Depuis plusieurs années déjà, le patron de Nedjma-Ooredoo , Joseph Ged, qui était ce mardi l’invité de la radio web Maghreb Emergent, tente avec persévérance d’imposer la voix de son entreprise comme celle d’un leader potentiel du secteur des télécoms en Algérie.
Favorisée par l’effacement forcé du numéro un Djezzy, en butte à un interminable conflit avec le gouvernement algérien, cette stratégie passe aujourd’hui par un discours mobilisateur et offensif, dont le PDG de la nouvelle enseigne Ooredoo a donné quelques nouveaux exemples. Face au peu d’enthousiasme manifesté par les autorités au lancement de la 3G, Joseph Ged veut jouer le rôle de catalyseur : «Nous allons tous être surpris par le développement de la 3G. le marché est très demandeur. Tout le monde n’y croit pas, comme cela avait déjà été le cas pour le multimédia mobile, mais il y a un énorme appétit des algériens», a-t-il déclaré à l’émission hebdomadaire «L’invité du direct » de Radio M. Dans la foulée, il annonce « entre 1 et 2 millions d’abonnés dès les premiers jours du lancement de la 3G».
Une position à contre-courant de celle de l’ARPT
En bon leader du multimédia mobile, Joseph Ged se veut aussi responsable et consensuel : « nous ne faisons pas de calculs à intérêts économiques stricts, notre stratégie est une stratégie de long terme ». La preuve ? Sur la question de la double numérotation, l’intérêt financier à court terme, et à courte vue, des opérateurs serait celui d’une double puce et donc d’une double facturation. Le PDG d’Ooredoo a, au contraire, pris le parti très offensif et critique vis-à-vis de l’ARPT, d’être en première ligne pour défendre l’option d’un « seul numéro, une seule puce et un seul abonnement » pour le consommateur. Pas de coût supplémentaires ni de tracasseries additionnelles pour le consommateur. Devant l’intransigeance du régulateur, il continue de négocier pied à pied : «On respectera les décisions de l’ARPT. D’accord pour le choix temporaire de la double numérotation mais avec une seule puce et une seule facturation». Sinon on court le risque d’imposer un frein puissant au décollage de la 3G et de voir « des millions d’abonnés affluer vers les guichets des opérateurs pour signer de nouveaux contrats ».
Les chiffres du dynamisme d’un futur numéro un
Derrière la posture consensuelle de Joseph Ged, se dessinent les ambitions à peine voilées d’un candidat au rang de numéro un du secteur. Le groupe a fait ce qu’il faut pour ça. Il est le premier investisseur étranger en Algérie depuis déjà plusieurs années. Plus de 2 milliards de dollars investis depuis la création de l’entreprise en 2004, dont 1 milliard de dollars rien qu’au cours des 3 dernières années. Les résultats n’ont pas tardé à suivre. La croissance du chiffre d’affaire au cours des dernières années a été foudroyante : « la plus importante du marché algérien et même de toute la région MENA ». L’équilibre financier a été atteint dès 2008 et l’entreprise fait des bénéfices depuis 2010. L’année 2013 s’annonce comme une sorte d’apothéose, le couronnement de 10 années d’efforts. « Sur les 9 premier mois de l’année, on est déjà à 17% de croissance, 9,4 millions d’abonnés, près 800 millions de dollars de chiffres d’affaire et 140 millions de dollars de bénéfices », a-t-il révélé. A fin 2013, Ooredoo peut cibler le cap symbolique des 10 millions d’abonnés et le milliard de dollars de chiffre d’affaire. Sans parler d’un bénéfice en hausse exponentielle de 250%. Un chapitre sensible sur lequel Joseph GED est très à l’aise. Et pour cause, jusqu’ici les bénéfices de l’entreprise ont toujours été réinvestis et en dépit de l’importance de l’effort financier réalisé par les actionnaires, aucun rapatriement de bénéfices n’a été encore effectué vers la maison mère.
Un coup d’avance sur les concurrents
Au moment de prendre le tournant de la 3G, le groupe Oordoo Nedjma sait qu’il a un coup d’avance sur les concurrents. Et il compte bien l’utiliser comme un tremplin pour réaliser ses ambitions. Joseph Ged ne s’en cache pas. Pour lui : « la 3Gest une opportunité pour devenir numéro un en Algérie». Le passage à la 3G, Nedjma en défend l’idée « depuis 2006-2007, parce que après le GSM, la 3G puis plus tard, la 4G, sont une suite logique ». Le groupe s’est bien préparé techniquement : «60 à 70% de nos équipements ont été renouvelés ». Mais aussi commercialement. Son « positionnement data » depuis 2004, lui permet de disposer d’un réservoir de 3 millions d’abonnés pour la 2G-EDGE, « ce qui est un record mondial pour un opérateur ». D’où sa position de pointe pour dénoncer tout nouveau frein au moment du lancement de l’opération et réclamer que le secteur marche au rythme de l’opérateur le plus performant en évitant un « nivellement par le bas ».
Encourager le contenu made in Algeria
Un coup d’avance aussi sur la construction d’un écosystème autour de l’internet mobile à haut débit. Pour développer le marché du «contenu made in Algeria», Ooredoo a signé un partenariat avec l’Agence nationale de développement des PME pour mettre des fonds et demain le marché de ses 10 millions d’abonnés à la disposition des meilleurs start-up algériennes, dont une dizaine seront sélectionnées chaque année pour être soutenues. Un coup d’avance enfin sur les projets d’entrée en Bourse « Notre souhait et notre volonté, c’est avant tout de faire participer nos clients et le public algérien en général à notre succès et nous voulons ensuite dynamiser le marché financier en Algérie, » assure Joseph Ged. Le PDG de Ooredoo a ajouté que cette ouverture se fera à hauteur de 10 à 15 pour cent du capital de l’entreprise, « en fonction de la liquidité du marché ». Il annonce des rencontres en janvier 2014 avec la nouvelle équipe dirigeante de la Cosob, pour «passer à la phase concrète».