«Quelque part, je me dis qu’il y avait peut-être une place pour moi au Mondial»
A 23 ans, Brahim Ferradj fait partie des jeunes footballeurs algériens qui ont réussi le mur de la Ligue 1. Il joue actuellement au Stade Brestois 29 et son club est classé à la 8e place du championnat.
Pour un nouveau promu, l’exploit est réel. Surtout lorsqu’on voit les grosses écuries qu’il devance au classement. Ferradj a joué cinq matchs pleins avec Brest, avant de marquer un arrêt, à la suite d’un problème de genou. Nous l’avons contacté pour s’enquérir de son état de santé et pour le faire connaître un peu mieux aux supporters des Verts auxquels sa polyvalence pourrait rendre d’énormes services à l’avenir. Une belle découverte qui attend sa chance ardemment. Appréciez.
Alors, comment va votre blessure ?
En fait, je me suis fait opérer lundi dernier du ménisque, car je ne pouvais plus supporter les douleurs.
J’avais pourtant réussi à éviter cela au mois d’août, pensant que ça allait me laisser tranquille. Mais quelque temps après, au début de la semaine dernière exactement, ça avait recommencé à me faire souffrir. J’avais du mal à me retourner et mon genou commençait à bloquer. En fait, il y a un morceau du ménisque qui s’est détaché et il est venu se loger en dehors de l’articulation. Ce qui expliquait les douleurs et le blocage.
Ils vous ont opéré à l’ancienne ?
Non, ils m’ont fait l’arthroscopie (nouvelle technique opératoire, qui se fait à l’aide d’un tube de quelques millimètres de diamètre, muni d’un système optique et d’un système d’éclairage ; il est couplé à une caméra vidéo miniaturisée, elle-même reliée à un écran de téléviseur, ndlr). Ils m’ont juste enlevé le morceau du ménisque qui gênait.
Et comment se déroule la convalescence ?
Là, ça y est, je viens de commencer ma rééducation et il me reste quelque chose comme trois ou quatre semaines.
C’est un peu dommage pour vous, car vous étiez sur une courbe ascendante en ce début de saison et voilà cette blessure qui vient stopper votre élan. C’est un peu rageant, non ?
C’est sûr que c’est un peu rageant, mais d’un autre côté, ce n’est pas trop grave comparé à d’autres soucis. Que voulez-vous, c’est la vie ! Ce sont les risques du métier.
Mais je ne m’en fais pas trop, car ce n’est pas méchant. Maintenant, c’est sûr qu’il y a une place pour les regrets, car j’avais bien démarré la saison et je sentais que je progressais et je montais en puissance à chaque match. Après, c’est comme ça… C’est la vie.
Du coup, votre reprise est prévue pour quand ?
Le 18 octobre, j’ai rendez-vous avec le chirurgien. Je pense que c’est à partir de cette date qu’il va me donner le feu vert. Je verrai donc à quelle date il va fixer mon retour. Mais j’imagine que je reprendrai inch’Allah à la fin octobre.
Parlons maintenant de Brest, votre club. Là, vous êtes de retour en Ligue 1, les dirigeants ont opté pour la stabilité en faisant confiance au même groupe pratiquement…
Oui, c’est bien d’avoir opté pour la stabilité, mais il y a eu quand même quelques recrues, histoire de se renforcer pour la Ligue 1. C’est vrai que l’ossature est celle de l’année dernière. Un peu à l’image de Montpellier la saison passée. Je crois que c’est plus sage de garder l’équipe qui a arraché la montée et ne pas faire comme certains clubs…
Comme Arles et toutes ses recrues ?
Oui, c’est ça, comme Arles. Je pense que ce n’est jamais bien de chambouler tout l’effectif, car on est vite confronté à des problèmes de cohésion.
Je préfère qu’on s’appuie sur le groupe qui a arraché l’accession pour garder la dynamique qui s’est installée et les automatismes acquis tout au long de la saison. Il vaut mieux aussi surfer sur cette euphorie qui est née après la montée, au lieu de la briser en chamboulant tout l’effectif en ramenant des joueurs qui ne se plaisent pas ailleurs et qui viennent juste pour se relancer.
En général, ça ne se passe pas très bien, donc autant éviter cette politique. La preuve, c’est qu’à Arles ça se passe moins bien que chez nous. On est 6 ou 7es, je pense et je crois que personne ne regrette d’avoir gardé la même ossature que la saison passée.
Vous êtes exactement à la 8e place, mais devant de grosses cylindrées, comme Monaco, Auxerre, Lyon, Bordeaux et Lens. Qu’est-ce que ça vous fait de devancer tout ce monde ?
Ah, comment expliquer cela ? Nous aussi, on se le demande de notre côté ! (Il rigole.) Non, mais je pense que ce début de saison a été compliqué pour bon nombre de grands clubs de Ligue 1. Ce sont des équipes qui peinent à démarrer leur saison, pour de multiples raisons.
Mais on sait très bien qu’elles vont se ressaisir vers la fin. A nous d’en profiter, avant leur réveil, c’est tout. Il faut prendre des points tant qu’on peut le faire et après, on verra comment cela va se passer pour tout le monde. Nous, de notre côté, on a un objectif clair qui est d’assurer le maintien en Ligue 1, vu qu’on vient juste d’y accéder. Mais il faudra le faire sur plusieurs années, afin de se stabiliser à long terme en Ligue 1. Ce n’est pas possible d’exiger à l’équipe de jouer l’Europe dès cette saison. Il faut un maximum de stabilité avant de viser plus haut.
Vous avez commencé la saison comme latéral gauche, alors que vous jouiez milieu de terrain. Vous prenez du plaisir à ce poste ?
Je prends du plaisir oui, puisque je suis sur un terrain de foot, mais c’est vrai que je me réjouis moins lorsque je joue au milieu du terrain. C’est clair que dans le milieu du terrain, on prend plus de plaisir, parce qu’on touche plus de ballons et qu’on participe plus au jeu.
Mais je peux vous assurer que je commence à prendre du plaisir à défendre. Par exemple, en voyant un joueur devant moi, je me dis : ‘‘Il ne faut pas qu’il passe !’’ C’est aussi un plaisir de réussir à empêcher un attaquant de passer. Et puis, rien ne m’empêche d’enchaîner sur l’action en allant créer le surnombre et porter le danger devant.
Ce n’est pas un choix personnel que de jouer en latéral gauche. C’est le coach qui vous l’a demandé, non ?
(Il retient son souffle…) Moi, je savais très bien que je pouvais jouer comme latéral. Le coach m’a mis à ce poste et il a tout de suite vu que je pouvais assurer. Personnellement, je sais que c’est à ce poste de latéral, droit ou gauche, que j’ai le plus de chance de réussir. Après, il faut savoir qu’on n’a pas toujours ce qu’on veut et donc il faut voir surtout ce qui est mieux pour moi. Et au jour d’aujourd’hui, ce qui est le mieux pour moi, c’est de jouer comme latéral droit ou gauche.
C’est bien de le prendre du bon côté, contrairement à d’autres qui pestent quand on leur change de poste.
C’est sûr qu’il vaut mieux le prendre du bon côté. Ça ne sert à rien de le prendre mal. Du moment que le coach a décidé de me faire jouer à ce poste, c’est qu’il a vu qu’il pouvait me faire confiance là.
Et s’il le fait, c’est pour le bien de l’équipe qu’il pense. En plus, c’est toujours une chance pour le joueur d’aller un peu plus loin, de gravir un échelon. A partir de là, je ne me pose plus de question. A l’entraînement, je me mets à la disposition du coach et voilà.
Passons à l’Equipe d’Algérie maintenant. Un mot sur ce que vous avez vu pendant le Mondial ?
Franchement, ils m’ont fait plaisir, car ils ont donné une bonne image de l’Algérie. Mais c’est vrai qu’on peut avoir quelques regrets en pensant qu’ils auraient pu faire mieux. Maintenant, il ne faut pas faire la fine bouche, car on a été au Mondial et pas d’autres.
Aviez-vous été déçu de ne pas avoir été choisi par Saâdane pour prendre part au Mondial 2010 ?
Déçu, oui, c’est sûr que j’ai été déçu comme tous les footballeurs algériens qui n’ont pas été retenus pour ce Mondial. Parce que c’est toujours un honneur de jouer pour l’Algérie, comme je l’ai dit à ma famille et à mes amis. Maintenant, il ne faut pas trop être déçu, parce que la saison passée, je n’avais pas beaucoup joué, à cause des blessures.
Je ne peux donc pas avoir de grands regrets par rapport à cela. Mais d’un autre côté, Saâdane a fait ses choix qui sont peut-être discutables pour certains et pas, pour d’autres. Mais c’est lui qui a qualifié l’équipe pour le Mondial et cela, personne ne pourra le lui enlever. Il ne faut donc pas trop l’accabler.
Vous lui en voulez un peu ?
Non, pas du tout, car je pense qu’il a fait ses choix en son âme et conscience et il a peut-être trouvé d’autres joueurs meilleurs que moi. Personnellement, je me dis que quelque part, il y avait peut-être une place pour moi dans ce groupe, mais bon, on ne peut pas revenir en arrière. Ce qui est fait est fait et il faut maintenant se projeter vers l’avenir.
Est-ce que vous avez été contacté par le nouveau sélectionneur ou la FAF ?
Non, personne ne m’a contacté au jour d’aujourd’hui.
Vous comprenez ce silence de la part des responsables de l’EN ?
Il y a deux saisons, on m’a dit que le sélectionneur était venu me voir jouer, mais personnellement, je ne l’ai jamais vu, ni entendu. Le seul contact que j’ai eu, c’était une petite discussion avec des dirigeants, lorsque je jouais ma première année en Ligue 2. Après, pour répondre à votre question, je dirai que je n’attends aucun coup de fil de qui que ce soit.
Je ne me réveille pas le matin en pensant à cela, jour et nuit. Si on m’appelle en sélection, j’y vais avec plaisir et honneur, mais si on ne m’appelle pas, je continuerai à m’entraîner et à jouer avec mon club, comme toujours. Tout le monde sait que je veux jouer pour l’Algérie. Mais je ne veux pas forcer le bras aux gens pour me sélectionner.
Les Verts vont jouer contre la République centrafricaine le 10 octobre prochain. Pensez-vous que c’est jouable pour nous à Bangui ?
J’ai vu la République centrafricaine jouer contre le Maroc. Ils ont subi tout le match, mais ils ont tenu bon. Ils sont très robustes et procèdent par des contres rapides. Ils n’ont pas beaucoup de joueurs qui évoluent dans le haut niveau. Les Algériens ont nettement plus d’atouts à faire valoir.
Quand on se rappelle le match qu’ils ont livré face à la Côte d’Ivoire, je me dis que s’ils arrivent à reproduire le même jeu, personne ne pourra les arrêter dans ce groupe, ni le Maroc avec sa pléiade de bons joueurs et son nouveau coach, Gerets, qui a fait d’excellentes choses à Marseille, ni la Tanzanie, ni la République centrafricaine. Il y a donc un bon coup à jouer à Bangui, même si un match n’est jamais gagné d’avance.
Un dernier mot pour le public pour connaître vos intentions par rapport à l’Algérie ?
Je dirai que Brahim Ferradj est un Algérien à 100% qui aime son pays comme tous les Algériens et qui espère bien un jour avoir la chance et l’honneur de défendre le maillot national. Même si dehors je ne le clame pas haut, sachez que je suis un Algérien dans le sens et dans la tête. J’ai toujours aimé mon pays et je ne serai que fier de défendre les couleurs de l’Algérie. Il n’y a pas le moindre doute.