Bouteflika célèbre sa victoire avant l’heure

Bouteflika célèbre sa victoire avant l’heure

Les résultats des élections présidentielles doivent être proclamés aujourd’hui. Les premières indications officieuses hier soir ont révélé un raz-de-marée en faveur de Bouteflika.

C’est un scrutin sans surprise. Les Algériens ont voté hier pour élire leur président, plusieurs incidents de fraude ayant émaillé la soirée. L.e camp de Ali Benfils, principal rival de Abdelaziz Bouteflika, a dénoncé des « entorses aux procédures », notamment des voitures transportant des urnes remplies de bulletins au nom du président sortant. De fait, les premières indications officieuses, hier à 22h, donnaient Bouteflika gagnant.

Son principal conseiller n’a pas attendu la publication officielle des résultats qui doit avoir lieu aujourd’hui pour proclamer sa victoire, donnant lieu à des scènes de liesse ce matin à Alger. « Notre candidat a gagné », a déclaré en fin de soirée à Reuters Abdelaziz Belkhadem, représentant personnel du chef de l’Etat. « Cela ne fait aucun doute, Bouteflika a remporté une victoire écrasante », a-t-il ajouté, sans plus de précision.

Au pouvoir depuis 15 ans mais physiquement diminué depuis son accident vasculaire cérébral du printemps 2013, le président algérien était à 77 ans le grand favori de l’élection face à une opposition divisée entre boycott et participation au scrutin. Totalement absent pendant la campagne électorale, Abdelaziz Bouteflika a voté hier dans un fauteuil roulant dans son bureau du quartier algérois d’El Biar, ne faisant aucune déclaration et serrant brièvement les mains de quelques sympathisants avant de repartir. C’était sa première apparition publique depuis des mois.

Le président algérien a été admis en avril 2013 à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce à Paris où il a passé trois mois avant de rentrer dans son pays pour y poursuivre sa convalescence. Mais depuis lors, ses apparitions publiques sont restées très rares et ses adversaires n’ont pas manqué de s’interroger sur sa capacité à diriger l’Etat.

Malgré sa faiblesse physique, Abdelaziz Bouteflika conserve plusieurs atouts qui devraient lui garantir une confortable victoire. Il dispose toujours du soutien d’une large partie de la population inquiète de voir ressurgir les violences islamistes qui avaient fait quelques 200.000 morts pendant la « décennie noire » des années 1990. « L’Algérie profonde a confiance en Bouteflika », déclarait durant la campagne Abdelmalek Sellal, qui a quitté ses fonctions de Premier ministre mi-mars pour diriger la campagne d’Abdelaziz Bouteflika. « Les gens, ajoutait-il, ne veulent pas aller vers ’l’aventurisme’. »

La probable réélection de Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, est perçue comme un gage de stabilité dans un pays où une partie de la population redoute de vivre les répercussions troublées des mouvements du « Printemps arabe » en Tunisie et en Libye voisines ou encore en Egypte. « Aucun pays n’est parfait à 100%, mais les choses qu’il a faites, il les a bien faites », a estimé un ingénieur à la retraite, Abdelsaïd Saïd, qui a voté pour le président sortant, dans le quartier de Bab El Oued. « Je sais qu’il est malade, mais je vote pour lui, pour ce qu’il a fait pour nous. Et il est toujours en mesure de gouverner », a-t-il ajouté.

Sa réélection serait aussi l’occasion d’organiser une transition en douceur, une stratégie qui a les faveurs des Américains et des Européens soucieux de maîtriser les mouvements islamistes dans la zone saharienne. « Il organise le transfert vers une république nouvelle. Il veut faire le transfert générationnel et il va le faire. On ne peut pas assurer aussi facilement un transfert », affirmait encore Sellal lors de la campagne. En 2004, Bouteflika avait été réélu avec 85% des voix, un score qu’il a porté à 90% cinq ans plus tard, lors de la précédente élection présidentielle qui, selon l’opposition, avait donné lieu à une fraude « industrielle ».