Abdelaziz Bouteflika procéderait à un important réaménagement institutionnel qui concernerait le Conseil de la nation et le Conseil constitutionnel. Une sorte de remaniement qu’exige la Constitution et qu’offre l’opportunité de la fin de mandat du président du Conseil constitutionnel.
Boualem Bessaieh, désigné fin septembre 2005 comme président du Conseil constitutionnel à la place de Mohamed Bédjaoui, quittera donc son poste fin septembre prochain conformément à l’article 164 de la Constitution.
«(…) Le président de la République désigne, pour un mandat unique de 6 ans, le président du Conseil constitutionnel », tranche en effet la loi fondamentale. «Il était question, nous révèle une source bien informée, que l’on fasse une espèce de fetwa juridique, se basant sur le fait que Bessaieh avait succédé à Bédjaoui alors que le mandat de celui-ci n’avait pas expiré. Désigné en 2002 , Bédjaoui n’était pas allé au bout de son mandat qu’il avait interrompu en 2005. Dès lors, l’on pourrait selon cette «fetwa» s’autoriser à dire que Bessaieh n’avait que continuer le mandat de Bedjaoui, en cours jusqu’en mai 2008 et que sa désignation à lui n’est comptabilisée qu’à compter de cette date». De ce fait, le mandat de Bessaieh n’expirerait qu’en mai 2014. Or, une telle acrobatie juridique, un moment sérieusement envisagée, ne semble plus emballer le pouvoir. «Le nouveau contexte national et international rend de telles décisions peu recommandables», explique notre source. Mais il n’y a pas que les besoins de la coquetterie qui préoccupent Bouteflika. A en croire notre source, «le président aura tranché son choix quant au successeur de Bessaieh à la tête du Conseil constitutionnel».
Le candidat de Bouteflika ne serait autre que Abdelkader Bensalah. Le président du Sénat, homme de confiance de Bouteflika et de l’armée, fait consensus, comme à chaque fois qu’il était question de faire appel à lui pour les missions les plus sensibles. «Sa désignation au Conseil constitutionnel permettra, par ailleurs, d’éviter une cas de figure où l’on se retrouverait en situation de violation de l’article 73 de la Constitution.» Un article qui traite des conditions d’éligibilité à la fonction de président de la République. «Pour être éligible à la présidence de la République, le candidat doit : jouir uniquement de la nationalité algérienne d’origine (…)». Ce qui n’est pas le cas de Bensalah. Sans préjuger de l’algérianité de l’homme, il est en revanche établi que Bensalah a acquis la nationalité algérienne en 1965.
Abderazzak Bouhara à la tête du Sénat ?
Ceci étant, qui remplacerait Bensalah à la tête du Sénat ? Selon toujours notre source, «Abderrazak Bouhara est fortement pressenti pour succéder à Abdelkader Bensalah». Il est, en tout cas, le candidat préféré de Abdelaziz Bouteflika, précise notre source.
«Les deux hommes sont liés par une très ancienne amitié qui remonte aux dernières années de la guerre de Libération.» Après une brouille qui a, tout de même, duré quelques années, les anciens «amis» se sont réconciliés en pleine campagne pour la présidentielle de 2004 lors de retrouvailles émouvantes immortalisées par la télévision.
Ancien commandant de l’ALN dans la Wilaya II, puis la Wilaya I et enfin au sein de l’armée des frontières, Bouhara a accompli une brillante carrière militaire après l’indépendance, avant de quitter l’armée en 1978 avec le grade de lieutenant colonel, le plus haut dans la hiérarchie de l’époque. Membre influent du FLN, il sera par ailleurs ministre de la Santé sous Chadli. En somme, un parcours qui le rend naturellement éligible à la prestigieuse fonction de deuxième personnage de l’Etat. Situé idéologiquement «très à gauche» depuis l’ère du parti unique, Bouhara traîne toutefois cette réputation de «frondeur» du système qui lui a toujours valu la méfiance de ses pairs dans le pouvoir. Bouteflika, classé, lui, plutôt à droite, partage en tout cas avec Bouhara ce tempérament de «frondeur». «D’ingérable», comme le dira notre source.
Ce détail pèsera-t-il en sa défaveur ? Certaines autres sources avancent, par ailleurs, le nom de Abdelaziz Belkhadem pour succéder à Bensalah. Mais pour un Belkhadem, cela serait une… sanction. Un président de la deuxième chambre ne pouvant se présenter à la présidentielle, en effet. Reste à savoir, enfin, la date que choisira Bouteflika pour procéder à ces changements. Avant ou juste après la fin de l’année en cours…
K. A.