De combien de ministères le FLN disposera-t-il?
Abdelaziz Belkhadem ne pouvait pourtant rêver meilleur scénario pour confirmer le leadership de son parti et répondre à ses détracteurs.
Le scrutin du 10 mai 2012 qui a été qualifié de rendez-vous historique, ne peut que conférer des responsabilités historiques. Les urnes ont parlé. C’est au FLN qu’elles incombent. Pourquoi donne-t-il, alors, l’impression de ne pas vouloir les assumer?
Quelques réponses s’esquissent. La première est relative au contexte socio-économique qui se dégrade de façon chronique. La perte du pouvoir d’achat, la flambée des prix des produits de consommation de base, des fruits et légumes, des viandes, du poisson, la crise du logement et le chômage des jeunes, particulièrement,… constituent autant de sources de tensions comme elles représentent autant de défis à relever.
Si l’on ajoute à cela la dépendance de l’économie nationale par rapport à ses exportations en hydrocarbures avec des prix de l’or noir qui ont fortement reculé et qui peuvent se répercuter, négativement, sur les réserves de change, on peut considérer qu’à moyen terme l’embellie financière que connaît l’Algérie depuis à peu près une décennie, soit menacée. Le front social dont les cendres ne sont pas éteintes pourrait, de nouveau s’embraser.
La seconde est liée au développement des crises que connaissent nos voisins immédiats (la Libye qui est à la recherche d’une stabilité qu’elle a du mal à trouver, plus proche de nous, la crise du Mali dont la partition a été mise en oeuvre, qui peut faire tache d’huile au Sahel et déstabiliser la région). Ces deux conflits ont la particularité d’être liés quoi qu’on en dise. Les factions qui ont actuellement la mainmise sur le nord du Mali se sont servies dans les arsenaux libyens pour mener à terme leur objectif.
Il faudra un Premier ministre d’une certaine pointure avec un chef de la diplomatie à l’expérience avérée (les Affaires étrangères sont le domaine réservé du chef de l’Etat – Ndlr) pour faire face à ces défis majeurs. Abdelaziz Belkhadem est-il l’homme de la situation? Sera-t-il appelé à diriger et former le prochain gouvernement? De combien de ministères le FLN disposera-t-il? Ce sont des questions que se posent, et sur lesquelles spéculent les observateurs avertis de la scène politique algérienne.
Pendant ce temps-là, le FLN, qui a pourtant investi en force le palais Zighout-Youcef (208 sièges sur les 462 de la nouvelle Assemblée) ne donne pas l’impression de vouloir traduire sur l’échiquier politique la victoire éclatante que les urnes lui ont offerte.
Quand bien même la Constitution permet au président de la République de nommer un Premier ministre de son choix et d’un parti qui ne serait pas arrivé en tête de ce scrutin, on n’a pas entendu le parti auquel une majorité d’Algériens ont accordé leur préférence, solliciter une telle revendication qui serait somme toute logique et justifiée car attestée par la légitimité populaire. Deux données qui ouvrent l’appétit à des personnalités qui croient en leur étoile.
A l’instar du très médiatique, désormais ex-ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, qui a défié son parti, le MSP, en refusant de boycotter la cérémonie d’installation de la nouvelle APN. Brillamment élu à Alger, il n’a pas non plus écarté sa disponibilité à participer au prochain gouvernement alors que la formation politique à laquelle il appartient a exclu cette option.
«Je suis un commis de l’État. Je reste au service de mon pays et j’oeuvre à sa stabilité» a-t-il déclaré. Depuis l’annonce des résultats de ce rendez-vous électoral, l’ex-parti unique donne l’impression de s’effacer et de ne pas vouloir assumer des responsabilités que le peuple lui a conférées et qu’il n’a cessé de réclamer.
«Je ne serai pas obligatoirement le Premier ministre» a insinué Abdelaziz Belkhadem. Le SG de l’ex-parti unique a-t-il eu vent du choix du Président pour faire cette déclaration? Et le FLN veut-il gouverner seul? «Le FLN est favorable à un gouvernement diversifié ouvert à l’opposition», a confié dimanche à TSA son porte-parole Kassa Aïssi. «J’ignore le nombre de postes ministériels qui reviendront au FLN», a-t-il ajouté.
Le Front de libération nationale a une expérience de l’exercice du pouvoir incontestable. Elle a été d’abord imposée par un contexte historique (la guerre de Libération nationale) puis après l’indépendance par une hégémonie sans partage en tant que parti unique. Ce qui lui a permis de régner sur les destinées du pays, sans interruption, pendant près de trente ans.
S’ensuivit une crise sans précédent puis l’avènement du multipartisme qui l’a mis entre parenthèses. Ragaillardi par sa dernière performance, il semble avoir le triomphe modeste. A moins qu’il n’ait peur d’assumer seul un éventuel échec et qu’il n’ait trouvé les défis auxquels fait face l’Algérie, trop lourds à porter…