Boire de l’urine, manger la viande de chien, se fier à des «talebs» Les cancéreux proie des charlatans

Boire de l’urine, manger la viande de chien, se fier à des «talebs» Les cancéreux proie des charlatans

Boire l’urine de chamelle, et celles des enfants en bas âge, de préférence non circoncis, manger des viandes impropres à la consommation, telle que la viande de chien, jusqu’au recouvrement de leur santé ou des jus, soit disant, naturels d’origine douteuse. Quelle place, les Algériens accordent-ils à ce genre de cures ?

Les Algériens recourent de plus en plus à des pratiques douteuses pour guérir de certaines affections. Les méthodes dangereuses sont à leur point culminant, dans la société algérienne, autant dire que la santé publique se retrouve dans une situation d’immenses inquiétudes.

La réalité est que les gens ne font presque plus la différence entre une maladie organique et une maladie spirituelle ou psychique. Toutes dans le même sac. Beaucoup de personnes n’ayant pu être guéries par la médecine moderne et parfois avant même d’essayer celleci, estimant que la cause est d’origine spirituelle, se tournent vers d’autres méthodes.

Pour traiter différents types de cancer, maladies pulmonaires, maladies de la peau et d’autres maux spirituels, les malades cherchent guérison ailleurs que dans les hôpitaux. Boire l’urine de chamelle, et celles des enfants en bas âge de préférence non circoncis, manger des viandes impropres à la consommation, telle que la viande de chien, jusqu’au recouvrement de leur santé ou des jus, soit disant, naturels d’origine douteuse.

Quelle place les Algériens accordent-ils à ce genre de cures ? Il est vrai que, parfois, les malades sont découragés par les mauvaises prestations assurées dans les hôpitaux, mais malheureusement nombreux sont ceux qui y croient.

On peut même citer, si besoin est, une des histoires vécues. Malika est une jeune femme de 35 ans, atteinte d’un cancer de sein, à défaut d’un traitement médical approprié, Malika a fait le choix de se goinfrer de n’importe quoi, de jour comme de nuit, depuis qu’elle ait découvert sa maladie, il y a juste une année. Elle se rend dans une localité lointaine à Sidi Aissa, à M’sila, pour boire le premier lait de chamelle qui vient de mettre bat et surtout boire les urines de son petit.

Certes le lait de chamelle est bénéfique, qu’en est-il des urines ? Peut-on guérir d’un cancer quelconque avec ce rituel ? il faut arrêter d’être naïf. Une autre femme, plus jeune encore, avant d’être terrassée par une leucémie, a longtemps fréquenté les pratiquants de la hidjama. La dame chez laquelle, elle suivait des séances, lui disait que chaque goûte de sang évacuée est une toxine de moins dans son corps.

C’est ainsi qu’elle passe prématurément en se vidant de son sang dans un cabinet non-médical sur les hauteurs de Notre Dame d’Afrique, à Bab El Oued. C’était compréhensible que nos aïeux recouraient par exemple à la sablothéarapie pour soulager les maux dorsaux, qu’ils utilisent la médecine traditionnelle pour combattre les différentes épreuves que la vie rude de l’époque leur imposait.

Mais ce qui est inadmissible, c’est que la jeunesse croit dur comme fer, que ces pratiques guérissent bien une telle pathologie chronique. Les pratiques sont multiples et multiformes. Il existe aussi des guérisseurs qui vous font croire que des « Sourates » diluées dans de l’eau puis injectées directement dans les veines, peuvent guérir par exemple une dépression qu’ils diagnostiquent comme étant des états de possession par des démons.

Et si le patient supporte peu l’injection intraveineuse, on lui fait carrément ingurgiter le « liquide béni », ignorant les résultats nocifs des particules que contient l’encre utilisée. En outre, l’eau utilisée est loin d’être stérile, Dieu seul sait dans quelles conditions d’hygiène, ont été préparées ces perfusions, de vrais foyers à microbes, le moins que l’on puisse dire.

Le comble c’est que toutes les tranches de la so-ciété, se livrent à ces pratiques, estimant que la médecine moderne n’est pas efficace ou est inappropriée tout simplement. Il faut reconnaître aussi que la mauvaise prise en charge des malades particulièrement ceux souffrant de maladies chroniques, a eu raison de la force d’esprit de l’Algérien. Le désarroi et la naïvité qui les poussent à se tourner vers d’autres voies.

CHARLATANISME OU MÉDECINE ALTERNATIVE ?

Il y a aussi, ce qu’on appelle la médecine parallèle ou la médecine douce. Les « cabinets » non-médicaux généralement officieux, ne désemplissent pas ! Il faut se lever très tôt pour prendre rendez-vous ! Herboristes confirmés, talebs ayant des pouvoirs de guérison, Raqis ou charlatans opportunistes ? « miracles » ou simple utilisation de la médecine alternative ?

Des millions de personnes à travers le monde, croient aux secrets des plantes médicinales et à leurs vertus thérapeutiques, les Algériens ne sont pas en reste d’ailleurs. Ils sont convaincus que l’eucalyptus, verveine, costus, thé, menthe, sauge, ail, caroubier, céleri, cerfeuil, cyprès, chèvrefeuille, citron, etc.… ont des propriétés bienfaisantes que l’on connaît, mais malheureusement, d’autres moins connus sont prescrits par les guérisseurs, qui eux-mêmes très souvent ignorent totalement leurs effets.

Cependant, si les vertus thérapeutiques de certaines plantes sont reconnues, il n’en demeure pas moins que d’autres pourraient avoir des conséquences désastreuses sur le corps humain. Pour les herboristes que l’on retrouve en bon nombre, partout sur tout le territoire algérien, généralement exposant leurs « médicaments » à même le sol, viennent souvent des régions du Sud algérien et même des pays africains, limitrophes.

Pour ces derniers, tout y passe, cela va du simple eczéma à l’allergie alimentaire, asthme, rhumatismes, douleurs gastriques, hernies, anorexie… Des préparations soidisant magiques qu’ils cèdent à des prix défiant toute concurrence, dont ils garantissent les résultats. A propos de l’anorexie justement, pas loin que le mois dernier, un lot de médicaments douteux saisi par les douanes algériennes, prescrits aux personnes désirant prendre du poids, notamment les jeunes filles qui s’apprêtent à se marier.

Ces produits « sont très dangereux pour la santé du citoyen », … Malgré que l’origine, la qualité et les effets secondaires de ces produits, soient remis en cause, nombreux sont ceux qui en achètent quand même, croyant fermement à des résultats probants.

Mais, les utilisateurs de ces produits ignorent souvent, qu’ils s’exposent à des risques pouvant aller d’une simple allergie alimentaire à une intoxication sévère, voire à des complications plus graves susceptibles de mettre leur vie en péril.

Ce sont ces quêtes hasardeuses qui ont conduit des jeunes filles à l’hôpital à Tamenrasset. Ainsi, la situation devient une source d’enrichissement pour toutes ces personnes sans aucun scrupule, qui se font des fortunes aux dépens des malades souffrants.

Ce qu’il faut faire aujourd’hui, c’est d’éradiquer ces pratiques de la société, en s’appuyant sur la loi, sachant que le législateur a consacré un texte dans ce sens. Ces gens sont passibles d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans, selon l’article 372 du Code pénal.

Certes la situation n’est pas favorable eu égard à l’insoutenable fragilité du système de santé publique. Et là encore on ne voit que la face apparente de l’iceberg. Il faut, malheureusement, se mettre dans la peau d’un malade, pour avoir une idée sur le désespoir qui gagne l’esprit des pauvres malheureux. Faisons contre mauvaise fortune bon coeur, faisons en sorte d’accepter une partie de ces croyances tant que c’est doux sinon bon pour le moral du patient.

R. A.