Bouira : Une nuit avec les policiers

Bouira : Une nuit avec les policiers

P140720-07.jpgLes services de la police judiciaire de la sûreté de wilaya ont organisé jeudi dernier une opération au profit de la presse locale.

A 18 heures, le chef de service, Djamel R., secondé par le chef de la brigade des stupéfiants et de l’agréable chargée de communication Ghania, exposent aux journalistes l’objet de la première sortie. Une information transmise à partir d’un point d’observation dans un quartier populaire fait état de la présence d’un groupe de dealers. «Nous allons nous déplacer sur place pour assister à l’assaut des policiers.» L’unique femme dotée des mêmes missions que ses collègues nous accompagne.

Arrivés sur les lieux et par discrétion, nous resterons loin pour éviter d’attirer l’attention des guetteurs. «Dans leur commerce, les dealers bénéficient du soutien d’éclaireurs, de guetteurs. La mission peut foirer dès qu’un véhicule policier est repéré. C’est pour cette raison que nos équipes du front utilisent des moyens personnels inconnus des maffieux» le chef de la brigade des stupéfiants est en civil à bord de sa propre voiture. Une centaine de policiers en civil sont sur les lieux.

L’assaut est donné. En plus d’être rapide, l’intervention est minutieusement préparée.

Chaque policier a un espace précis à couvrir. Rapidement 15 jeunes soupçonnés sont appréhendés et directement transférés au commissariat à bord des véhicules de marque Nissan qui arrivent. Les renforts en tenue sont là pour continuer le travail des civils. «Le lieu est une impasse, l’accès est unique pour les véhicules. Les marchands de la mort savent que toute intervention policière est difficile. Nos unités en tenue sont là pour assurer la sécurité de l’opération qui reste difficile, car on craint toujours une réaction agressive des habitants du quartier.» la réaction à laquelle nous assisterons est tout autre.

Une personne âgée vient et de sa main tape sur le capot du véhicule en criant «c’est ces voyous qui empoisonnent notre vie et celle de nos enfants». Retour au commissariat. Le couloir est bourré de monde. Les jeunes appréhendés sont là. Le commissaire ordonne l’ouverture de tous les bureaux et le début du travail.

L’heure du f’tour approche

Des fiches de renseignements, des vérifications du fichier national permettent de savoir que neuf inculpés sont connus des services, cinq ne figurent sur aucun fichier et un autre a donné une fausse identité. La maman de ce dernier ne tarde pas pointer au commissariat. Profitant de son âge et du respect affiché par les policiers envers sa personne, elle commence à vociférer des propos accusant les policiers d’avoir frappé son enfant. «Il l’ont menotté alors qu’il n’a rien fait» criait la vieille dame.

Le chef de service intervient, calme la dame et exige le livret de famille pour contrôler l’identité du suspect. Le travail de fichage, de vérification continue. «La mission est réussie même si nous n’avons pas trouvé de stupéfiants. En intervenant dans un lieu aussi dangereux, nous marquons les esprits et la peur s’installe dans le milieu de la pègre. Notre action est aussi un réconfort pour les populations à l’image de ce vieux qui a bradé la peur et a ouvertement accusé les inculpés en leur présence» nous confieront les responsables de l’opération.

L’heure du ftour approche. Malgré notre détermination à rentrer chez nous, la chargée de communication Ghania, le chef de service de la police judiciaire et le chef de sûreté sont catégoriques. «Vous prendrez votre ftour avec nous», nous nous soumettons à l’invitation.

Nous apprendrons que tous les inculpés ont été relâchés, sauf cet individu qui a donné une fausse identité. «Il prendra le f’tour avec nous, parce qu’on doit le mensurer (introduire son affiliation, ses empreintes, sa photo… dans le système et le fichier national. On le libérera mais sa déclaration sera transmise au parquet plus tard», nous confiera un officier. 21 heures, nous partons pour la seconde mission. La ville grouille de monde. A bord des deux véhicules banalisés, nos hôtes nous montrent les différents points de contrôle et de sécurisation mis en place autour et dans la ville.

Des patrouilles pédestres

En plus des traditionnels barrages fixes et filtrants, les patrouilles de la brigade de recherche et d’investigation (BRI), de la Brigade de la répression du banditisme (BRB), des patrouilles pédestres, des éléments en civil renforcent ce dispositif de sécurisation. Des barrages inopinés sont installés à différents points autour de la ville. Il est 22heures 15, la tension monte. L’éclairage public s’est éteint plongeant la ville dans le noir. La radio annonce la présence d’un barbu vêtu d’un blouson en cuir dans cette canicule où le thermomètre affiche 35°.

La brigade stationnée au rond-point Cevital intervient, interpelle l’individu et le transfère au commissariat central. On rentre. Le bonhomme donnait l’impression d’être un malade. Les policiers font quand même le travail de vérification. Troisième et dernière sortie. Nous assistons à des contrôles effectués par les patrouilles de la BRI et de la BRB.

Le lieu, les villas inhabitées à la limite de la forêt Errich. «Les consommateurs de drogue choisissent pareils endroits, isolés et loin des yeux» nous dira Belkacem, l’autre officier de la cellule de communication. Alors qu’on rentrait définitivement au commissariat, les radios annoncent un incident du côté du supermarché.

Des fraudeurs ont bloqué la circulation avec leurs véhicules. Ordre est donné aux unités motorisées d’intervenir. Sur place les policiers ont retiré les papiers des véhicules à l’ensemble des clandestins qui sont invités à se présenter au commissariat pour les récupérer.

Avec beaucoup de tac et de bon sens, les policiers traitent chaque incident. «On est là pour la sécurité du citoyen, de ses biens. Nous ne sommes pas des hommes et femmes venus d’ailleurs. Nous préférons d’abord calmer, convaincre. Nous restons bien sûr les garants des lois de la République, c’est notre première mission» nous confiera Ghania, une femme qui en ce mois de Ramadhan sacrifie sa petite famille, (elle a pris le ftour avec nous) pour que d’autres déjeunent tranquillement chez eux en toute quiétude.