Le chef d’État syrien, souriant, ne bénéficiant même pas de mesures de protections exceptionnelles, a reçu un journaliste du Figaro à qui il a balancé quelques vérités bien senties, au moment où le «va-t-en-guerre» Hollande a été forcé de reculer d’un pas, après qu’il eut été lâché par son compère américain.
Les choses se précisent et se précipitent en Syrie. Les paris restent tout aussi ouverts qu’incertains en ce qui concerne les menaces de frappes «punitives» souhaitées par les Américains et les Français, et soutenues en cela par une Ligue arabe plus humiliée et humiliante que jamais.
Le clou de la journée d’hier, si l’on met de côté le rapport «déclassifié » des services secrets français, dans lequel les supputations le disputent aux spéculations, sans que l’on ne tombe jamais sur de l’info fondée et fiable, réside très certainement dans l’entretien que Bachar Al-Assad a accordé au journal français, Le Figaro.
Celui-ci, dans un édito pathétique, se pose la moralisante question de savoir s’il fallait ouvrir ses colonnes à un «boucher» comme le président syrien. L’essentiel étant le bénef et la course après le scoop, la réponse, quoique enrobées de mille et une précautions sémantiques, est évidemment oui.

Ce que le Figaro ne dit pas, par contre, c’est que Al-Assad, sans être un enfant de choeur pour autant, est quand même moins dangereux et moins criminel qu’Obama, que Hollande, que Mohamed VI, que les dirigeants saoudiens et qataris, qui financent directement le terrorisme, et que le général putschiste, Abdelfettah Al-Sissi… Assad, donc, a donné rendez-vous au journaliste français dans un pavillon situé au milieu d’une pinède.
Aucune mesure de sécurité spéciale n’a été déployée. Et c’est le président syrien en personne qui vient aux devants de son vis-à-vis.
Cerise sur le gâteau, ce qu’il dit est particulièrement intéressant. Par delà le fait que l’on essaie d’interpréter et de faire dire au chef d’État syrien ce qu’il n’a jamais dit, force est de relever que des messages très forts ont ainsi été lancés.
Pour Al-Assad, donc, «le Moyen-Orient est un baril de poudre, et le feu s’en approche aujourd’hui. Il ne faut pas seulement parler de la riposte syrienne, mais bien de ce qui pourrait se produire après la première frappe.
Or personne ne peut savoir ce qui se passera.Tout le monde perdra le contrôle de la situation lorsque le baril de poudre explosera. Le chaos et l’extrémisme se répandront. Le risque d’une guerre régionale existe.»
En effet, les choses échapperaient à tout contrôle, de manière beaucoup plus grave qu’en Irak. Un effet boule de neige précipiterait les troubles sur toutes les régions proches et moyennes orientales avant de s’étendre jusqu’à l’Afrique du Nord, les pays du Maghreb ainsi que la bande sahélo-saharienne.
TIRS DE MISSILES SIONISTES EN MÉDITERRANÉE
Et, contrairement à ce qu’a prétendu le lendemain la presse hexagonale, al-Assad n’a jamais soutenu que la France était devenue un ennemi de la Syrie : « quiconque contribue au renforcement financier et militaire des terroristes est l’ennemi du peuple syrien.
Quiconque oeuvre contre les intérêts de la Syrie et de ses citoyens est un ennemi. Le peuple français n’est pas notre ennemi, mais la politique de son État est hostile au peuple syrien. Dans la mesure où la politique de l’État français est hostile au peuple syrien, cet État sera son ennemi.
Cette hostilité prendra fin lorsque l’État français changera de politique. Il y aura des répercussions, négatives bien entendu, sur les intérêts de la France.» Bref, nous en sommes revenus à la guerre des mots alors que des frappes contre la Syrie étaient devenues tout aussi inéluctables qu’imminentes.
Après les postures va-ten- guerre, les ardeurs des Occidentaux se sont refroidies ces derniers jours quant à une intervention militaire en Syrie: Barack Obama a demandé le feu vert du Congrès américain, et le gouvernement français, qui organise mercredi un débat à l’Assemblée, a affirmé que Paris n’interviendrait pas seul si le président américain n’obtenait pas cette autorisation.
Barack Obama a compris que Vladimir Poutine n’acceptera pas une modification du rapport de force en Syrie, qui est en faveur d’Assad. Et, à vouloir l’y contraindre, au moment où Moscou monte en puissance à l’international, il y a un risque d’escalade. En demandant l’accord du Congrès, qui ne se réunira que le 9 septembre, il peut engager des discussions avec son homologue russe pour trouver un compromis lors du G20 de Saint-Pétersbourg.
Ce n’est pas tout. Il ne fait pas de doute non plus qu’Obama instrumentalise la crise syrienne pour marquer des points en politique intérieure. «Avec ce vote du Congrès, il tente d’embarquer les Républicains.
C’est bien vu, car si le Congrès s’oppose à l’intervention, Obama avancera que les républicains l’empêchent d’intervenir, et s’il a le feu vert, ils ne pourront pas critiquer sa politique étrangère par la suite.
De son côté, l’entité sioniste donne l’air de vouloir forcer la main à ses alliés occidentaux en tentant de précipiter les choses. En effet, le ministère israélien de la Défense a annoncé hier avoir mené « avec succès » dans la matinée un tir de missile dans le cadre d’un exercice militaire israélo-américain.
« Le ministère de la Défense et l’agence la MDA (Missile Defence Agency) américaine ont lancé mardi matin à 9 h 15 un missile radar de type Ankor », a déclaré le ministère dans un communiqué. « Il s’agit du premier tir d’essai de cette version du missile, qui a été conduit (…) audessus de la Méditerranée.Tous les éléments du système ont fonctionné conformément à la configuration opérationnelle », précise le communiqué.
Le ministère russe de la Défense avait indiqué plus tôt avoir détecté le lancement de deux missiles balistiques « de la partie centrale de la Méditerranée vers la côte est », sans préciser si la Syrie était visée. Les agences de presse russes avaient ensuite précisé que les missiles étaient tombés en mer.
Kamel Zaïdi et Agences