Les médecins, infirmiers, aides-soignants et administratifs des structures publiques de santé font souvent face à des patients agressifs.
Les premiers touchés par la violence en milieu hospitalier sont les soignants des urgences, le point d’entrée des polycliniques et autres centres de soins. Ce phénomène est vécu avec beaucoup de crainte à Boumerdes. Il est moins ressenti néanmoins dans le secteur privé. C’est ce que nous ont révélé les personnels de santé lors de nos déplacements. « Malades impatients, en état de choc, d’ébriété, en détresse psychique, accompagnateurs pressés, nos services réunissent quasi quotidiennement tous les ingrédients d’un cocktail explosif », a fait savoir Rachida B., médecin généraliste exerçant dans une polyclinique qui accueille, en moyenne, selon elle, près de 400 malades par jour que prennent en charge 3 médecins par équipe, outre les infirmiers et aides-soignants. « Vous pouvez donc imaginer la pression à laquelle est confronté le personnel soignant, ajouter à cela les cas d’agression. Des agressions physiques, verbales comme les injures, les menaces, voilà le lot de notre quotidien », explique le médecin. « Il y a deux jours de cela, alors que j’étais de garde, j’ai failli être agressée par un malade n’était-ce l’intervention prompte de mon collègue médecin. Un malade s’est présenté à notre service avec des plaies sur le bras après une altercation qui l’avait opposé à son adversaire. Il était dans un état d’ébriété avancée.
En l’approchant pour lui prodiguer les soins nécessaires, il a levé la main sur moi pour me donner un coup en plein visage », raconte-t-elle. Pourtant, la structure sanitaire venait de se doter d’un service de sécurité après les plaintes et réclamations du personnel, victime d’agressions répétées, notamment les médecins et les infirmiers. « Mais ce jour là, le policier était absent », regrette-t-elle. « Nous ne sommes pas protégés comme il se doit », déplore, pour sa part, le gardien chargé de l’orientation des malades. Sa collègue abonde dans le même sens. Elle a failli être agressée par un malade accoutumé des psychotropes qui a failli lui pointer une seringue dans l’œil. « Dieu merci, j’ai été vigilante et je l’ai repoussé », explique Dr K. L., médecin.
Il a fallu, dit-elle, appeler les gendarmes qui attendaient à l’extérieur de la salle de soins et qui avaient accompagné ce jour-là les drogués qui présentaient des blessures après une dispute, vraisemblablement acharnée, entre eux. Au service maternité, la sage-femme dit avoir été « victime de violence verbale, injures et menaces émanant du mari d’une parturiente que nous avons orientée vers l’hôpital d’Aïn Taya parce qu’elle présentait une grossesse à risques étant donnée qu’elle est hypertendue, en plus elle n’était pas à terme et avait le temps d’y aller », raconte Houria qui dit avoir reçu une avalanche d’insultes pour avoir été prudente.
Tensions
Par ailleurs, les médecins disent être confrontés au manque de temps et travaillent dans un contexte de tension pour manque d’effectif, ce qui impose, parfois, de ne pas se conformer aux normes de diagnostic ou de ne pas répondre à la demande d’aide et d’écoute du patient car la charge de travail est trop importante. Tous ces facteurs peuvent provoquer une tension dans l’équipe ou un épuisement physique et/ou psychique. La violence peut provenir de patient à personnel comme des exigences en termes de rapidité accusant les médecins de négligence et de laisser-aller. La situation est, à en croire les médecins, très tendue, surtout au service des urgences, premier point de chute des malades et, notamment, dans la tranche horaire s’étalant de 23 h à 5h. « Il faut revoir l’organisation, notamment au niveau des urgences et gérer les patients et autres accompagnateurs irrités », suggère un médecin. Les employés imputent cette situation aux conditions de travail : manque de personnel médical et paramédical, manque de moyens, tout cela crée une tension continue. En revanche, le secteur privé est plus ou moins épargné par cette violence. Selon Dr L. H., il est des patients qui réclament du médecin des médicaments dont ils n’ont pas besoin tels que les psychotropes. « Il faut savoir les convaincre, même s’ils insistent, en leur expliquant que le généraliste n’a pas le droit de prescrire ce genre de médicament », dit-elle, ajoutant : « Une fois, un jeune s’est présenté à mon cabinet avec une ordonnance alors qu’il était déjà servi et m’a demandé de lui donner une autre ordonnance certainement pour revendre le médicament », atteste le médecin.
Dj. Chaouch