Réputée pour son marché de gros lequel a défrayé la chronique ces derniers jours en raison d’une grève qui s’est répercutée sur la bourse du consommateur, Bougara ne se résume cependant pas à cela. C’est une commune comme toutes les autres, avec ses problèmes, ses rêves et ses espoirs et où il fait bon ou pas bon vivre, selon les moments et les circonstances.
Après le ciel printanier, prolifèrent les nids de cigognes perchées sur les pylônes électriques à l’entrée de la ville. Le vert laisse peu à peu place à la fadeur du gris et du rouge brique des constructions plantées çà et là, rarement finies, et toutes enguirlandées de fils et câbles divers, (paraboles, électriques et téléphones). «Le café est le seul refuge des jeunes et des moins jeunes à défaut de toute forme d’activité culturelle.
Les plus jeunes ne savent même pas ce que c’est qu’une salle de cinéma», nous dira Samir, gérant d’un petit café non loin de la gare routière. Cette petite commune de 60 000 habitants abrite l’ennui. «Nous manquons cruellement de lieux de distraction, de loisirs et de culture. Ces activités qui éveillent l’esprit et qui aident à vivre dans un environnement rural à peine à 40 km d’Alger», ajoutera-t-il.
Un petit centre-ville tout habillé de béton avec à peine le strict nécessaire : quelques boutiques, cafés et fast-food. À croire que cette commune a jailli de la terre, sans histoire, sans passé.
D’une tristesse sans nom. Attachés à leur localité malgré la désertion de toute forme d’activités culturelles locales, les habitants de cette localité souffrent d’offrir un tel spectacle. «Mis à part le marché et les rares entreprises, ainsi que quelques commerces qui arrivent à protéger nos enfants de la dérive en leur offrant un emploi, notre ville a toujours été à l’abandon» nous dira un sexagénaire. «Cet abandon a fini par lasser les habitants qui ont dû se résigner à s’adapter à ces conditions de vie que la nouvelle génération finit par trouver normales», poursuivra-t-il. Le désenchantement est tel que la population a du mal à voir l’amélioration de sa vie quotidienne.
Pire, certains ne l’envisagent même pas. «Le laisser-aller de nos élus locaux a eu raison des bonnes volontés qui auraient pu naître.
Parler de culture ou d’histoire de la ville pourrait vous valoir de passer pour la risée du village, sinon pour un fou, tant cette notion est absente dans l’esprit et l’imaginaire des habitants», ajoutera Ammi Boualem, un natif de cette ville, mais qui a bien connu les années où la culture existait encore dans notre pays, notamment dans les grandes villes qu’il a connues.
Les années où les pouvoirs publics misaient sur cet aspect de la vie sociale et avaient conscience de sa nécessité pour former le citoyen de demain. «Nous avons bien tenté de faire naître une vie culturelle à une certaine époque, mais les années 90 sont passées par là, peut-être plus qu’ailleurs, ce qui a mis fin aux petits espoirs que certains caressaient encore.
Le papotage, les déboires ou la réussite d’un tel ou d’un tel autre, entre deux cafés, sont les seuls sujets d’échanges qui passionnent, notamment la nouvelle génération», ajoutera-t-il d’un air amer.
L.S