Bonne année Algérie 2014 : bilan et perspectives

Bonne année Algérie 2014 : bilan et perspectives

L’année 2013 s’achève et commence l’année 2014. Quel est le bilan de l’économie algérienne afin de tracer les perspectives futures entre 2014/2020 ? Malheureusement, après plus de 50 années d’indépendance, c’est la prédominance de la rente des hydrocarbures qui irrigue toute l’économie et le corps social : Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie, c’est Sonatrach.

Indicateurs financiers

Sonatrach a engrangé entre 2000 et 2013 environ 670 milliards de dollars selon les bilans officiels. Cela a permis une dépense publique sans précédent depuis l’indépendance politique. La dépense publique a été de 7 milliards de dollars entre 2001-2003. Le président de la République a annoncé lors d’un Conseil des ministres durant le dernier trimestre 2011 que 500 milliards de dollars devaient être mobilisés entre 2004-2014. En 2010, le gouvernement algérien a déclaré officiellement que 130 milliards de dollars sont des restes à réaliser du programme 2004/2009. À ce propos, je voudrai souligner que la Direction générale de la prévision et des politiques (DGPP) du ministère algérien des Finances a déclaré, le 7 mai 2013 – information reprise par l’agence officielle APS – que les deux plans quinquennaux successifs ont été respectivement dotés de 100 et de 286 milliards de dollars, soit une enveloppe budgétaire globale de 386 milliards, pour la décennie 2005-2014. L’écart entre le niveau de décaissement effectif, incluant les prévisions pour l’année 2012 selon la DGPP – qui restent cependant provisoires -, et celui inscrit dans les deux programmes – 500 milliards de dollars – s’explique par la faiblesse de la capacité du marché algérien à absorber les investissements projetés, notamment du secteur du BTP. Pourquoi a-t-on donc parlé initialement d’une dépense publique de 500 milliards de dollars pour la situer ensuite à 386 milliards, alors qu’aucun bilan n’a été réalisé à ce jour ? Puisque la DGPP parle uniquement d’investissement, la différence est-elle due aux matières premières importées- le taux d’intégration, tant des entreprises publiques que privées algériennes, ne dépassant pas 15 % – et inclues dans la dépense publique ? La rente des hydrocarbures a permis également d’importantes réserves de change – moyen et non facteur de développement estimées à 56 Mds $ en 2005, 77,78 Mds $ en 2006, 110 Mds $ en 2007 à 138,35 Mds $ en 2008, à 147,2 Mds $ en 2009, à 157 Mds $ fin 2010 à 188 Mds $ fin 2011 190 fin 2012, 189,750 milliards de dollars à fin juin 2013 selon le gouverneur de la banque d’Algérie en ce mois de décembre 2013 devant l’Assemblée populaire nationale, à l’occasion de la présentation du rapport relatif aux évolutions économiques et monétaires en 2012 dénotant une baisse des réserves de change, étant prévu selon le FMI 2013 milliards de dollars fin 2013, montant auquel il faut ajouter 173 tonnes d’or dont le stock selon le FMI n’aurait pas évolué depuis 2009 alors qu’il ya production d’or dans al région de Tamanrasset. Ces réserves garantissent plus de trois années d’importation. Le placement de ces réserves se fait actuellement à travers des dépôts auprès des banques centrales à raison de 6% selon le gouverneur de la banque d’Algérie, alors qu’en 2010 il affirmait devant les députés que ce taux était de 3% ( donc des placements à moyen et long terme), le reste se faisant à travers des obligations, des bons du Trésor et des actifs, auprès d’établissements bénéficiant d’un bon rating, soit la notation triple A. Les dépôts auprès des banques centrales étrangères sont dominés par le dollar américain (61%) et l’euro (28%), et les obligations et bons du Trésor sont répartis sur plusieurs instruments dont les fonds souverains (65%), les établissements gouvernementaux (12,9%), les agences d’établissements supranationaux et internationaux (14,2%) et la Banque des règlements internationaux (BRI, 6%). La répartition par portefeuilles de ces dépôts montre que les établissements supranationaux détiennent 21,8% des dépôts, les Etats-Unis 20,7%, détenus sous forme de bons du Trésor, l’Allemagne (15,2%), la France (12,4%), les Pays-Bas (9,6%) et le Royaume-Uni (8,2%). En 2013 alors qu’en 2010, la répartition qui était de 45% en dollars, 45% en euros, 5% en livre sterling et 5% en yen japonais toujours selon le gouverneur à l’époque, ce panier des devises étrangères a évolué et est composé du dollar américain (52%), de l’euro (37%) et de la livre sterling (9,6%). Comme les intérêts des placements à l’étranger ont été d’environ 5 milliards de dollars à un taux d’intérêt fixe de 6% ( le court terme étant actuellement entre 2 et 2,25%), ne pouvant retirer ces fonds avant terme sinon, ( il faudrait prendre en compte les conditions du contrat lors de ces placements), l’on perdrait les intérêts, il en résulte que plus de 83% des réserves de change sont placées à l’étranger. Etant entendu que les placements au niveau du FMI d’environ 8 milliards de dollars de droits de tirages spéciaux le sont à un taux inférieur à 1% dont les 5 milliards de dollars de prêts accordés au FMI. Cette manne a permis à l’Algérie d’éteindre la dette extérieure de l’Algérie et déponger artificiellement une partie de sa dette intérieure. Le FMI a classé l’Algérie au titre du pays le moins endetté des 20 pays de la région MENA pour l’année 2012,dans un rapport spécial sur les perspectives économiques de la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord, la dette extérieure brute de l’Algérie ne représentant que 2,4 % du produit intérieur brut en 2012 et devra se maintenir au même taux en 2013 contre 2,8 % en 2011. En 2012, pour le Ministre des finances devant les députés a indiqué que l’Algérie a réduit sa dette extérieure de 28 milliards de dollars (55% du PIB) en 1999 à 410 millions de dollars en 2012.

Mais d’une manière générale, il faut se méfier des artifices comptables où selon le rapport du gouverneur cité précédemment, le déficit du compte courant de la balance des paiements s’est encore accentué en 2013, avec la réduction des exportations d’hydrocarbures de 14,31% durant le premier semestre 2013 par rapport à la même période de 2012, baissant de 37,50 milliards de dollars à 32,14 milliards de dollars. Ainsi, la balance des paiements extérieurs a été déficitaire durant le premier semestre 2013, accentué également pour les neuf premiers mois de 2013 de plus de 1,7 milliard de dollars, le compte courant de la balance des paiements ayant accusé un déficit de l’ordre de 1,2 milliard de dollars durant le premier semestre 2013 contre un excédent de 10 milliards de dollars durant la même période de 2012. En plus, il ne faut pas se limiter à la balance commerciale, mais étudier la balance de paiements qui montre que le montant poste assistance technique étrangère est passé de 2 Mds $ en 2002 à 11 Mds $ entre 2009/2010 et a été d’environ 12 Mds $ en 2012.Cela témoigne de la fragilité de la balance des paiements extérieurs devant les chocs externes. La léthargie de d’une économie rentière renvoie à la valeur réelle de la monnaie. On peut établir un coefficient de corrélation entre la cotation du dinar et l’évolution du cours des hydrocarbures pour un taux d’environ 70 %, 30 % étant dues aux phénomènes spéculatifs et aux sections hors hydrocarbures bien que limitées. Concernant justement la cotation du dinar pour la banque d’Algérie qui parle de glissement et non de dévaluation, le dinar est fixé par le marché interbancaire où interviennent 19 banques de la place en plus de la Banque d’Algérie, le gouverneur minimisant la question de la perte de change, surcoût supportés tant par les entreprises que par les consommateurs. Mais cela n’explique pas le paradoxe d’un glissement à la baisse du dinar tant par rapport au dollar et l’euro alors que leur cotation est inversement proportionnelle. L’explication est de voiler l’importance du déficit budgétaire en gonflant artificiellement la fiscalité hydrocarbures mais également les taxes sur les produit importés toujours via les hydrocarbures ainsi que le fonds de régulation des recettes où le dollar et l’euro sont reconvertis en dinars algériens, accentuant par là l’inflation importée. C’est grâce aux réserves de change dues aux hydrocarbures et non au travail (l’Algérie étant classée pour la productivité les libertés économiques un des derniers de la région MENA entre 2012/2013) que le taux de change officiel est maintenu à 110 DA un euro. Face à l’incertitude politique, outre que beaucoup de responsables vendent leurs biens pour acheter des biens à l’étranger, beaucoup de ménages se mettent dans la perspective d’une chute des revenus pétroliers et commencent à acheter les devises sur le marché informel, au lieu de l’or qui a chuté depuis deux années, accentuant l’écart entre le cours officiel et le cours sur le marché parallèle (entre 40/50%). Si on suppose une appréciation du dinar de 50 % rejoignant, en tendance, les cotations des monnaies marocaine et tunisienne, le déficit budgétaire dépasserait largement 50-60% du produit intérieur brut, réduisant d’autant la fiscalité hydrocarbures où le montant en dollars est reconverti en dinars algériens au cours du mois Est-il nécessaire de préciser qu’une réévaluation du dinar réduirait d’autant le fonds de régulation des recettes, étant entendu que la technique retenue pour la Loi de finances est le cours plancher de 37 dinars / un dollar le cours des hydrocarbures, la différence étant placée dans le fonds de régulation.

2.- Indicateurs de la sphère réelle

L’économie algérienne se caractérise par 96/97% d’exportation d‘hydrocarbures à l’état brut et semi brut ( sur les 3/4% restant 50% sont constitués de dérivées d’hydrocarbures) donnant en réalité 98% provenant des hydrocarbures, et important 70-75% des besoins des ménages et des entreprises dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15%, quelles soient publiques ou privées. Selon le FMI, plus de 40-45 % du produit intérieur brut (PIB) sont générés par les hydrocarbures mais en réalité, tenant compte des effets indirects de la dépense publique via toujours les hydrocarbures, le BTPH, qui tire la croissance actuelle, il reste moins de 20% pour les véritables producteurs de richesses. Comme le reconnait le premier ministre algérien lors d’une récente réunion le 18 mai 2013, les assainissements répétés des entreprises publiques n’ont pas eu les effets escomptés. Je le cite : « 1000 milliards de dinars d’assainissement seulement ces dernières années sans résultats probants ». Mais ces montants s’ajoutent au 50 milliards de dollars entre 1971/2011. Côté importations aussi, l’Algérie se trouve dans une situation peu reluisante. Le rapport réaliste mais alarmant du gouverneur de la Banque d’Algérie montre que les importations poursuivent leur tendance haussière en 2013, au rythme de 20% par rapport au premier semestre 2012. Ces importations ont atteint les 28,38 milliards de dollars contre 23,64 milliards de dollars durant la période considérée de 2012, y compris paradoxalement les carburants dont la facture a dépassé les 2 milliards de dollars en 2012. Mais existe un paradoxe, malgré l’importance de la dépense publique, car le PIB reste modeste, encore que l’indice du développement humain (IRH) est un indicateur plus fiable que le PIB. Pour l’Algérie le PIB en 2013 est estimé par le FMI à 216 milliards de dollars en 2013 contre 209 en 2012, pour un PIB mondial estimé à 73.000 milliards de dollars, L’Algérie pour une population d’environ 38 millions d’habitants en 2013, représente 1,33% du PIB des Etats Unis d’Amérique en 2013 et 0,29% du PIB mondial et le PIB de l’ensemble des pays du Maghreb ne dépasse pas 420 milliards de dollars, témoignant d’une marginalisation croissante au sein de l’économie mondiale. Entre 2000/2012, le taux de croissance moyen en Algérie n’a pas dépassé 3% avec une prévision en baisse pour 2013 selon la FMI (2,7%) alors qu’il aurait du être de plus de 10% malgré une dépense publique sans précédent depuis l’indépendance politique. Bien que ce taux puisse faire rêver bien des pays européens, il faut relativiser. En termes de calcul, le taux de croissance se calcule par rapport à la période précédente et qu’un accroissement appliqué à un produit intérieur brut faible (PIB) donne globalement un taux faible. Cela montre un divorce entre la bonne santé financière de l’État, due aux hydrocarbures, et la sphère réelle de l’économie, avec cet adage, un pays riche mais une population de plus en plus pauvre du fait de la concentration excessive du revenu national au profit d’une minorité rentière, expliquant le malaise social. Tenons-nous à deux indicateurs fondamentaux l’inflation le chômage. Cancer de la rente l’inflation a doublé par rapport à 2011 à 8,89 % en 2012 selon les chiffres officiels – et même 15 % pour les produits de première nécessité auxquels s’adresse la majorité de la population, bien qu’en baisse pour 2013 (4%). Mais attention, aux fausses interprétations, le taux d’inflation s’analyse par rapport à la répartition du revenu du modèle de consommation par couches sociales, un Algérien percevant 20.000 dinars par mois n’ayant pas la même perception de l’inflation que celui qui perçoit 300.000 dinars par mois, 70% de son modeste revenu étant destinés aux produits de première nécessité. D’où l’importance d’éclater l’indice par produits, le besoin étant historiquement daté et un indice global n’ayant que peu de signification. Le taux d’inflation se calcule par rapport à la période précédente. Un taux relativement faible en 2013 par rapport à un taux élevé en 2013 donne un taux cumulé élevé. Encore faut-il considérer que le taux officiel d’inflation est comprimé par des subventions généralisées et non ciblées, ce qui explique le faible impact de ces subventions. Quant aux IDE, contrairement aux données euphoriques de l’ANDI assimilant projets déposés avec réalisation en plus se concentrant dans le transport ( 50% des projets étant abandonnés après avoir bénéficié des avantages) les résultats hors hydrocarbures sont mitigés. Surtout depuis la promulgation des lois de Finances complémentaires de 2009/2010, qui interdisent à tout investisseur étranger de détenir plus de 49 % des parts d’une société locale, et l’oblige donc à accepter un actionnariat algérien majoritaire, à 51 % minimum, l’Etat algérien supportant tous les surcoûts. Si cette règle peut se comprendre pour les secteurs stratégiques, généralisées à l’ensemble de l’économie, elle a produit peu d’ effets positifs sans dynamiser le tissu économique. Il faudrait privilégier un co-partenariat basé sur un e balance devise et un transfert technologique et managérial au profit de l’Algérie. Pour les co-localisations, pour l‘instant la banque d’Algérie interdisant tout transfert, selon la loi sur la monnaie et le crédit, cela ne peut se faire qu’à sens unique en Algérie, devant prévoir à l’avenir que 25% des réserves de change se transforme en fonds souverains.

Pour le taux de chômage, le taux officiel est de 10 % – relativement modeste au regard des autres pays du Maghreb, mais aussi de l’Espagne et de la Grèce, toutes deux autour de 27 % -, met surtout en exergue la faible crédibilité de certaines statistiques algériennes. D’une part, parce que selon, le rapport 2012 de l’ONS, le secteur informel représente autour de 50 % de l’activité économique du pays. D’autre part, ces statistiques incluent les sureffectifs des entreprises publiques, des emplois fictifs – comme faire et refaire des trottoirs. les emplois temporaires de moins de six mois improductifs ou faiblement productifs, et les emplois rentes dans l’administration d’ailleurs de plus en plus nombreux où l’on approche des 2 millions de fonctionnaires pour une population active totale estimée à 11,5 millions en 2012 par la Banque mondiale. Redressé en rapport aux emplois produisant de la valeur directement (sphère économique) et indirectement (santé –éducation) le taux réel de chômage dépasse les 20/25%. Encore que pour l’éducation, le défi futur est de privilégier la qualité et non la quantité, de tisser des relations étroites avec les besoins réels de l’économie, si l’on veut éviter de fabriquer des diplômés chômeurs, plus de 1,5 millions d’étudiants devant sortir des universités horizon 2017.

3.- Sphère informelle et subventions

Autre caractéristique de l’économie algérienne le poids croissant de la sphère informelle, produit de la bureaucratie paralysante qui s’érige en pouvoir bureaucratique au lieu d’être au service du citoyen. Selon Deborah Harold, enseignante américaine de sciences politiques à l’université de Philadelphie et spécialiste du Maghreb, dans une conférence donnée à Alger courant 2012, se basant sur des données de la banque d’Algérie, l’économie informelle brasserait 50 % de la masse monétaire en circulation soit 62,5 milliards de dollars( voir Abderrahmane Mebtoul – poids de la sphère informelle au Maghreb-Algérie-Maroc-Tunisie- Institut Français des Relations Internationales – IFRI- Paris – 03 décembre 2013). Ces données sont corroborées par la banque d’Algérie où prenant en compte les données de sa note « Amélioration de la circulation de la monnaie fiduciaire en 2012 et 2013 », la masse monétaire M2 (monnaie fiduciaire et dépôts bancaires) étant passée de 25% en 2010 à 25,9% en 2011 pour atteindre 26,7% à fin 2012. Selon un document du Ministère du commerce algérien, il existeraient 12.000 sociétés écrans avec une transaction qui avoisinerait 51 milliards d’euros soit 66 milliards de dollars, plus de quatre fois le chiffre d’affaires de toutes les grandes entreprises privées qui regroupe environ 499 entreprises. Tout se traite en cash, alors que le fondement d’une économie saine se fonde sur le crédit et le contrat, expliquant en garde partie la corruption qui freine le développement du tissu productif. Dans ce cadre la banque d’Algérie pour lutter contre cette intermédiation financière informelle, devrait dynamiser l’agrément de banques mixtes à l’étranger pour canaliser l’épargne de l’émigration, des bureaux de change privés locaux où sur 46 bureaux de change agréés, 18 ont rendu l’agrément du fait que la marge sur les transactions fixée à 1% est faible, mais « 9 demandes sont en instruction », la Banque d’Algérie devant bientôt revoir sa réglementation et porter ce taux à 5% pour donner « un nouvel élan » à cette activité. Car, sur le plan strictement économique, la monnaie constitue avant tout un rapport social fonction du niveau de développement économique et social, traduisant la confiance ou pas entre l’Etat et le citoyen, le niveau de confiance économique se détérioration suivant le niveau de l’inflation. Pour se prémunir contre la détérioration du dinar algérien, l’Algérien ne place pas seulement ses actifs dans le foncier, l’immobilier ou l’or, mais une partie de l’épargne est placée dans les devises. De nombreux Algériens profitent en effet de la crise de l’immobilier, notamment en Espagne, pour acquérir appartements et villas dans la péninsule ibérique, en France et certains aux USA et en Amérique latine sans compter les paradis fiscaux. C’est un choix de sécurité dans un pays où l’évolution des prix pétrolier est décisive. S’il n’y avait pas de pétrole et de gaz, et les réserves de changes, l’euro s’échangerait à 300 ou 400 DA. Mais une des raisons du développement de la sphère informelle sont les subventions. L’Algérie subventionne indirectement tous les pays au frontières un grand nombre de produits de première nécessité, comme les céréales, l’eau et le lait, l’électricité et le carburant sinon le taux d’inflation officiel dépasserait les 10/15%. Mais avec une très profonde injustice sociale, celui qui gagne le SNMG au chef d’entreprise national ou étranger, bénéficient des prix subventionnés, n’existant pas de système ciblé de subventions. Outre cette disparité dans l’octroi du soutien de l’Etat, il faut remarquer l’opacité dans la gestion des transferts sociaux qui sont passés de 245 millions de dinars en 1999, à 1200 milliards de dinars en 2011, à 1400 milliards de dollars selon les loi de finances 2012/2013 et 1 603,2 milliards de dinars en 2014, Selon le Ministre des finances algérien, la dépense sociale budgétisée représente pour 2012/2013 une moyenne d’ un quart du budget de l’Etat et 13% du PIB national. Ce taux atteindrait les 30% du PIB si on incluait les subventions non budgétisées (dont les produits énergétiques, les plus subventionnés dans al région MENA). Ces subventions expliquent le gaspillage des ressources rares et également les fuites de produits hors des frontières, et les mesures administratives ne peuvent qu’être ponctuelles supposant de nouveaux mécanismes de régulation, l’Algérie étant en transition depuis 1986, ni une économise de marché, ni une économie administrée expliquant les difficultés de régulation politique, sociale, économique et financière.

4.- Les défis de l’Algérie

Le pouvoir d’achat des Algériens est tributaire à plus de 70% de la rente des hydrocarbures brut et semi brut et est donc un pouvoir d’achat artificiel et avec la crise de confiance Etat –citoyens tous les segments d la société veulent leur part de rente, et immédiatement, quitte à conduire le pays au suicide collectif. La dernière nouveauté et sans pudeur, ce sont les députés algériens qui réclament un salaire, s’adressant directement au président de la République, uniquement pour lever la main, de 37 millions de centimes par mois( deux fois le salaire d’un professeur d’Université en fin de carrière) et en plus un passeport diplomatique. C’est un véritable scandale et un mépris pour le peuple algérien, en espérant que les pouvoirs publics refuseront cet offre de services de rentiers. Le blocage étant d’ordre systémique. Les différentes dévaluations du dinar algérien qui était coté un dinar 5 dollars en 1974, puis 45 dinars un dollars en 1994 étant passé à 81 dinars un dollar en 2013, entre 100/ 110 dinars un euro entre 2010/2013 qui en principe constituent un dumping à l’exportation, n’ont pas permis de dynamiser les sections hors rente. 83% du tissu économique est constitué de petits commerce/services et 95% du tissu industriel en déclin de petites PMI/PME non initiés au management stratégique. Qu’en sera-t-il de l’impact de l’abrogation ou modification de l’article 87 bis sur ces PMI/PME restantes qui ne pourront supporter de lourdes charges salariales ? Qu’en sera t–il de l’impact de l’Accord d’Association avec l’Europe signé le 01 septembre 2005, où le dégrèvement tarifaire sera zéro a été reporté au lieu de 2017 à horizon 2020 ? Qu’en sera-t-il si l’Algérie est admise à l’organisation mondiale du commerce (OMC) où d’ailleurs son adhésion n’est pas pour demain du fait que le monopole, des prix ne répondant pas aux normes du marché (dualité des prix) et la sphère informelle sont dominants, les réformes structurelles étant bloquées ? L’Algérie souffre toujours du monopole, source inefficience, à tous les niveaux, et connait un dépérissement du tissu productif dont l’industrie représente à peine 5% du produit intérieur brut. Le modèle mis en place depuis l’indépendance politique, le modèle ayant misé sur els infrastructures moyen uniquement de développent entre 2000/2013, semblable à celui de 1980/1988, trouve ses limites. Il est assis essentiellement sur la bureaucratie et le secteur d’Etat qu’il s’agit ici de ne pas de diaboliser mais le rendre plus performant dans un cadre concurrentiel, car ayant à sa direction souvent de brillants managers, mais soumis aux directives bureaucratiques. Cette politique a marginalisé le secteur privé productif et favorisé les rentes spéculatives. Actuellement, depuis surtout le printemps arabe, le gouvernement algérien verse des salaires sans contreparties productives pour calmer le front social, n’existant pas de politique salariale claire mais des distributions de rente. Mais cela ne peut pas durer quitte à aller vers un suicide collectif ou une implosion différée. Comme j’ai à le souligner récemment dans une interview à Radio France internationale RFI et Radio Algérie Internationale ( RAI) (avril 2013), il faut bien considérer que l’économie algérienne est une économie léthargique et rentière. Que se passera-t-il lorsque la rente diminuera, ou s’éteindra quasiment, au rythme de la baisse prévisible des devises issues des hydrocarbures, du fait de leur épuisement et de leur remplacement progressif par d’autres sources d’énergie ? Les équilibres macro financiers actuels sont éphémères sans de profondes réformes institutionnelles et microéconomiques. L’objectif est la mise en place d’un Etat de Droit passant par l’indépendance de la justice et d’institutions démocratiques, tenant compte de notre anthropologie culturelle. J’ai eu souvent à le souligner en direction des pouvoirs publics algériens, il s‘agit d’éviter de dépenser sans compter. En termes de rentabilité financière et tenant compte des exportations et de la forte consommation intérieure, des coûts croissants, que dans 15 ans pour le pétrole et 25 ans pour le gaz conventionnel donc horizon entre 2025-2030, avec 50 millions d’habitants, l’Algérie sera sans hydrocarbures conventionnels devant éviter l’euphorie du gaz/pétrole non conventionnel. Le développement durable tenant compte du défi écologique, en ce XXIe siècle, se fonde essentiellement sur la bonne gouvernance et la valorisation du savoir si l’on veut dynamiser les sections hors rente dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux. Y a-t-il une prise de conscience des défis nombreux qui attendent l’Algérie ? Le Premier Ministre Abdelmalek Sellal, suivi récemment du gouverneur de la banque d’Algérie, ont tiré la sonnette d’alarme au vu de l’accroissement des importations au premier semestre 2013 allant, si cette tendance continuait vers 60 milliards de dollars de biens auquel il faut ajouter 12 milliards de dollars de services et les profits légaux que peuvent transférer les compagnies étrangères dépassant ainsi les recettes de Sonatrach. A-t-on tiré les leçons de la chute des hydrocarbures de 1986 avec les incidences désastreuses pour le pays, économiques, sociales et politiques? Quelle conclusion pour l’avenir de l’Algérie en cette fin d ‘année 2013 et pour 2014? Si les résultats sont loin, très loin des potentialités que recèlent le pays du fait d’une gouvernance mitigée, et elles sont nombreuses, je suis pourtant confiant. L’Algérie recèle d’importantes potentialités, surtout les compétences humaines richesse bien plus importante que toutes les réserves d’hydrocarbures, actuellement marginalisées, tant au niveau local qu’à l’étranger, pour surmonter la situation actuelle. Pour cela, outre une profonde moralité des personnes chargés de diriger la Cité, l’on doit revoir la gouvernance et donc l’actuelle politique socio-économique qui ne peut que conduire à l’impasse et donc à l’implosion sociale à terme. la lutte contre la corruption, les transferts illicites de capitaux, qui existent depuis l’indépendance politique, mais qui a pris des proportions alarmantes entre 2004/2013 du fait que l’on a injecté des sommes colossales sans prévoir de mécanismes de contrôle devient une urgence de l’heure, devant prévoir des mécanismes démocratiques et éviter des règlements de comptes inutiles. L’on ne saurait ignorer les effets de la mondialisation à la fois positifs mais pervers sans régulation, devant insérer les projets futurs dans le cadre de l’intégration du Maghreb pont entre l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, pour la stabilité et une prospérité partagée de la région. Avec de nombreux experts algériens résidents et non résidents, depuis 2007 nous demandons un large débat national, au sein d’une structure indépendante non instrumentalisée, ouvert aux forces politiques, sociales et économiques afin de tracer une trajectoire de passage d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre des nouvelles mutations mondiales se basant sur des entreprises compétitives qu’elles soient locales ou étrangères apportant une valeur ajoutée technologique et managériale au pays. L’Algérie est à la croisée des chemins. Il faut éviter toute autosatisfaction, contraire au vécu quotidien de l’immense majorité des Algériens, source de névrose collective, mais également éviter toute sinistrose : tout ce qui a été réalisé entre 1963-2013 n’est pas totalement négatif mais il reste beaucoup d’insuffisances qu’il s’agit impérativement de corriger. Le défi des nations en ce XXIe siècle, monde en perpétuel mouvement est la maîtrise du temps, tout pays qui n’avance pas recule forcément. Il y a maintenant unanimité. Si l’Algérie rate le cap du développement entre 2014/2020, elle sera éternellement un pays sous-développé avec d’importants remous sociaux et politiques avec des interférences étrangères. C’est sa dernière chance. Aussi, le changement grâce à un dialogue fécond et productif, personne n’ayant le monopole du nationalisme, s’impose pour des raisons de sécurité nationale.

Dr Abderrahmane Mebtoul, Professeur des Universités, Expert International