Bilan an II de Bouteflika,Entre la colère des jeunes et les milliards de la corruption

Bilan an II de Bouteflika,Entre la colère des jeunes et les milliards de la corruption

Répartition de la rente

Avec l’anniversaire des deux premières années du troisième mandat du président Bouteflika, il est opportun sans doute de dresser un bilan sans complaisance et en toute objectivité des réalisations entamées jusqu’ici.

Il serait honnête, à notre sens, de reconnaître que l’Algérie enregistre des avancées dans au moins trois domaines : l’accès à l’eau et au gaz, le logement et les infrastructures.

Grâce à de lourds investissements, au prix parfois de gaspillage de l’argent public, la grande majorité de la population bénéficie au moins d’un approvisionnement en eau quotidien. La gazéification de l’Algérie n’a jamais été aussi poussée. On a construit en une décennie autant de logements que durant les précédentes décades. Bémol, la qualité des constructions n’est souvent pas au rendez-vous. Pis, le système de distribution, encore opaque, complique l’accès d’une bonne partie de la population au logement. Du coup, cette situation entretient un profond malaise social. Elle est à la source de multiples émeutes.

Le réseau d’infrastructures s’est également étoffé. Mais de grandes réalisations enregistrent d’importants retards : en particulier métro, tramway, tronçons centre et est de l’autoroute Est-Ouest. De surcroît, nombre de marchés ont été octroyés de manière irrégulière à coups de bakchich avec comme mode d’emploi d’énormes surfacturations.

Au cours des trois mandats du chef de l’État, la corruption s’est généralisée. Ce qui fait dire au président de la commission consultative nationale des droits de l’Homme : “La corruption a redoublé de férocité en Algérie.”

En ce sens, des économistes, des experts pointent du doigt la mauvaise gouvernance du pays à l’origine de la crise actuelle. Un mouvement continu de protestations de différentes corporations jamais inégalé depuis les années 1990 renvoie à un malaise généralisé, entretenu par des décisions contestées, faute d’un véritable dialogue. Le discours présidentiel du 15 avril dernier, même s’il balise les réformes politiques à venir, en vue d’apaiser la colère de la rue, n’a pas répondu aux attentes. Tout se passe comme si nos gouvernants veulent opérer des changements par petites couches. Même tendance : on croit solutionner les problèmes par de nouveaux textes. Or, le propre de la situation actuelle de l’Algérie est l’application problématique des dispositifs institutionnels, y compris d’un texte fondamental comme la Constitution.

Par ailleurs, la place de l’entreprise dans ce discours montre que la perception de son rôle moteur dans l’économie par nos gouvernants n’a pas progressé de manière très significative. Une attitude paradoxale au regard de son importance dans la résolution de la crise de l’emploi, particulièrement dans son volet chômage des jeunes, dans l’essor de l’économie nationale, voire même de sa contribution capitale, potentielle aux tensions économiques et sociales.

En conclusion, faut-il s’attendre à ce que le système politique actuel consente à opérer rapidement son changement vers davantage de respect de l’État de droit, des principes démocratiques, des libertés d’expression et d’entreprendre ? Rien n’est sûr tant que préside la logique de répartition de la rente au profit de certaines sphères dirigeantes.