoir rencontré des responsables du département d’État à Genève», selon une source syrienne. La composition de la délégation de l’opposition reste un casse-tête pour les organisateurs, en raison des divergences qui la traversent et des menaces des groupes armés contre ceux qui oseraient se rendre à Genève. «Il faut faire une séparation réelle entre l’opposition patriotique et les autres. Ceux qui mettent des conditions préalables (le départ d’Assad) ne souhaitent pas aller de l’avant dans le processus politique», a estimé M.Haïdar après sa rencontre avec M.Brahimi. «S’il faut qu’il y ait une délégation unique de l’opposition, alors nous, opposition de l’intérieur, préférons ne pas y aller plutôt que d’être sous l’ombrelle de Coalition», a-t-il ajouté. Dans son entretien à Jeune Afrique, M.Brahimi ne se berçait pas d’illusions: «Cette conférence est le début d’un processus. Nous espérons que l’opposition parviendra à se mettre d’accord sur une délégation crédible et représentative. Il ne faut pas se leurrer: tout le monde ne sera pas présent. En revanche, la suite de ce processus devra inclure le plus de monde possible», avait-il fait valoir. Faute d’un accord politique, «ce qui menace la Syrie (…), c’est une sorte de «somalisation». Plus durable et encore plus profonde que ce que nous avons pu voir en Somalie», avait-il prévenu. Sur le terrain, l’opposition est en effet de plus en plus atomisée. Dans la province de Hassaké (nord-ouest), des combattants kurdes ont pris trois villages aux jihadistes de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) et du Front al-Nosra, et ont contraint le chef d’un bataillon d’al-Twahid wal Jihad, lié à l’Armée syrienne libre (ASL), à se rendre avec toutes ses armes. Samedi, des Kurdes avaient conquis un poste-frontière avec l’Irak, lieu de transit important pour les hommes et les munitions contrôlé jusqu’alors par des jihadistes. Les Kurdes défendent leur territoire où ils souhaitent instaurer une zone autonome à l’instar des Kurdes d’Irak.

Les jihadistes combattent pour leur part à la fois le régime syrien, les autres rebelles et les Kurdes afin d’instaurer leur pouvoir sur tout le nord et l’est du pays.