La visite du chef de l’État en Tunisie pourrait répondre à plusieurs objectifs dont celui de prendre le train du Printemps arabe une année après le début des évènements qui ont chassé le premier président arabe.
Le président Bouteflika est, finalement, parti à Tunis pour assister à la célébration du premier anniversaire de la chute de Zine El-Abidine Ben Ali, aux côtés du très controversé émir du Qatar et du président du CNT libyen.
En dépit de toutes les maladresses commises par les nouveaux maîtres de Tunis, à commencer par le Premier ministre et le président provisoire, le président Bouteflika a tenu à prendre part aux célébrations, lui qui n’a de cesse défendu l’exception algérienne et lui qui a toujours refusé que l’on impose des changements à l’Algérie à partir de l’extérieur.
À ses côtés, il aura l’émir du Qatar, le sous-traitant zélé qui voudrait voir le monde arabe, sauf son Qatar, secoué par des révolutions pour des objectifs de façade que sont l’ouverture démocratique et la liberté d’expression. Mais il y a aussi le président du CNT, qui n’avait de cesse critiqué l’attitude de l’Algérie lors du déclenchement du conflit libyen.
Le président Bouteflika sera bien isolé à Tunis au milieu des islamistes d’Ennahda, d’un Marzouki prêt à tout pour rester président, mais surtout d’un Abdeljalil qui voit en l’émir du Qatar le sauveur de son pays. Au moment où Marzouki affirme vouloir relancer l’UMA, à travers l’activation de l’axe Tripoli-Tunis, au détriment d’Alger, l’on se demande à quoi rime cette visite présidentielle, en ce moment précis ? S’agit-il d’une opération de charme destinée à réaffirmer la disponibilité de l’Algérie à poursuivre le dialogue politique avec des voisins devenus de plus en plus encombrants surtout que la sécurité des frontières est se pose aujourd’hui avec acuité ?
Le leader d’Ennahda avait bien fait le déplacement à Alger depuis l’accession de son mouvement au pouvoir, histoire de rassurer ses voisins, mais son gouvernement et le président provisoire semblent privilégier leur voisin de l’Est, qui pourrait leur être d’une grande utilité, notamment en ce qui concerne l’absorption d’une partie du chômage en Tunisie, mais surtout, l’octroi de projets d’investissement.
Le Qatar peut casser la tirelire pour imposer son hégémonie sur la région, histoire de mettre en pratique des scénarios décidés ailleurs. Mais, même en Tunisie, la venue de l’émir du Qatar a été très mal accueillie par la rue, qui l’exprime tous les jours. D’ailleurs, Cheikh Hamad avait dû reporter une première visite à Tunis, le mois dernier, de peur de provoquer des manifestations hostiles.
Mais l’émir du Qatar sait que les besoins de la Tunisie sont énormes et il n’est pas venu les mains vides, puisque, vendredi, plusieurs accords et mémorandums d’entente ont été signés à Tunis. Il annonce en même temps son accord pour l’envoi par les pays arabes de troupes en Syrie afin de faire cesser la violence dans ce pays, selon l’extrait d’un entretien télévisé qui doit être diffusé aujourd’hui aux États-Unis par la chaîne CBS. Quelle sera la réaction du président Bouteflika même si la position interventionniste du Qatar est connue ?
A.B