Attendus à Alger depuis hier pour débattre des affrontements du m’zab, Ghardaïa dépêche des délégués pour rencontrer sellal

Attendus à Alger depuis hier pour débattre des affrontements du m’zab, Ghardaïa dépêche des délégués pour rencontrer sellal

Les résolutions prises lundi lors du Conseil des ministres sur les violents affrontements intercommunautaires ayant ébranlé la ville de Ghardaïa ne mettront pas beaucoup de temps à être exécutées.

En effet, au lendemain de la tenue du Conseil des ministres sous l’égide du président Abdelaziz Bouteflika, qui a évoqué la nécessité de recourir à des mesures d’apaisement pour en finir avec la tension qui prévaut à Ghardaïa, de profondes concertations ont eu lieu entre les notables de cette ville et des représentants de ses différents quartiers.

Il est question d’un conclave tenu secrètement, au terme duquel il y a eu désignation d’une quinzaine de délégués représentant les sept communes de la daïra de Ghardaïa, en vue d’une rencontre avec les hautes autorités du pays.

Ces délégués devaient rejoindre Alger hier. Ils seront reçus en audience par le Premier ministre Abdelmalek Sellal, dans le cadre d’une séance de travail consacrée à l’examen de la situation qui prévaut à Ghardaïa, avons-nous appris de source fiable.

LG Algérie

Notre source, qui fait partie du cercle des autorités locales de Ghardaïa, doute que cette initiative garantisse un retour au calme de manière définitive à Ghardaïa.

La raison ? «Il n’est pas certain que les délégués partis sur Alger sont réellement représentatifs des différents quartiers ayant connu les affrontements. Où étaient-ils au moment où les services de sécurité, aidés par des jeunes de chacun des quartiers, s’employaient tant bien que mal à tempérer les ardeurs des esprits surexcités par l’émeute ?» répond notre source qui se dit convaincue que si la représentativité de ces délégués est contestée par la population, cela aura pour conséquence de «semer à nouveau la pagaille».

D’autant plus que le calme qui règne à Ghardaïa depuis le début de cette semaine demeure précaire. En ce sens, une autre source des services de sécurité affirme «qu’il suffit d’un rien pour que les affrontements reprennent de nouveau, d’où le maintien «jusqu’à nouvel ordre» du dispositif de sécurité composé de gendarmes et de policiers quadrillant toute la ville de Ghardaïa, et déployés notamment sur des terrasses des maisons cloisonnées des quartiers mitoyens où cohabitent les deux communautés mozabite et arabe tels que le vieux Ksar de Ghardaïa (mozabites) juxtaposé au douar Beni Merzoug (arabe), ou encore au niveau du lieudit Daya Ben Dawha ainsi que dans la localité de Guerrara.

Réquisitionnés sur instruction du wali pour le besoin du maintien de l’ordre à Ghardaïa et parer à toute éventuelle reprise des affrontements qui se sont estompés depuis lundi dernier, laissant place aux services de sécurité (police et gendarmerie) qui demeurent encore en état d’alerte.

Si la DGSN a dépêché une commission d’experts venus d’Alger, dont les membres se sont entretenus ce mardi avec les représentants des autorités locales au siège de la wilaya de Ghardaïa, la Gendarmerie nationale suit de près, quant à elle, l’évolution de la situation de cette ville.

En ce sens, la communication est presque ininterrompue entre le groupement de wilaya de Ghardaïa et le 4e groupe régional de la Gendarmerie basé à Ouargla qui, également, suit l’évolution de la situation.

Qu’attend Ghardaïa des pouvoirs publics ?

«Nous avons besoin prioritairement d’un nouveau plan d’urbanisme à mettre en application dans les meilleurs délais», nous répond Yahia Azaba, le P/ APC de Ghardaïa que nous avons rencontré ce mardi. Il poursuit en affirmant que la seconde préoccupation de l’heure a trait à l’emploi.

«Même s’il est indéniable que le secteur privé est très actif à Ghardaïa, la commune recense un nombre assez considérable de chômeurs. Si ses derniers sont insérés dans la vie professionnelle, cela va sans doute contribuer grandement à tourner la page des affrontements intercommunautaires», préconise le P/APC de Ghardaïa.

Ceci dit, il est aussi question de reloger dans l’urgence les familles dont les maisons ont été partiellement où complètement détruites durant les derniers affrontements. Au quartier Beni Merzoug appelé également Hay El Moudjahidine, «une quarantaine de familles sont désormais poussées au vagabondage», nous apprend Abderrahmane Miloud, l’un des habitants qui nous ont fait visiter quelques unes des demeures incendiées pour certaines, détruites pour d’autres, et qui témoignent dans leur ensemble de l’intensité des affrontements.

Selon le P/APC Yahia Azaba, il est fait été d’un premier recensement d’une centaine de maisons détruites et d’une vingtaine de locaux commerciaux incendiés et pillés.

«Une procédure d’indemnisation sera engagée dans les tout prochains jours en faveur notamment des familles contraintes à fuir leur domicile», a-t-il également fait savoir.

Les chômeurs s’invitent dans un climat de tension

Ghardaïa a eu son 31 décembre, non pas sur un air de fête, comme le reste des cités du monde accueillant la nouvelle année dans une ambiance joviale, mais plutôt dans une atmosphère emprunte de la colère de ses habitants, très contrariés de se voir sous les feux de la rampe, placés pour la énième fois au devant de l’actualité par l’incompréhensible logique des affrontements intercommunautaires. Ces derniers ont certes cessé même si quelques signes perceptibles font état d’un climat tendu.

Mais voilà que les chômeurs du Sud investissent le centre-ville de Ghardaïa à travers un sit-in organisé ce mardi matin devant le siège de la wilaya.

Lors de cette manifestation, initiée par la CNDCC (Coordination des droits des chômeurs), les principaux animateurs de cette structure, notamment son porte-parole, Tahar Belabes, ont revendiqué la libération d’une quarantaine de chômeurs interpellés à Ménéa qui devaient être jugés en appel au niveau de la cour de justice de Ghardaïa et répondre des chefs d’inculpation d’attroupement et de dégradations des biens d’autrui.

Les protestataires de la Cnddc ont aussi brandi, au moment de la manifestation, des banderoles où était mentionné leur désir de bénéficier d’un poste de travail au sein des installations énergétiques implantées dans le sud du pays, en particulier celles de Sonatrach.

Par ailleurs, à propos de la situation qui règne à Ghardaïa, soulignons que cette région, jadis réputée perle des Oasis, n’est plus le havre de paix réputé dans un passé pas si lointain.

Le mode de vie des habitants est souvent emprunt de manipulations éhontées qui viennent chambouler leurs traditions.

Ce fut le cas durant les derniers affrontements ayant provoqué des séquelles difficiles à surmonter de sitôt, sur lesquelles on reviendra avec davantage de détails dans notre prochaine édition.

Karim Aoudia