Regain de violences en Irak où le Premier ministre Nouri al Maliki est de plus en plus contesté
Des manifestants armés ont tué six soldats irakiens – qui s’ajoutent aux 40 morts tués par l’armée – et en ont enlevé un septième hier près de Ramadi, le chef-lieu de la province sunnite d’al-Anbar.
Les manifestants ont incendié par ailleurs deux véhicules blindés et détenaient le soldat enlevé sur le lieu de leur sit-in sur l’autoroute de Ramadi, selon des indications d’un officier de la police. L’Irak est depuis hier au bord de l’explosion avec des attaques et des représailles contre les représentants de l’ordre. Quarante personnes ont été tuées hier dans le nord de l’Irak lors d’un assaut des forces anti-émeutes contre des manifestants sunnites hostiles au Premier ministre Nouri al-Maliki et des attaques menées en représailles contre les militaires.
Ces violences sont de nature à intensifier la tension confessionnelle dans le pays, entre le Premier ministre chiite et ses détracteurs qui l’accusent de vouloir accaparer le pouvoir. Peu après, le ministre sunnite irakien de l’Éducation, Mohammed Ali Tamim, a démissionné pour protester contre la répression menée par les autorités dominées par les chiites, a indiqué un responsable au sein du cabinet du vice-Premier ministre.
Les forces anti-émeutes ont pris d’assaut à l’aube une place de la localité de Houweijah, dans la province de Kirkouk, après l’expiration d’un ultimatum adressé aux manifestants pour qu’ils livrent les assassins d’un soldat tué la semaine dernière, selon le ministère de l’Intérieur.
Vingt-cinq manifestants et deux militaires ont été tués dans cet assaut et 70 personnes blessées, selon l’armée. «Nos forces n’ont pas ouvert le feu en premier. Elles ne l’ont fait que lorsque les manifestants ont tiré et nous avons riposté pour nous défendre», a affirmé un officier ayant rang de général, qui a requis l’anonymat. Un porte-parole des manifestants a cependant affirmé à que les forces anti-émeutes avaient «ouvert le feu de façon indiscriminée» sur les manifestants. Selon lui, elles ont en outre «mis le feu aux tentes» dans lesquelles des centaines de manifestants campaient depuis plusieurs semaines pour réclamer la démission de M.Maliki, à l’instar des sit-in organisés dans d’autres villes sunnites. Selon un communiqué du ministère de l’Intérieur, les autorités avaient «demandé aux manifestants pacifiques non armés d’évacuer la place» avant l’assaut. D’après l’officier, l’opération visait «l’armée des Naqchbandis», un groupe rebelle islamiste violemment opposé au gouvernement et qui est particulièrement actif à Kirkouk et sa région. Il compte dans ses rangs d’anciens officiers de l’armée de Saddam Hussein et serait lié au numéro deux du régime en fuite, Izzat al-Douri.
Après l’assaut qui s’est produit à l’aube, les forces armées ont imposé un couvre-feu dans la région et la place a été évacuée. Mais l’armée a par la suite tué 13 hommes qui ont tenté d’attaquer ses positions dans la province de Kirkouk, en représailles à l’incident de Houweijah, selon des officiers. «Lorsqu’ils ont appris que des morts et des blessés étaient tombés sur la place du sit-in, les membres des tribus des villages de la région ont attaqué les postes de contrôle de l’armée» en représailles, a affirmé le porte-parole des manifestants.
Le chef du conseil de la province de Kirkouk, Hassan Trouhan, a condamné l’assaut contre la place et «l’usage inconsidéré de la force». Il a appelé «l’ONU à intervenir car la situation est extrêmement grave et Kirkouk ne peut pas supporter de nouvelles crises». Située à 240 km au nord de Baghdad, la province de Kirkouk est une mosaïque ethnique et confessionnelle où cohabitent Kurdes, Arabes et Turkmènes, sunnites et chiites.
Des manifestations anti-gouvernementales se succèdent depuis fin décembre dans des provinces majoritairement sunnites du nord du pays.
Les protestataires réclament la démission de Nouri al-Maliki et la fin de la «marginalisation» dont ils estiment être victimes en raison de leur appartenance religieuse.