Dernier membre de la famille en cavale, Seïf al-Islam Kadhafi est entre les mains du Conseil national de transition libyen d’où les interrogations sur ce qui l’attend, après le lynchage de son père par les combattants rebelles après son arrestation.
Recherché par la Cour pénale internationale, Seïf al-Islam Kadhafi a été arrêté dans le sud de la Libye par d’anciens rebelles, ont annoncé hier un ministre du Conseil national de transition et un chef de brigade. “Seïf al-Islam, recherché par la Cour pénale internationale, a été arrêté dans le Sud libyen”, a déclaré à l’AFP Mohammed al-Allagui, le ministre de la Justice et des droits de l’Homme au CNT. L’information a été confirmée lors d’une conférence de presse à Tripoli du chef des opérations des révolutionaires de Zenten, Bachir Taïb, lequel a, de son côté, annoncé que ses hommes avaient “arrêté Seïf al-Islam avec trois de ses collaborateurs dans la région d’Oubari”. Il a ajouté qu’“il sera transféré à Zenten”, à 170 km au sud-ouest de Tripoli. À la question de savoir si Seïf al-Islam serait remis à la CPI, il a répondu que cette décision revenait au CNT.
Voilà ce qui laisse planer le doute sur le sort qui attend Seïf al-Islam Kadhafi, d’autant plus que son père, Mouammar Kadhafi, a été lynché avant d’être achevé après sa capture le 20 octobre dernier par des combattants du CNT. Ce dernier, dont le contrôle sur ses hommes armés et loin d’être évident, pourra-t-il éviter le même sort que son père à Seïf al-Islam Kadhafi ? Peut-être que la vague de condamnations et d’indignation provoquée au sein de la communauté internationale par les images insoutenables des ultimes moments du colonel Kadhafi poussera le CNT à épargner son fils. Pas sûr du tout, car sa traduction devant la justice, la Cour pénale internationale a priori car elle a émis un mandat d’arrêt à son encontre, divulguera beaucoup de secrets. Et cette éventualité ne sera pas du goût des hommes politiques libyens, actuellement au CNT, et qui étaient dans le régime de Kadhafi. Elle ne sera pas non plus vue d’un bon œil par des chefs d’État étrangers, qui avaient des relations étroites avec l’ancien guide libyen. À partir de là se pose la question du jugement de Seïf al-Islam Kadhafi. Sera-t-il remis à la CPI, ou sera-t-il traduit devant une juridiction locale ? Jusque-là le CNT avait privilégié la solution locale, y compris pour Mouammar Kadhafi, auquel on n’a pas laissé la vie sauve pour pouvoir rendre des comptes. Qu’en sera-t-il pour son fils ?
Mais le fait que la Cour pénale internationale (CPI) cherchait hier à obtenir une confirmation officielle auprès des autorités libyennes de l’arrestation de Seïf al-Islam laisse penser que le CNT n’est nullement disposé à le remettre à cette instance judiciaire internationale. Un porte-parole de la CPI, Fadi El-Abdallah, a déclaré que “le premier élément, maintenant, est de confirmer la capture. Ce que nous allons faire, c’est attendre la confirmation officielle des autorités qu’un suspect recherché par la CPI a été arrêté”. “C’est une information que nous avons entendue dans les médias, nous n’avons pas été informés officiellement”, a-t-il ajouté pour montrer que pour le moment, la cour ne peut ni confirmer ni infirmer l’arrestation. “Nous sommes en contact avec le ministère libyen de la Justice afin de nous assurer que toute solution en lien avec l’arrestation de Seïf al-Islam soit conforme à la loi”, a également affirmé à l’AFP une porte-parole du bureau du procureur, Florence Olara, refusant de donner plus de détails. Pour rappel, la CPI a émis le 27 juin un mandat d’arrêt contre Seïf al-Islam et son père, soupçonnés de crimes contre l’humanité, à savoir meurtre et persécution.
L’ancien chef des services de renseignements libyens Abdallah al-Senoussi, beau-frère de l’ex-dirigeant, est également visé par un mandat d’arrêt de la CPI. Selon des sources sécuritaires nigérienne et malienne, il se serait réfugié au Mali fin octobre. Le 9 novembre, le procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, avait assuré que l’arrestation de Seïf al-Islam, qui fait l’objet de notices rouges d’Interpol, n’était qu’une “question de temps”. Le procureur a évoqué à plusieurs reprises avoir eu des “contacts” avec Seïf al-Islam via des intermédiaires au sujet de son éventuelle reddition, ce dernier souhaitant savoir ce qui l’attendrait à la CPI s’il se rendait. Les autres fils de Mouammar Kadhafi sont, soit morts, soit ont trouvé refuge dans des pays arabes et africains. En effet, Hannibal, Mohammed, leur sœur Aïcha et leur mère se trouvent en Algérie, alors que Saâdi est au Niger.
Merzak Tigrine