Au lendemain de l’enterrement des deux innocents Brahim et Haroun, une grande marche blanche a été organisée par des habitants de la nouvelle ville Ali-Mendjeli, en signe de solidarité avec les familles des deux enfants lâchement assassinés.
Ce mouvement de protestation pacifique se veut un message de colère et de deuil. À El-Khroub, quelques centaines de personnes se sont, par ailleurs, rassemblées devant le tribunal de la commune et réclamaient qu’on applique la peine de mort contre les deux hommes qui ont enlevé Brahim et Haroun, pour que plus jamais des actes aussi barbares et cruels n’arriveront à des enfants. Les habitants de la nouvelle ville Ali-Mendjeli, parents, alliés et voisins des deux enfants Brahim, 9 ans, et Haroun, 10 ans, ont, dans des tracts qu’ils ont distribués à travers toute la wilaya, appelé, hier, à une grève nationale, demain (dimanche). Cette grève, placée sous le signe “journée pacifique sans revendication politique”, a pour seul but “l’application de la peine de mort contre les assassins des deux enfants”. Des femmes et des jeunes filles étaient de la partie. Ces dernières veulent, pour leur part, exprimer leur courroux face ce qui est en train de se passer. Elles sont venues clamer haut et fort que la situation est devenue extrêmement grave.
Appel à une grève nationale demain
“Contrairement aux rumeurs, aucune marche n’est programmée, ni aujourd’hui ni demain. Nous voulons juste que ce dimanche, les Algériens entendent notre message et pensent à nos enfants”, nous dira l’oncle de feu Brahim.
Par ailleurs, les habitants de ce quartier dont la plupart sont originaires de la cité El-Bir et les anciens chalets, connus sous le nom de Sotraco, ont tenu à préciser qu’ils ne sont pour rien dans les émeutes qui ont éclaté à travers toute la ville, mardi dernier, soit le jour de la découverte des deux corps. Au contraire, disent-ils, nous sommes contre ces agissements et ne voulons pas de soulèvement ou de révoltes. “Nous-mêmes étions agressés par des individus venant des autres quartiers. Des jeunes sont venus en masse pour régler leurs comptes avec la police, ils ont attaqué les commissariats et les magasins. Ils ont même barré la route à la police scientifique venue faire son travail. Certains ont même endommagé l’ambulance qui transportait les corps. Ces gens ne nous représentent pas”, disent-ils. Devant la maison du petit Brahim à l’unité de voisinage 18, des citoyens continuent d’affluer de partout, certains sont venus de Sétif, de Batna ou de Khenchela. Les voisins ont dressé des tentes pour contenir tout ce monde, les oncles et les voisins remplacent le père parti le matin au cimetière. Bien évidemment, les discussions tournent autour de ce drame, on se refait le film de cette tragédie, on commente le déroulement de l’opération et surtout l’arrestation des deux meurtriers. Des témoins de toute la scène sont au milieu de la foule et racontent les faits. Quelques minutes avant la prière du vendredi, le père de Brahim rentre et tout le monde court pour présenter les condoléances et réconforter cet homme. Devant notre présence et celle de caméras d’une équipe d’une chaîne de télé nationale, les habitants témoignent et se confient à nous, par respect aux familles des deux enfants, aucun dérapage verbal ni violence ne sont utilisés par ces anciens habitants de la cité Sotraco. Il faut dire que leur cité se trouve au fin fond de la nouvelle ville, et depuis qu’ils ont quitté leurs anciens taudis il y a plus d’un an, ils ont l’impression que les autorités les ont oubliés, l’insécurité est leur premier souci. Il y a quelques mois, nous fait savoir un habitant, les jeunes de la cité d’en face, anciens habitants de l’avenue de Roumanie, se sont accrochés violemment avec les jeunes du quartier à cause d’une banale histoire de terrain de foot. Aujourd’hui, les lacunes administratives font que cette ville de plus de 250 000 habitants ne possède que deux commissariats et les policiers ne viennent pas souvent patrouiller dans les lieux. “Lorsque nous sommes allés signaler la disparition de Haroun et Brahim, il n’y avait qu’une quinzaine de policiers dans le commissariat. Ce qui explique sans doute le déchaînement de la population contre les forces de l’ordre. Nous habitons le quartier depuis plus d’un an et nous sommes, comme vous le voyez, au milieu de nulle part. L’école primaire la plus proche se trouve à deux kilomètres et heureusement que le bus scolaire assure le transport des enfants. Nous avons exposé nos problèmes au wali qui nous a promis de trouver une solution. Mais rien n’a changé”, témoigne un habitant du quartier. Dès l’annonce de la disparition de Haroun et Brahim, le 9 mars, tous les habitants de l’UV 18, petits et grands, se sont mis à la recherche des deux garçons, aux côtés des policiers et des gendarmes. “Nous n’avons pas dormi les trois jours qui ont suivi la disparition, tout le monde a participé aux recherches, des gens sont venus de toute la ville pour nous aider”, témoigne un jeune du quartier. Aujourd’hui, l’atmosphère est tendue, la disparition tragique des deux enfants a marqué les esprits et relance surtout la question de l’insécurité à Ali-Mendjeli.