La tentative de Ben Ali de revenir au pouvoir après un éventuel retour au calme ayant échoué, avec l’annonce officielle de sa mise à l’écart définitive, hier, laisse la porte ouverte à un changement radical du régime tunisien.
Les choses sont désormais plus claires maintenant avec l’éviction définitive de Zine El Abidine Ben Ali, lequel avait essayé jusqu’à l’ultime seconde de tromper les Tunisiens en cédant le pouvoir provisoirement à son Premier ministre. Ainsi, le président du Parlement tunisien, Foued Mebazaâ, a été proclamé, hier, président par intérim par le Conseil constitutionnel écartant ainsi la possibilité d’un retour à la tête de l’État de Zine El Abidine Ben Ali qui a fui en Arabie Saoudite.
Après 23 ans de règne sans partage, le président Zine El Abidine Ben Ali a fui, vendredi, son pays devenant ainsi le premier dirigeant d’un pays arabe à quitter le pouvoir sous la pression de la rue. Le Conseil constitutionnel a proclamé coup sur coup “la vacance définitive du pouvoir” à la tête de l’État et la nomination de Foued Mebazaâ, président du Parlement, au poste de président de la République par intérim, selon un communiqué rendu public par l’agence officielle TAP. Ce retournement soudain de situation s’est appuyé sur l’article 57 de la Constitution et est intervenu à la demande de Mohammed Ghannouchi, Premier ministre sortant qui avait été nommé vendredi président par intérim après la fuite de Zine El Abidine Ben Ali.
Pour rappel, la désignation de Ghannouchi en vertu de l’article 56 laissait la porte ouverte à un retour au pouvoir de Zine El Abidine Ben Ali et avait été contestée à la fois par des juristes, par une partie de l’opposition et par la rue. Sur le terrain, Tunis, qui s’est réveillée, hier, sous tension et dans l’incertitude, après une nuit de pillages et le départ soudain en Arabie Saoudite du président Zine El Abidine Ben Ali, chassé du pouvoir sous la pression de la rue après un mois d’émeutes réprimées dans le sang, voit désormais plus clair.
La police a commencé à boucler le cœur de la capitale afin d’empêcher tout rassemblement, l’état d’urgence ayant été décrété la veille. Des barrières métalliques ont été dressées, barrant les rues débouchant sur l’avenue Bourguiba, la principale artère du centre de Tunis. Plusieurs quartiers de la banlieue ont vécu une nuit d’angoisse en raison de destructions et de pillages menés par des bandes de personnes cagoulées, selon les témoignages d’habitants apeurés, relayés par les télévisions locales. L’hypermarché Géant, à la sortie nord de Tunis, a été pillé, hier matin, après avoir été attaqué vendredi, selon un photographe de l’AFP.
Des dizaines de personnes sortaient du centre commercial emportant tout ce qui leur est tombé sous la main, en l’absence de tout représentant des forces de l’ordre, a indiqué la même source. Deux autres magasins Carrefour, à la Marsa au nord de Tunis et au quartier Ghazala, ont été pillés vendredi après-midi, selon de nombreux témoins.
Trois autres magasins, Monoprix et Magasin Général, ont été pillés dans d’autres quartiers de Tunis, vendredi, ont rapporté des habitants. Des appels ont été lancés à l’armée, qui protège dans le cadre de l’état d’urgence des bâtiments publics, pour qu’elle intervienne contre ces bandes. L’armée a fait survoler la ville par des hélicoptères alors que les spéculations allaient bon train sur l’identité des responsables de ces pillages.
Certains habitants ont parlé de miliciens liés aux proches du président en fuite, d’autres ont évoqué des prisonniers de droit commun évadés de centres de détention, certains accusant des éléments de la police. Par ailleurs, tous les aéroports tunisiens sont rouverts au trafic aérien, a annoncé samedi l’Office de l’aviation civile, dans un communiqué, au lendemain de l’annonce de la fermeture de l’espace aérien. “L’espace aérien tunisien ainsi que les aéroports nationaux sont ouverts à la circulation aérienne”, a indiqué cet organisme dans un communiqué repris par l’agence officielle TAP.