Batimetal a promis de réaliser 332 marchés couverts, 77 milliards de dinars et puis rien…

Batimetal a promis de réaliser 332 marchés couverts, 77 milliards de dinars et puis rien…

Des chantiers qui ne verront jamais le jour…

Les promesses n’engagent que ceux qui les croient, mais dans l’affaire c’est la crédibilité du gouvernement qui en prend un autre coup sérieux.

C’était en 2013. La main sur le coeur, le Premier ministre, Abdeklmalek Sellal, auréolé d’un appui institutionnel sans failles, annonçait à partir de Annaba, un projet d’une grande portée sociale et économique. Il s’agissait de la construction par l’Etat de quelque 332 marchés couverts.

Pour concrétiser ce projet stratégique pour le gouvernement, l’entreprise publique Batimetal, une filiale de la SGP Construmet, spécialisée dans la charpente métallique s’est portée garante de la réalisation du programme et dans les délais.

Le marché n’était pas mince. Une enveloppe financière de 77 milliards de dinars a été dégagée par l’Etat qui jouait sa crédibilité face à une jeunesse désabusée et prête à en découdre, surtout quand il s’agissait de lui couper le cordon du marché informel.

Le gros de cette enveloppe a été réservé notamment pour la capitale, avec 520 millions de dinars. Le groupe Batimetal devait donc réaliser au niveau national, 330 marchés couverts, 3000 box de commerce, 2500 unités commerciales mobiles (tables de marché) avant la fin juillet 2013, c’est-à-dire avant le mois de Ramadhan. Le gouvernement a pris l’engagement devant les jeunes et a surtout décidé de tourner définitivement la page de l’informel qui grève l’économie du pays.

Le Ramadhan 2013 passé, celui de 2014 aussi, on est à quelques jours du Ramadhan 2015 et le projet est resté un voeu pieux. Quels en sont les responsables? Ont-ils été inquiétés, interrogés ou sommés de s’expliquer ou de rendre des comptes? Faut-il parler de dilapidation de deniers publics, de manquement à un engagement pris pour le compte de l’Etat? Pourquoi l’entreprise Batimetal chargée de cette mission par l’Etat ne s’est-elle pas expliquée sur ces retards? Si ces questionnements restent sans réponses et méritent qu’on leur consacre une étude à la fois économique et politique, il est néanmoins possible d’émettre les plus invraisemblables suppositions. La première d’entre elles est la collusion des groupes d’intérêts avec les seigneurs de l’informel. Selon plusieurs chercheurs et économistes algériens, le marché de l’informel vaut une bagatelle de 35 milliards de dollars, soit 18% du PIB, qui circulent en cash dans le pays.

Est-il alors possible de construire un tissu économique sain face à de puissants lobbys qui agissent en toute impunité? On n’a pas entendu parler de sanctions au niveau de Batimetal. Si les responsables de cette entreprise ne se sont jamais exprimés pour dénoncer une quelconque restriction ou un quelconque blocage de leur projet, cela signifie qu’ils ont eu toutes les facilités et les moyens requis pour mener à bien cette tâche. Or, la réalité est que l’informel fleurit et s’épanouit dans notre pays.

Cette énième promesse non tenue, discréditera davantage un gouvernement qui s’est montré de plus en plus laxiste envers l’informel pour acheter la paix sociale. Ceci est d’autant plus grave que ce marché est dominé par la mouvance islamiste. Cela d’une part, de l’autre il faut reconnaître qu’au-delà du fait qu’il permet à beaucoup de s’enrichir anormalement, permet aussi de fournir un emploi à des bataillons de jeunes.

Ces questionnements demeurent sans réponses… On dit que le pain tombe toujours du côté beurré. Cette «évaporation» de l’argent public intervient dans un grave contexte de crise marqué par un affaissement des recettes pétrolières.

L’Etat et le gouvernement cherchent le moindre moyen pour économiser quelques dollars de plus. «Avec un baril à 60 dollars, nous disposerons de 38 milliards de dollars de réserves de changes en 2019, et avec un baril à 50 dollars nous n’aurons que neuf milliards de dollars», a indiqué le Premier ministre il y a quelques jours.

En d’autres termes, nous sommes plus dans la réflexion ou l’élaboration des stratégies, mais en plein dans les années de restriction budgétaire.