Bouira,Le citoyen saigné par les prix des fruits et légumes

Bouira,Le citoyen saigné par les prix des fruits et légumes

La pomme de terre vient de franchir sur les étals de Bouira la barre fatidique des 100 DA le kilo.

Chez nos voisins d’outre-mer, l’élection présidentielle se jouera peut-être autour du thème du pouvoir d’achat. En Algérie, les hausses permanentes des prix des produits alimentaires ne semblent en aucun cas intéresser nos politiques. Depuis les dernières neiges et leurs conséquences, les prix des fruits et légumes «montent» quotidiennement.

La pomme de terre vient de franchir sur les étals de Bouira la barre fatidique des 100 DA le kilo. Au risque de nous répéter, nous dirons que la wilaya de Bouira ne doit pas s’enorgueillir d’être dans le trio des régions productrices quand ses habitants ne peuvent plus se permettre 2 kg de pomme de terre. Dans une récente édition, nous avions rapporté les propos ô combien élogieux du directeur de l’agriculture qui se vantait de l’avancée enregistrée dans les contrats de performance. A moins que la performance n’a aucun impact sur le citoyen et ne représente que des chiffres qui se suivent et se ressemblent. Cependant, la wilaya compte atteindre le million et demi de tonnes avec la cueillette saisonnière et celle de l’arrière-saison.

Le citoyen ne comprend pas le paradoxe entre ces statistiques et ce qu’il débourse pour nourrir ses enfants surtout que la pomme de terre qui était, à son origine considérée comme un aliment pour les porcs, reste le légume du pauvre. En lisant l’article de notre collègue A. Amarni, nous avons été étonné quant à la justification donnée par l’Office national interprofessionnel des légumes et viandes. Ce dernier justifie la hausse des prix par la faiblesse de la production d’avant-saison. A Bouira, tout le monde sait que les chambres froides attribuées dans le cadre des aides aux agriculteurs sont pleines à craquer de ce tubercule qui s’écoule dans la discrétion la plus totale. Sur les étals, ce sont les productions du Sud qui sont proposées alors que les récoltes de Bouira vont vers d’autres régions du pays. Même l’argument concernant l’incapacité des agriculteurs d’accéder à leurs champs reste léger pour beaucoup. «La hausse a débuté bien avant les intempéries. Ce qui était proposé à la vente la quinzaine passée n’était autre que le produit stocké depuis l’été dernier», nous annoncera un agriculteur. La pomme de terre, comme beaucoup d’autres produits à très forte consommation, est aux mains de lobbies très bien organisés qui dictent leur loi.

«Les pouvoirs publics se cachent derrière ce justificatif de la liberté des prix parce que ces lobbies ont des relais dans les sphères du pouvoir», nous confie un syndicaliste. Il y a quelques années, pour tenter de contrer ces réseaux, l’Etat a mis en place le Syrpalac (système de régulation des produits de large consommation).

«Nous avons adhéré à ce système mais nous nous sommes vite retrouvés à courir derrière nos dus que l’organisme tardait à honorer», nous confie un producteur de Bouira. Cette autre forme de bureaucratie a amené les producteurs à écouler leurs productions sur pied à des intermédiaires qui cèdent, de leur côté la production à des grossistes. Au bout de la chaîne, le consommateur et le producteur restent les maillons faibles d’un circuit qui a la mainmise sur le marché.