Atteinte aux libertés de culte et de conscience L’Etat devient-il inquisiteur ?

Atteinte aux libertés de culte et de conscience L’Etat devient-il inquisiteur ?

On aurait certainement aimé finir ce mois sacré du Ramadhan dans un esprit de mansuétude, dans un élan de générosité, et par-dessus tout, dans une ambiance festive.

Mais comme un atavisme qui se régénère, des forces du mal s’infiltrent subrepticement pour casser cette belle communion nationale. Cela devient récurrent. Inquiétant forcément, que des personnes qui pour une raison ou une autre «dé»jeûnent au lieu de jeûner soient prises dans une rafle de flics.

Ce qui s’est passé à Aïn El Hammam, à Ouzellaguen et à Tébessa donne assurément une piètre image de notre Etat, réduit à traquer les non-jeûneurs à défaut de chasser ces squatters de parkings sauvages qui règnent sur nos cités.

Ce forfait – parce que ç‘en est vraiment un – est religieusement illicite, juridiquement illégal et socialement immoral. Sur quel substrat légal ou religieux, les policiers se sont-ils basés pour ouvrir les hostilités contre des personnes qui ont osé se désaltérer ou s’alimenter durant les journées du Ramadhan ? Il n’y a évidemment aucune base et ces incursions constituent tout simplement un abus d’autorité, comme le souligne à juste titre Miloud Brahimi dans ses réponses à notre confrère Hacen Ouali.

Difficile, en effet, d’expliquer cette posture de flics qui se drapent du «qamis» et jouant les gardiens du temple de la morale. C’est encore plus grave que l’on fasse irruption dans les domiciles des personnes, histoire de les prendre en «flagrant délit» de non-observance du Ramadhan.

En termes juridiques, cela s’appelle une violation du domicile sanctionnée par la loi algérienne. Aussi, ces policiers, à qui, on s’en doute, on a mis la puce à l’oreille, n’ont strictement aucun droit de punir un non- jeûneur.

L’Islam qui est une religion de tolérance, abstraction faite des comportements odieux de certains zélés, professe avec force «qu’en religion, il n’y a point de contrainte» (La Ikraha Fi Eddine). Un fidèle ou un infidèle n’a de compte à rendre qu’à Dieu et non à un flic ou un autre bras armé de l’Etat à qui l’on demande de jouer au redresseur des torts. A tort…

A l’arrivée, ces dérives dans l’expression de l’autorité publique reçoivent logiquement l’estampille de l’intolérance et de l’inquisition. Et cela fait très mauvaise publicité pour un pays qui prétend jouer dans la cour des grands pays en matière de respect des droits de l’homme, notamment la liberté d’expression et de conscience.

L’Algérie, qui collectionne déjà les mauvaises notes de toutes les institutions internationales de veille, n’a sans doute pas besoin de cet autre coup de force – et coup de filet – à Aïn El Hammam, Ouzellaguen et Tébessa.

Il s’en trouvera bien sûr un haut responsable pour évoquer et invoquer des actes «isolés». Mais le caractère itératif de ce genre de manifestations d’intolérance traduit une tendance lourde au sein du gouvernement qui veuille montrer patte blanche aux islamistes, histoire, peut-être, de se mettre en phase avec la réconciliation nationale dans sa phase passive…

Après la campagne maladroite contre les chrétiens, y compris les plus corrects, la chasse aux couples dans certains quartiers d’Alger, la descente dans les débits de boissons, voilà que la «police des mœurs» aux allures de pasdarans algériens s’en va «cueillir» des personnes chez elles pour les punir avant le châtiment de Dieu.

Il est à espérer que les pouvoirs publics aient juste perdu la «Qibla» en cette chaleur caniculaire et vont revenir au droit chemin dès demain l’Aïd. Amen.

Hassan Moali