«L’Algérie peine à imposer ses choix sur le plan diplomatique.»
Le président de Talaiou El Hourriyet, Ali Benflis, qui s’est abstenu jusqu’ici de commenter la publication de la photo du président de la République, affaibli et diminué, par Manuel Valls, est sorti hier de sa réserve car «offrant au régime paniqué une occasion inattendue pour persister dans sa fuite en avant pour camoufler la dégradation de la crise profonde qui le secoue».
Pour l’ex-chef du gouvernement, qui s’exprimait lors de sa conférence de presse au lendemain de la clôture des travaux de la seconde session ordinaire de son comité central, le tweet du Premier ministre français qui a déclenché la tempête en Algérie au sein des segments périphériques du pouvoir, a été en fait «une opportunité inespérée saisie par le régime pour faire diversion et détourner les regards sur des questions aussi vitales et essentielles et distraire ainsi les Algériens par un fait fomenté sciemment sans aucun lien avec les enjeux réels et les dangers qui guettent le pays». Le problème de l’ Algérie réside-t-il dans l’impasse politique, la faillite économique ou dans la photo? s’est-il interrogé. «L’honneur et la dignité de l’ Algérie ne peuvent être réduits à une simple photo.
Aussi choquante que soit cette dernière, elle ne pourra pas porter atteinte à la souveraineté à et l’indépendance de l’Algérie car l’honneur et la dignité de notre peuple sont plus grands que ça», a-t-il soutenu. «J’ai dénoncé la vacance du pouvoir le 18 juillet 2014,bien avant l’apparition de cette photo», a-t-il rappelé. «Notre pays est dans la phase la plus critique de son histoire contemporaine avec l’impasse politique qui perdure, la crise économique que rien ne vient endiguer avec une stratégie nationale globale, cohérente et acceptable et avec une instabilité sociale qui se profile à l’horizon», a-t-il réitéré. En réponse aux accusations de trahison proférées par les représentants du pouvoir, il a estimé que «contrairement à l’opposition qui veut rassembler les Algérien en vue de proposer une réelle sortie de crise et appuyer nos forces armées, tout en les éloignant de la sphère politique, le régime qui persiste à imposer le statu quo constitue un facteur aggravant de la crise». «Une opposition qui propose un dialogue national rassembleur et une perspective démocratique inéluctable comme voie de sortie de la crise de régime», a-t-il ajouté.
«Cette instance a réaffirmé la validité et la pertinence toujours actuelles de la plateforme de Mazafran qui reste le cadre approprié pour un changement démocratique ordonné, graduel et apaisé», a-t-il dit. «La vacance du pouvoir qui perdure, l’illégitimité et la non- représentativité de toutes les institutions de la base au sommet, le délitement institutionnel et administratif, une révision constitutionnelle non consensuelle, l’apparition des acteurs extraconstitutionnels qui ont pu orienter le traitement de cette crise dans un sens favorable à leurs intérêts, constituent des manifestations et des facteurs aggravants de cette crise».
Concernant les révélations de Panama papers, qui ont mis au jour un vaste scandale d’évasion fiscale, il a fait remarquer que «l’Algérie n’est pas seulement gangrénée par les scandales de corruption, mais elle fait face désormais au phénomène extrêmement plus grave de la grande criminalité financière qui est un produit systémique». «La nature de nos systèmes politique et économique favorise la corruption et encourage la grande criminalité financière», a-t-il déploré.
Interrogé sur les positions des monarchies du Golfe, favorables à la thèse marocaine et le dossier Libyen, il a indiqué que «la fragilité du front intérieur et la vacance du pouvoir ont impacté négativement la diplomatie algérienne». «Le recul diplomatique de l’ Algérie est du à son absence sur la scène internationale et la vacance du pouvoir au niveau de la première institution du pays, qu’on ne pourra pas tenir en secret à ce niveau», a-t-il indiqué. A propos du retour de Chakib Khelil, il a souligné que «du point de vue institutionnel, le régime politique a porté un coup fatal à la justice algérienne qu’il considère comme un appendice à son service exclusif et instrumentalisée à sa guise et suivant ses calculs et intérêts étroits». Evoquant le lancement par le gouvernement de l’emprunt obligataire, il indique que «cette décision est sans prise sur les véritables enjeux de la crise économique actuelle». «On est passé d’une amnistie fiscale pénalisée à une amnistie fiscale rémunérée», ironise-t-il, en mettant en exergue l’échec flagrant de l’opération de la conformité fiscale de l’argent de l’informel.
«L’autre facteur aggravant réside dans l’absence d’une stratégie de riposte à cette crise économique, près de deux années après sa survenance et rien n’est fait contre les véritables sources de l’hémorragie comme les marchés de gré à gré par lesquels les clientèles du régime continuent à amasser des fortunes, les projets réévalués, les fraudes au commerce extérieur, la fuite des capitaux qui se poursuit…».