Atteintes aux libertés individuelles et publiques : La LADDH invite les magistrats à « sortir de leur silence »

Atteintes aux libertés individuelles et publiques : La LADDH invite les magistrats à « sortir de leur silence »

Les magistrats sont appelés à sortir du silence qu’ils observent sur les atteintes aux libertés, selon le vice-président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) Saïd Salhi, selon qui l’engagement des avocats sur ce terrain demeure « orphelin » de l’apport de celui des magistrats.

L’avocat Saïd Salhi interpelle ainsi les magistrats à « sortir du silence dans lequel ils se murent, notamment dans un contexte où la crédibilité et l’indépendance de l’appareil judiciaire sont remises en cause ». M. Salhi regrette, dans ce sens, que les avocats préservent leur mobilisation pour le changement, alors que leurs « confrères » ne semblent pas accuser le coup. La corporation des magistrats avait été parmi les premières catégories professionnelles à rejoindre le mouvement populaire enclenché le 22 février dernier. Elle s’est mise, dans le sillage, à réclamer haut et fort à travers une succession d’actions un Etat de droit, de justice, ainsi que l’indépendance de l’appareil judiciaire, et ce, en rompant avec les pratiques des injonctions et ordres qui entachent leur crédibilités. Pour M. Salhi, « les avocats sont restés sur leurs positions. Ils se sont mobilisés et se mobilisent constamment pour la défense des détenus d’opinions, notamment ceux arrêtés pour leurs implication dans le Hirak alors qu’un tel constat ne s’applique pas sur les magistrats et juges ». Le vice-président de la LADDH met les magistrats devant leurs responsabilités professionnelles. « Les magistrats doivent se prononcer. Je ne comprends pas pourquoi ils se sont subitement tus ? », s’interroge Me Salhi, qui explique que « l’appareil judiciaire donne l’impression de fonctionner au gré de la conjoncture ». Il s’interroge également sur les raisons et motivations qui font que les juges condamnent et ordonnent la détention préventive à l’encontre des jeunes manifestants porteurs du drapeau berbère, pour des chefs d’inculpations infondés et montés de toutes pièces. S’agissant des arrestations enregistrées jusque-là, Me Salhi fait état d’une hausse depuis la multiplication des interpellations contre les manifestants porteurs de l’emblème amazigh. « C’est le chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah, qui a recommandé aux forces de l’ordre l’application ferme et précise des lois en vigueur en se référant à l’article 06 de la Constitution, qui énonce la couleur de l’emblème national », tient à rappeler le même responsable.

Ce dernier fera cependant remarquer que « la même clause n’interdit pas l’exhibition d’une bannière culturelle ou identitaire ». En terme de chiffre, il affirme que le nombre de personnes interpellées et détenues a atteint les 70. « Nous avons pour l’instant recensé 70 cas d’arrestations en raison de leur engagement dans le Hirak, sachant que les avocats ne possèdent pas de liste définitive des détenus d’opinion. Je suis persuadé qu’il y a d’autres personnes arrêtées dans d’autres localités et que l’embastillement est sans écho», explique Me Salhi. « La plupart des arrestations signalées ont été opérées dans les wilayas d’Alger et Bouira. Le recensement de tous les détenus n’est pas aisé. Mais, on avance, en fonction des témoignages et informations qu’on recueille auprès des avocats et des familles des prévenus. On est déterminé à les identifier et les défendre bénévolement », poursuit l’avocat. Ce dernier reproche aux parquets leur « défaillance en termes de communication ».

« C’est l’omerta. Le Parquet ne communique pas sur les détenus d’opinion, notamment ceux du Hirak, sauf les charges pour lesquelles ils sont mis en prison ». Pour rappel, les porteurs du drapeau berbère sont poursuivis pour

« atteinte à l’unité nationale », prévue par l’article 79 du Code pénal. Le commandant de la Wilaya IV historique, Lakhdar Bouregaâ, ainsi que le général à la retraite Hocine Benhadid, sont arrêtés, quant à eux, pour « démoralisation des troupes de l’Armée ».