L’immeuble de l’ambassade de France Ă Tripoli en partie dĂ©truit par l’attentat de mardi
Depuis la chute du rĂ©gime de Mouamar El Gueddafi en octobre 2011, les islamistes libyens ont gagnĂ© en influence et ont hĂ©ritĂ© d’un important arsenal militaire du conflit libyen.
L’attentat perpĂ©trĂ© mardi contre l’ambassade de France Ă Tripoli illustre la fragilitĂ© de la situation en Libye et la montĂ©e en puissance des groupes radicaux et des milices armĂ©es aux idĂ©ologies et intĂ©rĂŞts variĂ©s, dans un contexte rĂ©gional marquĂ© par l’intervention française contre des islamistes au Mali. Depuis la chute du rĂ©gime de Mouamar El Gueddafi en octobre 2011, les islamistes libyens ont gagnĂ© en influence et ont hĂ©ritĂ© d’un important arsenal militaire du conflit libyen. Cette montĂ©e en puissance de groupes radicaux a Ă©tĂ© notamment illustrĂ©e par l’attaque meurtrière du 11 septembre 2012 contre le consulat amĂ©ricain Ă Benghazi (Est) qui a coĂ»tĂ© la vie Ă l’ambassadeur Chris Stevens et trois autres AmĂ©ricains, ainsi que par plusieurs attentats ayant visĂ© des intĂ©rĂŞts occidentaux. «Certains groupes de la rĂ©gion ont une forte motivation pour attaquer l’ambassade française Ă Tripoli, comme Al QaĂ®da au Maghreb islamique (Aqmi) et des groupes islamistes militants connexes tels que le Mouvement unitĂ© pour le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao)», a estimĂ© Anthony Skinner, directeur responsable de la rĂ©gion Moyen-Orient et Afrique du Nord Ă Maplecroft. VisĂ©s par l’intervention française, les groupes armĂ©s jihadistes -le Mujao et Aqmi- avaient alors menacĂ© en reprĂ©sailles de s’attaquer aux intĂ©rĂŞts français. L’attentat de mardi qui a fait deux blessĂ©s parmi les gendarmes français «pourrait ĂŞtre comme une riposte Ă l’offensive française au Mali», a indiquĂ© M.Skinner. «Il est remarquable, et peut-ĂŞtre pas une coĂŻncidence, que l’attaque est intervenue un jour après que le Parlement français ait votĂ© pour prolonger le dĂ©ploiement militaire de la France au Mali», note-t-il. Mais pour, Fradj Naji, analyste libyen et directeur du Centre africain des Ă©tudes, «il serait idiot de se focaliser sur la piste des groupes jihadistes comme Al QaĂ®da». M.Naji reconnaĂ®t qu’il y a une «sympathie» de certains groupes islamistes libyens envers les jihadistes du Nord du Mali. «En mĂŞme temps, il y a un sentiment de reconnaissance envers la France» qui a Ă©tĂ© le fer de lance des opĂ©rations militaires d’une Coalition internationale ayant fortement contribuĂ© Ă la chute du rĂ©gime El Gueddafi. Il n’a pas Ă©cartĂ© que des partisans de l’ancien rĂ©gime soient derrière l’attentat de mardi. «Comment expliquer que jusqu’ici, les attentats ont visĂ© uniquement les pays qui ont participĂ© Ă l’opĂ©ration militaire de la coalition internationale» contre le rĂ©gime de Mouamar El Gueddafi? Il a notĂ© par ailleurs que l’attaque contre l’ambassade n’a pas Ă©tĂ© revendiquĂ©e jusque-lĂ . «Ce genre d’attentats est souvent revendiquĂ© par des groupes extrĂ©mistes ou terroristes comme Al QaĂ®da», a-t-il indiquĂ©. Certains analystes soulignent toutefois que grâce Ă l’arsenal militaire de l’ancien rĂ©gime, certains groupes extrĂ©mistes qui se sont formĂ©s en Libye sont devenus plus importants que les autres groupes dans la rĂ©gion comme celui d’Aqmi par exemple, et agissent dĂ©sormais seuls. Une connexion libyenne avec les groupes radicaux en Afrique du Nord a Ă©tĂ© toutefois Ă©tablie après la prise d’otages meurtrière sur un site gazier du sud-est de l’AlgĂ©rie revendiquĂ©e par les «Signataires par le sang» de Mokhtar Belmokhtar, l’un des fondateurs d’Aqmi. Au niveau national, l’attentat contre l’ambassade de France est intervenu dans un contexte de tensions, après que les autoritĂ©s aient dĂ©clarĂ© la guerre aux milices d’ex-rebelles Ă Tripoli, agissant pour la plupart avec des motivations financières. EnivrĂ©es par le pouvoir des armes, ces milices formĂ©es par la plupart d’ex-rebelles ayant combattu le rĂ©gime El Gueddafi refusent de rendre les armes et n’hĂ©sitent pas Ă intimider les autoritĂ©s dès que leurs intĂ©rĂŞts sont menacĂ©s.