Messahel, qui a écouté tous les protagonistes de la crise, est peut-être l’une des rares personnalités dans le monde à disposer de tous les éléments du problème.
Le ballet diplomatique dont Alger est le théâtre depuis l’éclatement de la crise entre le Qatar et cinq pays arabes, se poursuit. Ainsi, après des émissaires de très haut niveau, émiratis et qataris, ainsi que les entretiens téléphoniques avec des responsables de la région du Hidjez, c’était le tour, avant-hier, du ministre iranien des Affaires étrangères de faire l’escale, aujourd’hui incontournable d’Alger, histoire de trouver un rôle dans la résolution d’une crise diplomatique majeure.
Reçu par le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, Mohammad Jawad Zarif, a souligné, à l’issue de l’entretien, l’importance du respect de «l’intégrité territoriale des Etats et la non-ingérence dans leurs affaires». Une position que Téhéran partage avec Alger. Ramenée à ce qui se passe entre le Qatar et l’Arabie saoudite, la précision iranienne vaut une demande de soutien de l’Algérie en cas d’aggravation de la crise. Mais le ministre iranien n’omet pas de retenir dans son propos «l’importance du dialogue pour parvenir à des solutions pacifiques aux conflits et aux différends».
Le propos n’est certainement pas d’obtenir un quelconque engagement de l’Algérie, mais de coordonner une action diplomatique afin de régler le conflit et éviter une confrontation armée entre les voisins. Même si pareille option a été écartée par un haut responsable émirati à partir de Paris, il n’en demeure pas moins que le statu quo actuel est porteur de danger sur l’ensemble de la région. La visite du ministre iranien des Affaires étrangères, d’autant plus importante pour Téhéran qui a toujours compté sur la médiation algérienne au plus fort de la crise en rapport avec son programme nucléaire, en appellera certainement à Alger, puisqu’il est dit dans de nombreux cercles que l’Iran est la véritable cible de la stratégie de tension orchestrée par l’Arabie saoudite dans le Proche-Orient.
Face à une situation qui fait d’elle un interlocuteur privilégié de tous les acteurs de la crise Qatar-Arabie saoudite, la diplomatie algérienne n’aura certainement pas la partie facile, tellement les positions sont aux antipodes l’une de l’autre. Le refus du Qatar d’engager un quelconque dialogue avant la levée du blocus, témoigne de la rigidité des attitudes dans cette partie du monde. Abdelkader Messahel, qui a écouté tous les protagonistes de la crise, est peut-être l’une des rares personnalités dans le monde à disposer de tous les éléments du problème. Mais le défi que devra relever le ministre des Affaires étrangères consiste à débloquer une situation qui se complique à chacune des déclarations de l’un ou de l’autre.
Mais tout le monde doit savoir que la crédibilité de la démocratie algérienne a été construite sur le principe du rejet de «toute ingérence étrangère dans les affaires internes des pays et la nécessité du respect de leur souveraineté», comme le rappelle souvent Messahel. Une base de travail valable en toutes circonstances, «même pour la situation en Syrie, en Libye ou en Irak (où) notre position est claire: la solution doit être interne, entre les concernés directement, sans aucune ingérence ou pression politique de l’extérieur», insiste Abdelkader Messahel.