Après un quart de siècle de négociations / Algérie-OMC : un processus interminable

Après un quart de siècle de négociations / Algérie-OMC : un processus interminable

La question de l’adhésion de l’Algérie à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) aura été le thème du débat, animé hier, autour du professeur Graig van Grasstek, professeur d’économie politique à Harvard Kennedy School, aux Etats-Unis, invité par le Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE). L’invité, expert en la matière, encouragera l’Algérie à continuer « à travailler » pour accéder à l’Organisation mondiale du commerce et à s’arrimer à l’économie mondiale.

L’interminable processus d’adhésion de l’Algérie est ainsi remis au goût du jour avec de nouveaux questionnements. Van Grasstek, auteur, en 1998, pour le compte de l’Algérie d’un rapport sur les contraintes de son accession à l’Organisation mondiale du commerce a tenté de dresser l’état actuel de la négociation.

Dans sa présentation intitulée «Diversité économique, OMC et les perspectives pour l’Algérie », le professeur procèdera à quelques comparaisons avec d’autres pays ayant accédé à l’organisation, à l’image de la Russie et de l’Arabie Saoudite. Notant au passage que l’Algérie n’est pas loin de la situation de ces pays, les dépassant même sur certains aspects.

Il préconisera d’améliorer la question des droits et de la propriété intellectuelle pour lesquelles l’OMC reste intransigeante. « L’accession est autant un processus domestique qu’international », notera le conférencier afin de mettre l’accent sur les « normes » inlassablement requises pour pouvoir accéder au club OMC. Van Grasstek ajoutera qu’il est « important de connaître les limites et les difficultés de l’accession », afin de savoir comment procéder et se mettre dans les meilleurs dispositions. « La révision de la règle du 51/49 procèdera, par exemple, à faciliter les choses», glissera-t-il.

Il dira que «l’accession peut prendre énormément de temps » et que l’OMC n’est pas une organisation comme l’ONU où on y accède en formulant une demande, « il s’agit d’un club privé où il y a des règles à respecter pour pouvoir profiter de ce système ».

La rencontre-débat s’est largement recentrée sur la situation actuelle de l’Algérie en rapport avec ses différentes négociations devant déboucher sur l’accession à l’OMC. Tableau à l’appui, Van Grasstek préconisera d’accélérer le processus au vu du temps passé d’autant plus que la conjoncture semble propice sur le plan économique et politique, avec les décisions majeures qui pourraient changer les paradigmes économique algériens.

La position de l’Algérie sur le marché européen ajoute à son importance dans les négociations. « C’est est un avantage certain encore inexploité ». Les points négatifs ont également été évoqués comme cette propension à gérer sur le court terme. Un élément qui joue contre l’accession. La lenteur du processus (plus de 25 ans pour l’Algérie) est un élément symptomatique, selon le conférencier.

Accélérer le processus ?

Plusieurs questions dont celle de savoir si l’Algérie a les moyens d’accélérer ce processus, aujourd’hui, au vu des impératifs du moment. Et aussi la question du coût social d’une telle adhésion et les sacrifices que pourraient concéder le travailleur algérien du moins à court terme. Van Grasstek terminera son intervention par certaines recommandations pour une meilleure approche dans les négociations à venir comme le travail diplomatique, véritable outil pour plaider sa cause.

L’Algérie pourrait avoir comme perspective la réunion ministérielle de 2022, devant se dérouler au Kazakhstan, pour accélérer la cadence et se poser comme un candidat sérieux. Durant la séance des questions-réponses certains se sont interrogés sur l’utilité de cavaler inlassablement derrière cette adhésion.

L’Algérie qui court derrière une accession de plus en plus compliquée, n’est-elle pas en train de perdre du temps avec un monde en changement dans lequel même l’OMC est en crise, voire dans un état de « mort clinique » et n’étant plus en mesure de jouer son rôle de gendarme du commerce mondial en ces temps de guerres impitoyables entre les grandes économies, Chine et Etats-Unis en premier lieu ? La réponse est esquivée.

Cette conférence-débat sur cette désormais vielle question de l’accession de l’Algérie à l’OMC, aura laissé un goût d’inachevé. Au cœur d’une crise politique aiguë, l’Algérie semble dans une impasse où il est devenu difficile de se projeter.

Slim Othmani, l’un des animateur de CARE, prend la parole pour vite lever tout équivoque sur une surinterprétation selon laquelle « CARE ferait la promotion de l’adhésion de l’Algérie à l’OMC », et qu’il ne s’agit là que d’un débat pour essayer de comprendre. Une réaction qui en dit long sur l’esprit d’angoisse qui accapare les acteurs économiques en ces temps d’incertitudes.

Adlène Badis