«H’zem el Ghoula», une pièce retentissante mise en scène en 1989 par Abdelmalek Bouguermouh, quelque mois avant sa disparition, s’est encore bonifié dans sa nouvelle version, signée Mouhoub Latreche, qui en a fait un vaudeville savamment épicé et comique jusqu’aux larmes. Adaptée de «La quadrature du cercle», de l’écrivain et dramaturge Russe Valentin Kataïev, la représentation, dont la générale a été donnée vendredi soir au Théâtre Régional de Bejaia, a enthousiasmé et conquis le public. Il en a aimé le texte et sa poésie, l’énergie et la truculence des comédiens et s’est délecté de leur juste distribution et leurs réparties à tordre de rire, puisées directement, mais subtilement, de l’humour et du persiflage populaire. L’úuvre, dépeignant à l’origine les conséquences de l’exode rural en Union Soviétique d’après-guerre, a été entièrement nationalisée et livrée dans un habit taillé typiquement aux couleurs locales. Bien sur, le travail a été fait par Bouguermouh à l’origine, mais Mouhoub Latreche, qui, après sin-n-ni, est à son deuxième essai de mise en scène, l’a magnifié d’abord en actualisant le contexte, en introduisant des éléments en relation avec le terrorisme islamiste, ensuite en enrobant le texte d’un matériau comique, aussi corrosifs que cinglants. Si bien que l’histoire, brutale et un tantinet dramatique, dans sa lecture au premier degré, prend l’allure, d’un formidable moment de rire communicatif de surcroît. La chronique aborde, en fait, la question de la crise du logement et ses conséquences. Elle s’appesantit sur ses nuisances sur les rapports de couples qui, souvent, au bout d’une longue attente à habiter seuls, en viennent à se désintégrer parfois dans des conditions stupéfiantes. Le cas croqué en l’espèce dans la pièce est édifiant. Deux amis étudiants partagent une sombre pièce dans un immeuble aussi ténébreux, sans confort, mais qui leur évite des locations ruineuses. Seulement, chacun de son côté, ils se marient en cachette, en espérant, que l’un ou l’autre supposé rester célibataire finisse par décamper ou faire de la place. Malheureusement, ils se marient le même jour. Et la chambre, déjà habituellement étroite pour deux se retrouvent en surpopulation, avec quatre pensionnaires à bord, ouvrant la porte à des discordes inouïes, d’autant que leur intimité n’est protégée par aucune intimité, sinon une illusoire cloison, représenté par les limites d’un tapis de prière apposé au milieu de la pièce.
Aussi malgré un effort d’adaptation, les deux couples se bouffent mutuellement le nez avant que le virus de la crise ne les atteigne de plein fouet dans leur propre intimité. Les deux amis, chacun de son côté se rend compte soudainement, que la femme qu’il a épousé n’est pas celle à laquelle il rêvait. Et de fil en aiguille, tous deux, découvrent des qualités à l’épouse adverse et finissent par succomber aux charmes croisés des deux femmes.
C’en était fini de leur amitié et de leur couple respectif, au demeurant, forgés par de simples arguments d’union, voué dès le départ à l’échec.