“Il faut que les cercles de décision économique ne soient pas occultes et qu’ils n’agissent plus selon le fait du prince”, souligne-t-il.
L’expert financier Ferhat Aït Ali s’est longuement étalé sur la problématique des investissements en Algérie. Des investissements sur lesquels le gouvernement avait fait des promesses fortes en inscrivant le droit d’entreprendre au crayon feutre dans la loi fondamentale du pays.
Estimant que leur concrétisation laisse à désirer, Ferhat Aït Ali s’est dit, hier, scandalisé par la manière par laquelle est traité l’acte d’investir dans le pays. “C’est du jamais vu, même dans les sociétés dirigistes et autoritaires ! L’acte d’investir dépend, soit du bon gré de l’administration, soit de cercles occultes qui ont la mainmise sur la décision économique”, tempête-t-il. “C’est aussi du jamais vu qu’une administration économique refuse d’appliquer la décision de la justice en faveur d’un investisseur”, regrette l’invité du Forum de Liberté, faisant allusion aux déboires que l’on fait subir au groupe Cevital.
“Il faut que les cercles de décision économique ne soient pas occultes et qu’ils n’agissent plus selon le fait du prince. Nous ne pouvons pas décider unilatéralement et de manière discrétionnaire sur qui doit faire quoi, comment, quand et où”, souligne-t-il, allusion faite aux blocages érigés sur le chemin des investisseurs. “Je ne vois pas d’ailleurs l’utilité du Conseil national de l’investissement, encore moins certains des critères imposés aux investisseurs dont cette récente notion de secteur en saturation qui n’est autre qu’un acte de dissuasion”, estime l’analyste financier qui croit dur comme fer que l’une des portes de sortie de crise réside dans la facilitation de l’acte d’entreprendre, pourtant garanti et renforcé par les dernières réformes apportées à la Constitution du pays. “Une société qui pense pouvoir faire l’impasse sur le droit n’a aucune chance de construire une économie”, estime Ferhat Aït Ali.
À l’aune des modifications apportées à la loi fondamentale du pays, élevant officiellement et opportunément l’acte et le droit d’investir et d’entreprendre au rang d’une priorité aux fins de construire une économie dépendante des hydrocarbures, ce plaidoyer n’est visiblement suivi d’aucune velléité de bien faire. Sur le chemin de l’investisseur, qui s’apparente à un vrai parcours du combattant, se dressent plusieurs écueils, dont “une administration bureaucratique et dirigiste”, un secteur informel qui n’est autre qu’une “mutation génétique du régime dit formel”, et une “emprise bureaucratique sur les moyens de financement de l’investissement”. Deux regrets pour Ferhat Aït Ali : l’un sur la manière par laquelle sont traités les investisseurs, aussi bien au niveau des administrations que par ces cercles occultes qui ont la mainmise sur la décision économique, et l’autre sur l’absence de toute réforme en mesure d’inverser la tendance et redonner à l’acte d’entreprendre ses lettres de noblesse. D’autant plus que sur ce point, le gouvernement, tout en vantant son intention de rendre l’acte d’investir plus simple et plus accessible, ne s’attaque pas aux problèmes bureaucratiques et extra-administratifs qui pénalisent l’entrepreneuriat et qui réduisent les promesses de l’Exécutif à leur plus simple expression.
Clairement, on ne peut pas prétendre quêter une sortie de crise en mettant aux investisseurs des bâtons dans les roues. Il y a absence de cap qui fausse toutes ces intentions de bien faire, estime Ferhat Aït Ali. Pour lui, ce que propose le gouvernement c’est tout, sauf un modèle économique. Encore moins une stratégie.
Ali Titouche