Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan est arrivé hier à Tripoli, dernière étape de sa tournée dans les pays du « printemps arabe ». M. Erdogan a été accueilli à l’aéroport par le chef du Conseil national de transition (CNT), Moustafa Abdeljalil, et le numéro 2 de cette instance, Mahmoud Jibril.
Outre ses entretiens avec les nouveaux dirigeants libyens, il a participé à la prière du vendredi à Tripoli et visité une mosquée historique datant de l’ère ottomane, selon des responsables du CNT. Le Premier ministre turc, qui a été accueilli en héros au Caire, jouit d’une grande popularité dans les pays arabes, nourrie par ses prises de position sur le conflit israélo-palestinien, alors que la plupart des dirigeants des pays de la région sont considérés comme impuissants face à l’État hébreu.
Il a ainsi salué la victoire du peuple libyen et appelé les derniers bastions pro-Kadhafi à abandonner les armes. « Je suis heureux d’avoir été témoin de la victoire et de l’avènement de la démocratie en Libye », a-t-il dit après avoir participé à la prière hebdomadaire sur la place des Martyrs, anciennement appelée la place Verte. Pour sa première visite en Libye après la chute du régime de Mouammar Kadhafi le 23 août, M. Erdogan a aussi « salué la mémoire des martyrs libyens qui se sont sacrifiés pour leur patrie et leur religion comme l’avait fait Omar el-Mokhtar », figure de la résistance contre la colonisation italienne, dont on célèbre cette année le 80e anniversaire de sa pendaison par l’armée italienne. « Je m’adresse à Syrte et à Bani Walid, embrassez vos frères et joignez-vous aux autres Libyens », a-t-il poursuivi en allusion aux deux villes qui ne sont pas encore contrôlées totalement par les combattants des nouvelles autorités. « Cette unification des rangs favoriserait le développement de la Libye et en ferait l’un des meilleurs pays de la région », a encore dit le Premier ministre turc.
Lors d’une conférence de presse avec le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, M. Erdogan a assuré que « la Libye appartient à tous les Libyens, qui auront à décider de leur avenir ». Il a également souligné que ce pays « ne sera pas (un nouvel) Irak ». Le Premier ministre turc a de plus promis d’aider les Libyens à reconstruire les écoles, les postes de police, à construire un hôpital et le siège pour le futur Parlement, ainsi qu’un orphelinat à Misrata. « Nous allons dépêcher demain des aides humanitaires » à Syrte, Bani Walid et Sebha où les combattants pro-CNT s’activent à chasser les derniers fidèles du régime de Mouammar Kadhafi, a-t-il encore dit. La compagnie aérienne turque Turkish Airlines va reprendre prochainement ses vols sur Tripoli après avoir assuré des liaisons avec Benghazi dans l’Est. « Nous aspirons à un État démocratique et musulman en s’inspirant du modèle turc. L’islam est capable de susciter renaissance et développement », a pour sa part déclaré M. Abdeljalil.
Dans une évidente allusion au président syrien Bachar el-Assad, M. Erdogan a également déclaré : « Vous avez prouvé aux yeux du monde qu’il n’y a pas de régime qui puisse aller contre la volonté du peuple. C’est ce que doivent réaliser ceux qui oppriment le peuple en Syrie. » « Ce genre de dirigeant doit comprendre que son ère est révolue parce que le temps des régimes oppresseurs a pris fin », a-t-il ajouté.
Ses propos en langue turque étaient traduits en arabe. La Turquie, qui entretenait depuis plusieurs années des relations cordiales avec la Syrie, s’est considérablement distanciée du régime de Damas après l’échec de ses efforts diplomatiques pour obtenir l’arrêt immédiat de la répression. « Le peuple syrien ne croit pas Assad, moi non plus », a asséné il y a plusieurs jours M. Erdogan. Il devait encore se rendre à Misrata qui a été à l’avant-garde de la révolte contre le régime de Mouammar Kadhafi et qui a subi de grosses destructions.
Par ailleurs, le président américain Barack Obama va rencontrer M. Erdogan mardi prochain, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, pour évoquer notamment la situation en Syrie, a annoncé hier la Maison-Blanche. Cette rencontre entre les deux alliés au sein de l’OTAN sera également l’occasion de parler des autres révoltes populaires agitant le monde arabe depuis janvier, en particulier en Libye, a précisé le conseiller adjoint de M. Obama pour la Sécurité nationale, Ben Rhodes. « Notre relation de travail avec la Turquie est étroite et fonctionne bien », a affirmé M. Rhodes en remarquant que le gouvernement Erdogan avait aidé Washington lors du « printemps arabe » ces neuf derniers mois.
(Source : agences)