Devant les dizaines de salles de fêtes que compte la ville, les signes festifs sont omniprésents.
La saison d’été n’est pas seulement synonyme de villégiature. C’est aussi une période indiquée pour la célébration de nombreuses fêtes familiales, dont celle des mariages qui marque le pas sur les autres.
Depuis le deuxième jour de l’Aïd, on compte des centaines de célébrations de fêtes de mariage à travers tout le territoire de la wilaya de Béjaïa. A Béjaïa, la saison des mariages bat son plein. Réduite d’un mois, la saison estivale a renoué avec les fêtes. Il ne se passe un jour sans qu’un cortège nuptial, des sons de musique émanant des salles de fêtes ne vous rappellent qu’on célèbre une union. Un rituel quotidien qui ne peut échapper à personne. Un tour dans la capitale des Hammadites nous l’a confirmé.
Devant les dizaines de salles de fêtes que compte la ville, les signes festifs sont omniprésents. Voitures décorées, des enfants, femmes et hommes en tenues de fête et surtout le fameux D.J. qui résonne dans tout le quartier allant jusqu’à dominer le vacarme induit par la dense circulation automobile. Si les lieux et les personnes changent, la pratique de la célébration des mariages reste la même, avons-nous constaté. Pour commencer les préparatifs, il faut d’abord prendre soin de réserver l’endroit idéal de la cérémonie, en l’occurrence une salle des fêtes. Et ça! Il faut le faire le plus tôt possible, parfois des mois à l’avance.
Il est bien derrière nous le temps où la maison parentale était suffisante. Modernité oblige, la salle des fêtes s’impose. Elle s’impose aussi de par les commodités qu’elle offre. Outre l’aspect festif des cérémonies de mariage et la joie des nouveaux mariés et leurs familles qui remontent à la nuit des temps, ces dernières années, plusieurs métiers se sont greffés à ces événements. Les salles des fêtes, les tailleurs, les traiteurs et autres, sont très sollicités. De nos jours, le mariage est un véritable investissement, qui dans certains cas bat tous les records. «J’ai consacré 300.000 DA et cela m’a à peine suffi. Tout cet argent pour une seule nuit sachant que j’ai offert le strict minimum à mes invités. Mais franchement, je ne regrette rien. On ne peut vivre cela qu’une seule fois dans la vie», affirme ce père qui a marié sa fille, mardi dernier.
Ces dernières années, un retour en force du nombre d’unions conjugales, et les personnes qui convolent en justes noces ne lésinent pas sur les moyens pour sacraliser ces moments à jamais, quitte à obérer leurs budgets. L’organisation des mariages coûte de plus en plus cher, et pour cela, un panel de dépenses est au menu: parure en or, habillement, dot, esthétique, animation, repas, boissons et tutti quanti.
Ces préparatifs sont le fruit d’un sacré magot amassé au fil des ans, et quel que soit le budget alloué à cette fête, il est souvent dépassé en raison d’une panoplie de dépenses, sans compter d’autres vétilles. Ce rituel est devenu un caprice chez les Kabyles. Chacun tente de justifier les dépenses exorbitantes consacrées aux fêtes de mariage.
Sur le terrain on le constate à travers, les norias de cortèges, qui sillonnent les artères du matin au soir, soutenus par des concerts tonitruants de klaxons et un relent de youyous. Ainsi, tout est pêle-mêle dans ce type de cortège où le Code de la route est bafoué.
Le danger guette en permanence les automobilistes et les usagers. Des jeunes n’hésitent pas à sortir de moitié de la fenêtre de la voiture en se tenant juste par une main à la portière, rien que pour exhiber une joie démesurée au péril de leur vie.
Malheureusement, ces cortèges nuptiaux sont souvent le théâtre de carambolages d’où en résultent des morts et des blessés. Cette pratique ne faisait pas partie des cérémonies de mariage traditionnel de plus en plus abandonné. Il en est de même pour d’autres considérations. Eh oui! À chaque époque ses avantages et inconvénients.
Aujourd´hui, le mariage est fêté même s´il coïncide avec un décès chez le voisin. D’autres valeurs ont disparu, la robe kabyle est remplacée par la robe de soirée. Les chants des vieilles femmes pendant le cérémonial du henné n’existe plus, à leur place un disc-jockey. La semoule, le café, le sucre, les oeufs, l’huile qui étaient à la fois des cadeaux mais aussi des aides, sont remplacés par les services à café et autres gadgets insignifiants, qui ne sont d’aucune utilité pour le marié ou la mariée.
Bref, la célébration des mariages est devenue de nos jours beaucoup plus un sacrifice et un casse-tête chinois qu’une véritable fête de joie, d’entraide et de réconciliation. Si beaucoup de personnes regrettent cette évolution, il reste que rien n’est fait, ne serait-ce que pour la freiner.