Dans un communiqué de presse diffusé, hier, lundi, le parti islamiste Al-Islah rejoint le MSP en «chargeant» le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, à propos de la réponse de ce dernier à Erdogan, lui enjoignant de «ne pas faire commerce avec la mémoire historique de l’Algérie pour régler des comptes avec la France».
Pour Al-Islah, Ahmed Ouyahia, en s’attaquant au Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a choisi la «mauvaise cible», tout en dévoilant la face cachée de ses conceptions sur l’Histoire. Al-Islah estime qu’Ouyahia a fait le procès d’Erdogan, parce que la Turquie a soutenu le «Printemps arabe», et s’est, dès les premier jours des révolutions arabes, placé aux côté des peuples, « ce qui ne semble pas avoir été du goût d’Ahmed Ouyahia ».
Et Al-Islah d’énumérer une liste de notes historiques pour démontrer qu’Ouyahia «devrait» lire un peu plus en détail l’histoire algéro-turque, qui n’a pas été celle d’une domination, mais celle d’une protection et d’un Gouvernorat au nom de la Sublime- Porte.
Al-Islah a marqué son étonnement de voir Ouyahia s’opposer à Erdogan, alors qu’il devrait le «remercier pour ses prises de position contre la France», «prises de position qui sont soutenues par le peuple algérien tout entier». En fait, l’occasion s’est présentée aux islamistes de tailler en pièces Ouyahia, et ils ne l’ont pas raté.
Les animosités des islamistes contre Ouyahia datent de près de vingt années, et ce n’est pas aujourd’hui que l’embellie se fera entre eux. Une des principales raisons du retrait du MSP de la coalition présidentielle est, assure-t-on au MSP, de «laisser Ouyahia à découvert». Le MSP garde toujours les meilleures relations qui soient avec le FLN et le voisinage entre Soltani et Belkhadem n’est un secret pour personne.
Fayçal Oukaci
LES SALAFISTES PAS ENCORE CONVAINCUS PAR LES «FRÈRES»: DES CONTACTS AVEC MENASRA CONFIRMÉS
Des chefs issus du Front islamique dissous continuent à «toucher» pratiquement toute la vaste gamme de l’islamisme politique. Après des rapprochements avec le MSP, Ennahda, Djaballah, et récemment El-Islah, les salafistes sont arrivés à la certitude qu’hormis les promesses, rien de concret et d’objectif ne peut être construit avec eux.
En désespoir de cause, Abdelmadjid Menasra, qui s’apprête à mettre sur pied son parti, et tiendra son congrès constitutif dans deux semaines, représentera la dernière étape avant la clôture des contacts avec les «Frères». Selon El-Hachemi Sahnouni, «des contacts ont été établis avec les islamistes, toutes tendances confondues», mais que cela «n’a ramené rien de concret, hormis des paroles vagues qui donnent l’illusion mais ne rapportent rien».
Pour Sahnouni, «aucune forme de rapprochement pouvant aboutir à un conglomérat islamiste pour entrer en force dans les élections et ratisser le plus large possible, n’a été constaté, et les conciliabules restent au stade des bavardages». Les salafistes, si rien n’est concrètement construit avec les «Frères», ne donneront ni leur voix, ni leur caution aux partis islamistes, et chercheront un palliatif pour sortir des restrictions auxquelles ils sont astreints.
Il y a quelques jours, et pour court-circuiter des contacts avec le MSP, Abdelmadjid Menasra a tendu la main aux militants du parti dissous, en les appelant à rejoindre les rangs du Front du changement national (FCN), non encore agréé. «Aucun parti en Algérie ne peut prétendre bénéficier, seul, de la base électorale islamiste», a déclaré Menasra. Menasra, qui affirme que plus de 50 % des militants du MSP ont intégré son parti, cherche à récupérer les salafistes, qui peuvent départager en leur faveur.
Repoussant une possible interdiction d’activité à la faveur d’un ralliement islamiste des éléments de l’ex-FIS, il précise que son «parti sera agréé grâce à la Constitution et personne ne pourra nous barrer la route». Menasra a tenu, toutefois, à préciser aux nouveaux alliés que «les portes de son parti restent ouvertes pour ceux à qui l’Algérie a laissé les portes politiques ouvertes». La précision était nécessaire…
F. O.
RETOUR SUR UNE POLÉMIQUE ARTIFICIELLE: SOLTANI EN «DEY D’ALGER»
Retour sur les déclarations pour le moins inappropriées de Bouguerra Soltani , réagissant très maladroitement aux déclarations de Ahmed Ouyahia sur la Turquie, et qui sont restées en travers du leader islamiste tout juste rentré d’Ankara, la nouvelle Mecque des Frères musulmans algériens , adhérant aveuglement aux recettes de l’AKP et qui se voient déjà au pouvoir.
Ouyahia s’est prononcé sur la récente polémique entre la France et la Turquie autour des questions de mémoire. Il a appelé Ankara à ne pas faire de l’Histoire de l’Algérie un fonds de commerce, en référence aux déclarations du Premier ministre turc sur le génocide des Algériens, commis par la France.
« Nous disons à nos amis (turcs) de cesser de faire de la colonisation de l’Algérie un fonds de commerce (…) Chacun est libre dans la défense de ses intérêts, mais personne n’a le droit de faire du sang des Algériens un fonds de commerce ». Il a rappelé que la Turquie n’a jamais soutenu la Révolution algérienne. Ce pays a voté toutes les résolutions onusiennes contre l’Algérie durant la période coloniale, a-t-il rappelé.
« La Turquie, qui était membre de l’Otan pendant la Guerre d’Algérie, et qui l’est encore, avait participé comme membre de cette Alliance à fournir des moyens militaires à la France dans sa guerre en Algérie (…) », a ajouté le secrétaire général du RND ? dont on ne sait s’il parlait es qualité ou en tant que Premier ministre. D’autant qu’il n’y a eu aucune réaction officielle aux déclarations polémiques du Premier ministre turc, qui réécrit il est vrai l’histoire à sa façon.
Certes la Turquie Kémaliste, forte de son adhésion à l’Otan s’est alignée durant la lutte de Libération nationale aux côtés du colonisateur français et n’avait cure de son ancienne colonie, tout à «modernisme » et à son occidentalisation forcée, pensée et réfléchie par Mustapha Kemal Atatürk. Dans ces polémiques qui n’ont pas leur place dans ce qu’il faut bien admettre une précampagne avant l’heure, il est plus judicieux de laisser la parole aux historiens, dont l’Histoire est le métier.
Sinon tout un chacun ira de sa petite histoire. Mais là où le bat blesse c’est lorsque Soltani, qui se verrait bien en « Dey d’Alger », selon la bonne formule d’un confrère chroniqueur de talent , met carrément les pieds dans le plat et se mêle de politique étrangère invoquant la lutte de libération du peuple sahraoui , mélange les torchons et les serviettes et déclare pour la défense de son mentor turc, si « la Turquie fait de la colonisation de l’Algérie un fonds de commerce, nous faisons la même chose, donc, en défendant la question sahraouie».
Le leader du MSP, qui a jusque là soutenue fermement le combat du peuple sahraoui pour son indépendance , parce que c’est un combat juste conforme au droit des peuples à l’autodétermination sur la base duquel précisément l’Algérie a parachevé sa lutte de Libération nationale , sait pertinemment que la position de l’Algérie, partagée au demeurant par l’ensemble de la communauté internationale , comme le réaffirme régulièrement les résolutions des Nations unies , ne devrait pas faire dans l’amalgame .
D’autant et comme il l’a si bien souligné que « la diplomatie et la politique étrangère de l’Algérie sont du ressort exclusif du chef de l’État et que personne n’a le droit, conformément à la Constitution, de se prononcer sur les questions internationales ».
C’est pourquoi il est encore plus étonnant que dans cette course à la polémique et aux joutes électorales prématurées on relève que pour ne pas être en reste, un autre parti islamiste, Ennahda en l’occurrence se croit obligé de venir au secours de ce qui fut la « Sublime porte » et a vivement critiqué, dans un communiqué, les déclarations de Ahmed Ouyahia sur la Turquie.
Le parti islamiste dit y voir une sorte de soutien à la France qui refuse toujours de reconnaître ses crimes commis en Algérie durant la période de la colonisation. Pour Ennahda, Ahmed Ouyahia fuit « ses responsabilités l’obligeant à protéger la mémoire collective des Algériens ».
Le parti affirme en revanche avoir apprécié les déclarations du chef du gouvernement turc, Recep Tayyip Erdogan. Il serait utile d’éviter des polémiques stériles et d’appréhender la prochaine campagne électorale sereinement et de la centrer sur les véritables préoccupations des algériens pour éviter le spectre de l’abstention d’un électorat extrêmement méfiant à l’égard d’une classe politique qui se gargarise d’injonctions et d’oukases.
Mokhtar Bendib