Au moins vingt-sept membres de l’armée et des forces de sécurité syriennes ont été tués, jeudi 15 décembre à l’aube, lors de combats avec des déserteurs dans la province de Deraa, dans le sud du pays, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).
Selon l’OSDH, basé en Grande-Bretagne, les combats ont eu lieu au cœur même de la ville de Deraa, berceau de la contestation contre le régime de Bachar Al-Assad, qui a commencé il y a tout juste neuf mois, ainsi qu’à des barrages routiers établis en périphérie.
Par ailleurs, l’organisation Human Rights Watch (HRW) a annoncé, jeudi, que des commandants ont ordonné d’ouvrir le feu aveuglément sur des manifestants sans arme, dans un rapport publié jeudi, réalisé à partir d’une soixantaine d’entretiens avec des soldats ayant fait défection.
« PAR TOUS LES MOYENS NÉCESSAIRES
Ces déserteurs ont cité le nom de soixante-quatorze officiers militaires et du renseignement « qui auraient ordonné, autorisé, ou toléré des opérations de grande ampleur de meurtres, de torture, et des arrestations illégales », a indiqué l’organisation de défense des droits de l’homme.
Les soldats ont eu pour ordre de mettre fin aux manifestations « par tous les moyens nécessaires », dont la force létale, a indiqué HRW. Environ la moitié des déserteurs interrogés ont indiqué avoir reçu des ordres directs pour tirer aussi bien sur les manifestants que sur les passants.
« Les déserteurs nous ont donné les noms, les rangs, les fonctions de ceux qui ont donné les ordres de tirer et de tuer », a indiqué Anna Neistat, directrice associée de HRW pour les urgences. L’un de ces déserteurs a indiqué qu’il avait été envoyé à Deraa (Sud) et que son commandant lui avait donné l’ordre de tirer sur des manifestants le 25 avril.
« Le commandant de notre régiment, le brigadier général Ramadan Ramadan disait ‘Ayez recours à des tirs nourris. Personne ne vous demandera d’explications’. Normalement nous devons économiser les balles, mais cette fois il a dit ‘utilisez autant de balles que vous voulez’ », a-t-il indiqué, selon le rapport.
« Et quand quelqu’un demandait ce que nous étions censés viser, il disait, ‘tout ce qui se trouve en face de vous’. Une quarantaine de manifestants avaient été tués ce jour-là », a raconté cet ancien militaire.
Le président Bachar Al-Assad accuse des rebelles armés d’être responsables du bain de sang, a indiqué HRW, ajoutant que l’organisation avait recensé des cas où des forces hostiles au régime avaient attaqué des soldats. Mais, selon HRW, la plupart des manifestations sur lesquelles l’organisation a pu avoir des informations étaient pacifiques, et pour elle, les commandants militaires syriens responsables d’abus contre des manifestants devront rendre des comptes.
HRW presse le Conseil de sécurité de l’ONU de saisir la Cour pénale internationale (CPI) de ces cas. La haute-commissaire aux droits humains de l’ONU, Navi Pillay, a donné mardi une estimation de plus de cinq mille personnes tuées depuis le début de la contestation en Syrie, le 15 mars. Elle a également pressé le Conseil de sécurité de saisir la CPI.
La Syrie n’étant pas un Etat partie au statut de Rome, qui régit la CPI, la Cour n’a pas compétence pour enquêter sur des allégations de crimes contre l’humanité commis dans ce pays, une saisine par le Conseil de sécurité de l’ONU étant pour cela nécessaire, avait indiqué en août le procureur.