Même s’ils n’ont pas fini par avoir complètement gain de cause, notamment sur cette doléance liée aux changements des statuts de la LFP et à la dépendance de la CFA, les présidents des clubs des Ligues 1 et 2 ont obtenu mieux : la tête de Belaïd Lacarne. Tout un symbole. Le fait que la Fédération algérienne de football, son président Mohamed Raouraoua en tête, a déchargé le patron de la CFA de la désignation des arbitres résonne, d’ailleurs, comme un énorme désaveu pour l’ancien sifflet d’or qu’était Belaïd Lacarne.
Priver le président de la Commission fédérale d’arbitrage de désigner, lui-même, les referees qui officieront chaque week-end sur les terrains de Ligue 1 et Ligue 2 est un camouflet on ne peut plus rabaissant. A Lacarne, il ne reste désormais qu’à meubler le reste de la saison sportive en s’occupant de la “formation” et au “développement de l’arbitrage”, deux concepts davantage synonymes de fin de carrière dans l’ombre que d’une quelconque influence sur le cours des événements à venir. Passée maîtresse en matière de politique provisoire, la FAF a confié cette délicate mission de la désignation des arbitres à une commission créée pour la circonstance, composée de Ali Malek et Ali Attoui. Ali Malek, le président de la LNFA (Ligue nationale de football amateur) et ancien président à problèmes de la LNF, ne présente pourtant pas le profil idéal pour s’occuper d’un volet aussi névralgique que l’arbitrage.
Même ceux qui n’étaient pas franchement favorables au cumul de prérogatives de Lacarne n’ont pas vu en la nomination de Malek le signal fort d’un changement vers le mieux. De la période où il présidait la Ligue nationale de football, remplacée depuis par la Ligue de football professionnel, le même Ali Malek n’a pas laissé que de bons souvenirs. Des casseroles, il en a traîné ! Des polémiques, il en a créé. Des scandales, il y en a eu tellement sous son règne que dire, en toute objectivité, que Ali Malek n’est pas forcément le prototype même du dirigeant garant de l’équité, de l’impartialité et de l’intégrité équivaudrait à un doux euphémisme, juste bon pour ne pas être passible d’une quelconque riposte judiciaire.
Et s’il est vrai que la FAF a joué la malice en désignant à ses côtés un membre de son bureau fédéral en la personne de Ali Attoui, il est tout aussi vrai que la présence du second nommé au sein de cette commission de désignation se voudrait, surtout, un gage de droiture et de probité pour compenser, soit-dit en passant, tout ce que n’est pas Ali Malek ! Ce choix des hommes qui tiendront les rênes des décisions à la tête de la CFA intrigue autant qu’il interpelle sur la mauvaise lecture qu’a faite la FAF des accablants rapports quotidiens qui lui parviennent à propos du mal profond qui gangrène la discipline.
Pourtant Malek n’a rien d’un ange !
La maximale sanction dont a écopé le sulfureux président de l’US Chaouia, Abdelmadjid Yahi, au lendemain de ses fracassantes déclarations sur ce que la FAF a qualifié de “prétendue tarification de la corruption des arbitres”, découle dans le même sens. Outre le fait de l’avoir “interdit à vie de toute activité en relation avec le football”, la Ligue de football professionnel et la Fédération algérienne de football avaient, pour rappel, décidé de déposer plainte auprès du procureur de la République et d’en informer les services de police, pour l’ouverture d’une enquête judiciaire, justifiant cette démarche par le fait que “les statuts et règlements de la FIFA et des instances du football national considèrent les infractions liées à la corruption comme imprescriptibles”. Alors, double langage de la FAF, absurdité de la démarche ou comportement paradoxal à propos d’un fléau qu’elle reconnaît mais dont elle interdit la prononciation ?
Le tout à la fois, oserions-nous dire, dans la mesure où, pour avoir décidé de sanctionner un responsable de la trempe de Lacarne, la fédération a donné raison aux doléances des présidents de club qui pestaient contre un arbitrage impartial et, derechef, asservi contre nombre de privilèges, notamment financiers.
Or, en sanctionnant avec la même main lourde un Yahi à la réputation de grosse gueule qui ne dit jamais les choses à moitié, la même fédération nie à toute personne le droit de s’exprimer ouvertement sur le sujet. Pour avoir déjà approuvé les protestations des présidents de club et confirmé, tacitement, les dérives du corps arbitral à travers le gel de l’activité la plus importante du président de la CFA, pourquoi, donc, la FAF n’est-elle pas allée au fond des choses en exigeant, par exemple, une enquête après les aveux de Abdelmadjid Yahi ?
Déjà qu’elles traînent comme des boulets leurs derniers faits d’armes en matière de justice dont les plus récents sont l’affaire CA Batna-JS Saoura et le canular MC Oran-ES Sétif, la FAF et la LNF viennent, cette fois-ci, juste de rappeler un autre “trait de caractère” qu’on leur connaissait déjà, le dédoublement manichéen.
R. B.