Au moment où l’Algérie négocie son adhésion à l’OMC, le gouvernement exprime sa volonté de rogner sur le budget de fonctionnement de l’Etat

Au moment où l’Algérie négocie son adhésion à l’OMC, le gouvernement exprime sa volonté de rogner sur le budget de fonctionnement de l’Etat
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Une chute substantielle du prix du baril de pétrole – certains experts, comme ceux d’Alphavalue, situent les nouveaux cours de l’or noir à environ 50 dollars, soit la moitié de son prix actuel, – est fort probable d’ici à 2015.

Si elle était confirmée, dans les proportions prévues, ce serait une catastrophe pour l’Algérie qui se verrait, de nouveau, recourir à la dette pour assurer le fonctionnement de l’Etat, retombant ainsi dans les rets des institutions financières internationales et justifiant une politique budgétaire d’austérité draconienne dont les premières victimes seraient les classes défavorisées, les classes moyennes, l’investissement et les importations.

Cette situation que le gouvernement redoutait, du fait des risques de troubles sociaux et politiques qu’elle peut engendrer, vient rappeler à ceux qui détiennent le destin de l’Algérie entre leurs mains depuis des décennies la dépendance angoissante du pays aux seules ressources financières procurées par les hydrocarbures. 98% des recettes d’exportations proviennent de cette richesse soumise aux fluctuations du marché et plus de 70% des recettes du budget de l’Etat viennent de la fiscalité pétrolière.

Malgré cela, aucune politique sérieuse d’inversion de cette conjoncture néfaste n’a été, jusqu’à maintenant, entreprise pour diversifier les sources de revenus du pays et les sources d’énergie qui viendront, inévitablement, à manquer, le pétrole n’en ayant plus pour longtemps, au plus une trentaine d’années. L’Algérie passerait alors de pays exportateur d’énergie à pays importateur, comme l’Indonésie, dont la production pétrolière n’a cessé de décliner jusqu’à en devenir lui-même un pays consommateur, ayant, de ce fait, quitté, en 2008, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).

Ses dépenses d’importation de pétrole s’élèvent à environ 4 milliards de dollars, mais Djakarta a vite effectué un tournant décisif à son économie qui résiste à la crise beaucoup mieux que la plupart des pays asiatiques. L’avènement de la démocratie, à la suite du départ du pouvoir de son dictateur, Suharto, en 1998, a transformé ce pays de 230 millions d’habitants. Il est ainsi devenu, en moins de deux décennies, l’une des premières puissances économiques d’Asie et en voie de devenir l’une des toutes premières au monde, dans une dizaine d’années.

Notre pays tarde à entreprendre ce virage de l’après-pétrole, ce qui le rend très vulnérable à affronter le monde qui vient, dont les conditions seraient encore plus impitoyables que celles que nous vivons actuellement, au point de craindre que notre peuple serait contraint de vivre de charité publique internationale.

Pour l’instant, selon les prévisions du Fonds monétaire international, avec ses réserves de change, 200 milliards de dollars environ, l’Algérie peut encore importer des biens et des services pour, au plus, les quatre prochaines années. C’est dire que le temps presse d’envisager un desserrement de l’étau pétrolier et de sortir de la politique de la rente pour amoindrir la dépendance financière du pays aux exportations pétrolières.

La tendance étant, du reste, à la réduction de la consommation d’énergie fossile pour des raisons à la fois économique et écologique, mais la crise de 2008, toujours prégnante, a astreint les pays consommateurs de pétrole à réduire sensiblement leurs importations, notamment l’Europe, la Chine et les Etats-Unis pour des raisons de restrictions budgétaires, mais aussi de l’augmentation de plus d’un million de barils/jour de la production pétrolière, en particulier des pays non membres de l’Opep, comme les Etats-Unis, en plus de celle de l’Irak et de la Libye, et également de ce que l’on appelle « la révolution du gaz de schiste ».

Les coupes budgétaires que le gouvernement algérien envisage de faire, touchant les salaires et les transferts sociaux, pour tenter d’assouplir la pression des organisations financières internationales auraient, à n’en point douter, des conséquences graves sur l’économie algérienne, en premier l’emploi, si l’investissement extérieur ne venait pas compenser le manque.

La nouvelle politique économique que le gouvernement serait condamné à mener coïncide, curieusement, avec les négociations pour l’adhésion de l’Algérie à l’Organisation mondiale du commerce qui exige d’elle de déchirantes concessions.

Le directeur adjoint de l’OMC, Alejandro Jara, indiquait qu’il restait « beaucoup à faire autour des politiques monétaire et budgétaire, les tarifs, les obstacles techniques au commerce, la propriété d’Etat et la privatisation, le régime d’investissement, la politique d’établissement des prix, les restrictions quantitatives à l’importation et l’évaluation en douane, la politique de concurrence, parmi d’autres thèmes. »

Ou l’Algérie ouvre son marché, privatise les entreprises publiques, en particulier Sonatrach, et vende tous les biens appartenant à l’Etat ou, semblent dire les dirigeants de l’OMC, l’économie algérienne s’effondrerait.

Brahim Younessi