Il y a 53 ans, l’Algérie devenait indépendante, après 132 ans de colonisation française, 7 ans et 1/2 de guerre de libération et des millions de morts. A l’école, on nous parlera de nos valeureux héros tel que Hassiba Ben Bouali ou Didouche Mourad, de la liesse populaire du 5 juillet 1962, sous forme d’images en noir et blanc de femmes et d’hommes brandissant dignement le drapeau algérien.
Au delà de la version officielle relatée par les livres scolaires, la véritable histoire nationale demeure toujours ignorée par l’opinion nationale, en particulier chez les nouvelles générations, ainsi que les faits qui se sont produits juste après l’indépendance. Les assassinats politiques, dont ont été victimes de nombreux leaders de la guerre de Libération nationale, restent encore un tabou qui ne sera pas brisé de sitôt. La vérité sur ces actes ignobles, qui ont permis l’élimination physique d’un certain nombre d’adversaires politiques aux tenants du pouvoir, ne sera peut- être pas connue. Les exécutions extrajudiciaires de ces chefs historiques de la révolution algérienne restent impunies. Nous allons donc revenir sur ces assassinats politiques :
Abane Ramdane: « l’architecte de la révolution », assassiné en décembre 1957, dans une ferme isolée entre Tétouan et Tanger au Maroc. Il fut étranglé par deux hommes de main de Abdelhafid Boussouf dit « Colonel Si Mabrouk « et Mahmoud Chérif , tous deux membres éminents du Comité de Coordination et d’exécution du Conseil national de la révolution algérienne, a qui il reproche une dérive autoritariste et l’abandon de la primauté du politique et de l’intérieur, adoptée à la Soummam. et c’est pour cela que ceux-ci décidèrent de le supprimer.
Mohammed Chaabani: Chef de la région III de la wilaya VI, il prend position contre le régime de Ben Bella qu’il juge autoritaire. En 1964, il participe à une révolte des Wilayas. Ben Bella accuse alors Chabani de complot contre le FLN et de tentative de sécession du sud algérien et son pétrole. Le colonel Chabani est arrêté le 8 juillet 1964, à Bou-Saâda, conduit à Alger puis transféré à la prison militaire d’Oran. Une cour martiale est spécialement créée par Ben Bella le 28 juillet 1964, le colonel Chabani est jugé le 2 septembre 1964, condamné à mort et exécuté le 3 septembre 1964. il sera finalement réhabilité en 1984.
Mohammed Khider: L’ancien secrétaire général et trésorier du FLN. À la suite de divergences apparues en 1963 avec Ben Bella, il est contraint à l’exil. À l’abri, depuis Genève, il annonce officiellement son opposition à la dictature du FLN. S’ensuit l’affaire dite du « trésor du FLN » où Ben Bella puis Boumédiène l’accusent d’avoir détourné les fonds du FLN qu’il gérait. Khider déclarera d’ailleurs son opposition au coup d’État et au régime autocratique du colonel Boumédiène en 1965
Le , en Espagne, Mohamed Khider est assassiné par les services spéciaux algériens à Madrid. Une personne se présenta un soir à sa voiture devant chez lui alors qu’il se préparait à partir, et lui porta plusieurs coups de pistolet qui furent fatals. Bien que les coupables aient été identifiés par la police, le régime de Franco, alors d’entente avec le gouvernement algérien, classe l’affaire sans suite.
Krim Belkacem: Dans la course au pouvoir qui suit le cessez-le-feu en 1962, Krim Belkacem s’oppose à Ben Bella et à l’État-major général. Lorsque se crée le groupe de Tlemcen (11 juillet 1962), il réplique en s’installant à Tizi Ouzou pour organiser la résistance au coup de force ben belliste (25 juillet 1962). Mais il est dépassé par la rapidité des évènements et leur complexité. Après la victoire de Ben Bella et de l’État-major, il se retrouve écarté de la vie politique, se consacre aux affaires et s’installe un moment en France.
Après le coup d’État du 19 juin 1965, il repasse dans l’opposition. Accusé d’avoir organisé au mois d’avril 1967 un attentat contre Boumédiène, manipulé et trahi par une partie de son entourage, il est condamné à mort par contumace, commence alors un exil amer. Le 18 octobre 1970, on le retrouve étranglé avec sa cravate dans une chambre d’hôtel à Francfort, par les services secrets algériens de Kasdi Merbah, sur les ordres de Boumédiène.
Il fut enterré dans le carré musulman de la ville allemande jusqu’au 24 octobre 1984, date à partir de laquelle, réhabilité, il repose au « Carré des Martyrs » à El Alia, à Alger.
Ali Mecili: Ali André Mécili est un homme politique algérien et citoyen français, né à Koléa, en Algérie, en 1940, son assassinat constitue le point de départ de l’affaire Mécili, où l’enlisement prolongé de l’enquête a été dénoncé par ses proches et certains journalistes comme l’effet d’une collusion des raisons d’État algérienne et française. Toujours en cours, l’instruction a connu un rebondissement avec l’arrestation le 14 août 2008 de Mohamed Ziane Hasseni, responsable du protocole au ministère des Affaires étrangères algérien et soupçonné d’avoir été l’organisateur du meurtre. Le diplomate a obtenu un non-lieu le 31 août 2010.
Mohammed Boudiaf: Fonctionnaire de profession, membre fondateur du Front de libération nationale (FLN), il entre en opposition contre les premiers régimes mis en place à l’indépendance, et s’exile durant près de 28 ans au Maroc. Rappelé en Algérie, en janvier 1992, en pleine crise politique, à la tête de l’État, en tant que président du Haut Comité d’État. Souhaitant une Algérie démocratique tournée vers la modernité, il disait vouloir mettre fin à la corruption qui gangrenait l’État. Mais Mohamed Boudiaf est assassiné cinq mois plus tard, le 29 juin 1992, lors d’une conférence des cadres qu’il tenait dans la ville d’Annaba. Un sous-lieutenant du groupe d’intervention spécial (GIS), Lambarek Boumaarafi, jeta une grenade pour faire diversion et tira à bout portant sur le président le tuant sur le coup. La motivation de son assassinat est sujette à controverse, entre la piste d’une action isolée commise par un militaire ayant des sympathies islamistes et celle d’un complot plus vaste impliquant des généraux de l’armée.
Kasdi Merbah:En tant que chef de la Sécurité Militaire, il joue un rôle essentiel au sein du pouvoir algérien de 1962 aux années 1980. Il occupe plusieurs postes ministériels dans les années 1980, devient chef du gouvernement de l’Algérie du 5 novembre 1988 au 9 septembre 1989 avant d’être limogé, de fonder son propre parti, le Mouvement Algérien pour la Justice et le Développement (MAJD) et de se montrer très critique vis-à-vis du régime. Œuvrant pour un rapprochement entre les islamistes et le pouvoir. Le 21 août 1993, à 19 heures, à Bordj El Bahri, il est assassiné en compagnie de son fils cadet Hakim (25 ans), le chauffeur Hachemi Ait Mekidèche (30 ans), son frère Abdelaziz (42 ans) et son garde du corps Abdelaziz Nasri. Les raisons précises de son assassinat et ses instigateurs demeurent inconnus du public. Un seul officiel du régime, Daho Ould Kablia, sera présent lors de son enterrement. La famille considère que l’enquête a été « bâclée » et avance qu’il fut éliminé « par un clan du pouvoir, hostile à sa démarche de réconciliation » entre le FIS et le pouvoir.