La compagnie pétrolière nationale fait face à de nouvelles contraintes liées aux bouleversements sur la scène énergétique mondiale ainsi qu’à une forte concurrence de grands pays gaziers
Lors de l’assemblée de ses actionnaires, tenue le 28 juin 2012, Sonatrach a approuvé un programme additionnel d’investissement sur le moyen terme qui passe ainsi de 68,2 à près de 80 milliards de dollars. Cette décision est intervenue dans la perspective de développer davantage les activités de la compagnie. Sa priorité absolue est d’insuffler un fort développement de ses efforts d’exploration pour augmenter ses réserves. Le plan de développement à moyen terme jusqu’à 2016 prévoit globalement l’exploration en moyenne de 28 000 km2 par an ainsi que le forage de 160 puits.
L’activité concernera principalement les régions peu explorées du Sud-Ouest et l’offshore où l’entreprise se lancera en partenariat en utilisant les nouvelles technologies. Sonatrach mettra aussi l’accent sur l’amélioration du taux de récupération de ses grands gisements. Durant cette période, il est aussi programmé un fort développement des capacités de transport par canalisations.
Ainsi sont prévus l’achèvement et la mise en service en 2013 du gazoduc GR4 Rhourde Nouss-Hassi R’mel et l’expansion de l’oléoduc GPL LR1 Hassi Messaoud-Hassi R’mel. Seront aussi entamés les travaux du gazoduc Reggane-Hassi R’mel qui permettra d’acheminer d’importantes quantités de gaz à partir des nouveaux gisements du Sud-Ouest. L’entreprise consacrera durant ce plan à moyen terme plus de 14 milliards de dollars d’investissements dans le raffinage.
Ainsi, les capacités des installations existantes actuellement de 27 millions de tonnes seront portées à 30 millions avec la réhabilitation des raffineries en service qui verront ainsi leur exploitation pérennisée pour une trentaine d’années. Quatre nouvelles raffineries d’une capacité de 5 millions de tonnes chacune seront réalisées sur le territoire national, pour couvrir les besoins du marché national en accroissement continu et d’augmenter les capacités d’exportation. Par ailleurs, l’Algérie compte se lancer dans l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, notamment les gaz de schiste.
D’ailleurs, les nouveaux amendements de la loi sur les hydrocarbures ont consacré cette option.
Vers la chute de la position de l’Algérie dans le GNL
Selon de nombreux spécialistes du secteur, l’Algérie reste attractive en matière d’investissement énergétique que ce soit dans le domaine de l’approvisionnement en énergie, du fait de sa proximité avec l’Europe et de ses gazoducs transméditerranéens, ou dans celui de la production et la distribution internes qui représentent beaucoup d’opportunités pour les investisseurs sur un marché en pleine croissance. Cependant, l’Algérie devra faire face à une industrie énergétique mondiale qui connaît un certain nombre de transformations fondamentales.
En effet, la consommation dans ces pays est en train de baisser essentiellement à cause des effets de la dette souveraine ainsi que pour des raisons de substitution par les énergies renouvelables et par l’efficacité énergétique, autrement dit ces pays sont en train de créer la même richesse tout en consommant moins de pétrole.
La très légère augmentation de la consommation à l’échelle mondiale est le fait de la consommation des pays asiatiques (3 à 4% d’augmentation chaque année), notamment la Chine, l’Inde et d’autres pays de la région. Il est donc clair que la demande pétrolière à l’échelle mondiale ne va pas augmenter outre mesure. Pour ce qui est du gaz, les USA qui ont trouvé tellement de shale gas, envisagent de l’exporter sous forme de gaz liquéfié ou GNL. Dans l’ordre d’importance des exportateurs de GNL, il y a le Qatar, suivi par la Malaisie, l’Australie, le Nigeria, l’Indonésie… L’Algérie n’arriverait qu’à la sixième place. Alors qu’elle était il y a quelques années 3e exportateur mondial de GNL.
Il y a quelques années, une bonne partie du GNL produit dans ces pays, notamment au Qatar, était vendue aux USA. C’était avant la révolution du shale gas.
Depuis, les Etats-Unis ont installé une vingtaine de projets de liquéfaction destinés à l’exportation. En fait, il se dit qu’à l’horizon 2020-2025, les USA exporteraient 60 à 70 millions de tonnes de GNL, soit le double de nos exportations. Cette quantité considérable de gaz déversée sur les marchés européen et surtout asiatique va naturellement avoir un effet dépressif sur le prix du gaz. Il s’agit là d’un autre bouleversement important.
En somme, les États-Unis misent sur une indépendance énergétique, retrouvée pour relancer leur processus industriel et leur compétitivité. L’Asie poursuit son développement à marche forcée. La question qui se pose est de savoir si l’Algérie arrive, dans une telle perspective, à placer les quantités de gaz de schiste qu’elle compte produire ? Et comment vont évoluer les cours du gaz ? Actuellement, le marché du gaz est en train de se détériorer, les prix ayant fortement baissé et les fameux contrats à long terme posent problème pour de nombreux pays gaziers, l’Algérie comprise.
S. S.