Quand l’hiver arrive et que le mercure chute brutalement, lorsque apparaissent les premiers flocons de neige, l’extrême rigueur de l’hiver se rappelle sans ménagement au bon souvenir des habitants de Meloudja et d’Ouhbanet.
Ici, le climat est particulièrement rude, illustré par l’apparition de «pics» de glace formés par le gel en contrebas des toits en tuile des maisons. La capacité de l’homme à dominer son environnement devient très limitée. En ce vendredi hivernal, il fait moins 4° Celsius à Batna-ville.
Sur le chemin menant vers le cœur des Aurès, un froid très vif enveloppe toute la région.Les efforts des services des travaux publics s’accentuent sur la RN31reliant Batna à Biskra, en passant par Arris et Ichemoul. Déneigement et salage des voies s’intensifient pour permettre à la circulation routière de reprendre. La route conduisant à la commune d’Ichemoul, est couverte de verglas. Salah Soualhi, transporteur privé, rencontré sur le chemin de wilaya n°172, essayant de se ménager un accès pour livrer une commande de sable à un client de la région, avoue qu’il éprouve de grosses difficultés même s’il est habitué à ces lieux.
A quelques mètres de là, un homme tente, en vain, de faire sortir son tracteur enfoncé dans la neige. Il faut que Salah et quelques rares passants conjuguent leurs efforts pour dégager l’engin pour permettre à son conducteur de reprendre sa route vers Ichemoul. A 5 km d’Ichemoul, apparaît la dechra d’Ouhbanet, à 1 500 m d’altitude. La petite localité donne l’impression d’être une sorte de «village fantôme», car beaucoup de ses habitants ont déserté les lieux, préférant l’hospitalité de proches résidant dans des zones plus clémentes. Mokhtar 72 ans, et son frère cadet Mohamed, 61 ans, préfèrent continuer à défier Dame Nature car trop attachés à leur patelin. Ici, la télévision est la seule «fenêtre» vers le monde extérieur. L’accumulation de neige dans cette bourgade déjà difficile d’accès, coupe souvent, et pendant des jours, les habitants du monde extérieur. En hiver, les malades à Ouhbanet doivent prendre leur mal en patience et prier pour qu’une journée clémente permette à la seule piste servant de route carrossable, de les conduire vers une structure de santé. En cas d’urgence, les habitants s’entraident pour transférer, à pied, le patient jusqu’à la polyclinique de la région, à plusieurs kilomètres de là. Ici, quand le froid devient âpre et mord cruellement le visage et les mains, «même les chevaux et les ânes ne peuvent plus bouger», affirme Mohamed, le frère de Mokhtar.
Dans les bourgs d’Ichemoul, l’hiver se prépare. Des bûches de bois sont stockées dans des endroits secs bien avant que le temps ne se gâte. Les réserves de denrées alimentaires nécessaires pour vivre durant la période de l’hiver, appelées localement «el aoula» font aussi partie des habitudes des familles d’Ouhbanet et de Meloudja. Au début de chaque automne, les femmes ommencent à préparer «el aoula» pour l’hiver : semoule, miel, huile et diverses victuailles sont emmagasinés en prévision des longs mois d’hiver.
Le seul moyen de locomotion utilisé pour parcourir la piste qui mène vers Ouhbanet et Meloudja est un véhicule tout-terrain, vieux de 31 ans, appartenant à la commune d’Ichemoul et servant d’ambulance pour acheminer malades et femmes sur le point d’accoucher vers des hôpitaux ou des structures de santé.
R. L. / APS