Que se passe-t-il dans l’Association engagée dans le cadre du partenariat algéro-émirati autour de DP World Djazair dont les responsables viennent de jeter un pavé dans la marre.
Dorénavant, tout investissement dans le secteur est conditionné par l’extension de l’enceinte portuaire de Djen-Djen par l’Etat algérien, la réalisation de certaines infrastructures de renforcement du port et l’accomplissement de sa liaison au réseau routier et autoroutier.
Pourtant, à la signature de l’accord, les deux parties s’étaient engagées sur un programme d’investissement devant toucher les deux ports, afin de permettre le bon fonctionnement de la machine portuaire.
Pourquoi donc cette sortie médiatique ? Les choses ne semblent donc pas aller comme le souhaite les deux parties. Et c’est Mohamed Al Khadar, Directeur général de DP World El Djazair et du Port d’Alger, qui a fait part de ce malaise lors du «premier événement annuel relation client», organisé mercredi soir à l’hôtel Hilton d’Alger et au cours duquel des «certificats d’honneur» ont été distribués aux Compagnies maritimes clientes de DPW Djazair, notamment CMA-CGM, MSC-Algérie, Maersk Line, GEMA, et Global Shipping.
Interrogé sur l’éventualité de voir le port de Djendjen concurrencer le tout nouveau port marocain «Tanger-Med», M. Al Khadar a répondu par l’affirmative tout en posant les conditions pour une telle performance. «Oui, à condition qu’il (le port de Djen-Djen, NDLR) soit doté d’infrastructures par la construction d’une digue de protection, d’extension des quais et des aires de stockage, et qu’il bénéficie de l’apport d’infrastructures routières (dont l’autoroute Est-Ouest), afin de convaincre les armateurs de venir vers ce port», a-t-il indiqué.
Selon lui, même les agents de la douane à Djendjen «ne sont pas encore habitués au traitement des containers». Maintenant que l’accord est signé et le partenariat engagé, les deux parties s’interjettent la balle et conditionnent la réussite de l’Association.
Pourquoi avoir attendu tout ce temps pour évoquer cette question ô combien importante des investissements à consentir pour assurer le bon fonctionnement de la machine portuaire ? N’était pas judicieux de discuter de tout ça, avant la signature de l’accord ? Tarik El Farouki, Directeur général de DP World Djendjen, lui, parle d’investissements nécessaires de l’ordre de 700 à 800 millions d’euros de la part de l’Etat algérien et de 400 millions d’euros pour ce qui concerne la part de DP World Djazaïr.
Il est question d’élargir la longueur de quai de 240 m (actuellement) à 300 m (vers le nord) et 400 m (vers le nord-ouest). «Dans la première phase 2010/2012, le terminal à conteneurs sera exploité avec un quai de 250 m avec des grues mobiles et des strackers, en attendant les travaux de génie civil qui seront réalisés afin de finaliser le prolongement de la digue et l’extension de l’aire de stockage», affirme le DG de DP World Djendjen.
Une seconde phase, verra la mise en service dans le quai ouest de grues STS 4 et 10 GTR, la construction de la barrière d’accès et d’un terminal ferroviaire, ainsi que la mise en place d’une section réfrigérée, et de bâtiments techniques et administratifs, selon la présentation de l’intervenant. Deux autres phases sont également prévues pour l’acquisition d’autres équipements.
Pour El Farouki, des liaisons autoroutières et ferroviaires entre le port de Djendjen et la ville d’El Eulma, devenues un hub commercial de la région Est du pays sont nécessaires. L’idéal, selon les responsables de DP World Djazair, serait de mettre en place une «zone franche» pour faire de Djendjen un port «nettement très attractif» pour les opérateurs. Pour ses responsables, la mission de DP World est de faire du port de Djendjen un hub terminal containers de « classe mondiale» et «d’offrir un transbordement assez compétitif sur la Méditerranée», pour devenir une «destination de choix de nos clients par la mise en œuvre d’équipements, de services et d’expertises hautement concurrentielles».
D’autant que le marché algérien des conteneurs est appelé à croître de 12,7% d’ici 2019, ce qui correspond à 3.379.000 TEU contre 1.007.000 TEU en 2009. Ce qui confirme ce malaise latent au sein de l’Association c’est les difficultés rencontrées lors des premiers mois du partenariat comme le confirme le premier responsable de DP World El Djazair qui avoue que le premier exercice (9 mois de 2009) a été «difficile».
Les conflits entre les travailleurs et la nouvelle direction du port suite aux «changements de méthodes de travail», les «capacités d’accueil» et le manque d’équipements au port d’Alger étaient pour l’essentiel, les causes directes de ces difficultés. « Il a fallu batailler pour changer les mentalités et faire accepter l’idée qu’un port de cette importance pour le pays doit travailler 24/24H, 7/7J», explique Mohamed Al Khadar. Autre souci de DP World Djazair, les conséquences des nouvelles dispositions relatives au commerce extérieur, introduites depuis la Loi de Finances Complémentaire (LFC) 2009, qui «ont ralenti la sortie des conteneurs du port».
«Nous ne remettons pas en cause ces dispositions qui relèvent de la souveraineté de l’Etat Algérien, mais nous constatons juste que le temps d’attente d’un container au port d’Alger est passé de 18 jours en 2009 à 24 jours en 2010», conclu le DG de DP World Djazair.
C’est dire que le partenariat engagé entre Algériens et Emiratis semble loin de trouver les conditions pour un véritable décollage. De là à ce qu’il soit remis en cause…l’avenir nous le dira.