L’aboutissement de la campagne d’assainissement du fichier national des terres agricoles relevant du domaine privé de l’Etat dans le sillage de la mise en œuvre de la loi 10-03, promulguée en 2010, a permis au ministère de l’Agriculture et du développement rural d’identifier un excédent important en terres arables.
Ajoutée aux vastes surfaces proposées à la mise en valeur, les terres actuellement disponibles pour la création de nouvelles exploitations agricoles sont évaluées à des centaines de milliers d’hectares. Tel qu’il en ressort de l’inventaire général élaboré par l’ONTA (office national des terres agricoles), les wilayas du sud et des hauts plateaux renferment d’importantes disponibilités en terres agricoles.
Néanmoins, la mise en œuvre de mécanismes efficaces pour le suivi des opérations d’attribution de ces nouvelles terres est nécessaire afin de prévenir toute éventuelle déviation de ces terres de leur vocation principale.
En termes de disponibilités, pour ne citer que les principales wilayas, il est relevé que Ghardaïa focalise à présent un énorme intérêt pour l’activité agricole. L’ONTA y recense pas moins de 285 631 hectares répartis sur 111 périmètres prêts à être attribués pour la création de nouvelles exploitations agricoles. Néanmoins, la wilaya de la vallée de M’zab, Ghardaïa en l’occurrence, est la seule où l’opération d’attribution des nouvelles terres connaît une dynamique notable avec 24 240 hectares qui ont déjà fait l’objet d’une présélection pour attribution.

La wilaya de Biskra, elle aussi, renferme des disponibilités importantes en la matière avec pas moins de 153 nouveaux périmètres qui y sont identifiés pour une superficie totale de plus de 116 000 hectares, suivie de Tiaret avec 67 600 hectares répartis sur 13 périmètres. Viennent ensuite des wilayas où les disponibilités sont moins importantes comme El Oued (9 370 ha), Chlef (2 150 ha), El Tarf et Sétif avec respectivement 1 800 et 1 140 hectares. En revanche, les wilayas sises dans les régions à plus fortes potentialités agricoles n’enregistrent aucune disponibilité foncière pour la création de nouvelles exploitations. C’est le cas de la plaine de la Mitidja où les wilayas de Blida, Alger et Boumerdes affichent « zéro hectare » à attribuer. Aucune disponibilité foncière également à Annaba ou Bouira.
Selon les termes de la Circulaire interministérielle n°108 du 23 février 2011 relative à la création de nouvelles exploitations agricoles et d’élevages, ces disponibilités en terres arables sont attribuées selon un mode de présélection effectuée sur la base de dossiers de candidature au niveau des directions des services agricoles des différentes wilayas concernées. Néanmoins, les nouvelles affectations ont débouché sur des situations conflictuelles dans plusieurs wilayas, en raison du manque de transparence dans la sélection des nouveaux attributaires. Dans la wilaya de Biskra, il a été fait état de plusieurs zones où les nouveaux exploitants ayant bénéficié de ces terres se sont confrontés à l’opposition farouche de familles au niveau local revendiquant la propriété des terres attribuées. Dans la wilaya d’Oran, des terres occupées pendant des années par des exploitants agricoles locaux ont été classées comme étant des terres excédentaires et attribuées à de nouveaux exploitants, ce qui a suscité des dualités entre les anciens occupants et les nouveaux exploitants. Par ailleurs, les cas litigieux concernant l’opération de conversion du droit de jouissance perpétuelle à la concession de 40 ans sont encore nombreux avec des centaines de dossiers qui attendent encore leur règlement au niveau des tribunaux.
Afin d’éviter les situations de confusion ou le détournement des terres nouvellement attribuées de leur vocation agricole, le ministère de tutelle et l’ONTA doivent impérativement encadrer efficacement l’opération. A défaut, ce sont les erreurs et dépassements commis durant la révolution agraire ou la restitution des terres à leurs propriétaires initiaux en 1990, qui risquent de se reproduire.
Mourad Allal (L’Éco n°108 / du 16 au 31 mars 2015)