Ce qui se passe actuellement en Tunisie est quasiment le même scénario vécu en Algérie avec le FIS, ex-parti dissous au tout début des années 1990, sauf qu’en Tunisie le parti Ennahdha est au pouvoir mais pas seul sur le terrain en tant que parti islamiste dit “modéré”.
D’autres mouvances, comme le parti Ettahrir où les djihadistes activent et représentent une menace pour “la démocratie naissante”, entre guillemets, pour la Tunisie. Les derniers incidents survenus à Sidi Bouzid, où un hôtel a été le théâtre d’une attaque revendiquée par les islamistes, prouvent bien que le risque d’une éventuelle menace terroriste est réel.
Ils imposent leur loi en toute impunité, même dans l’organisation des marches. Ainsi, après à peine une semaine, Ennahdha et d’autres courants islamistes ont encore investi la rue pour protester devant le siège du gouvernement. Ils étaient des milliers à s’être rassemblés vendredi pour appeler le gouvernement à “assainir” le pays des vestiges du régime déchu, médias et opposition en tête, au moment où ce mouvement est accusé de dérive autoritaire. La manifestation a été organisée via les réseaux sociaux par un mouvement informel baptisé “Exbes !” (Magne-toi !) proche d’Ennahdha.
La foule, composée majoritairement de sympathisants d’Ennahdha, s’est réunie, place de la Kasbah, aux environs de 10h, avant que “les fidèles” ne fassent leur prière du vendredi. Ils ont commencé à se disperser dans le calme peu après. Les manifestants réclament une purge accélérée dans les administrations, les médias et le monde politique des membres du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), parti du président déchu, Zine El Abidine Ben Ali. “Serrez la vis”, “RCD, dégage !”, “Le peuple veut l’assainissement de la justice”, “Le peuple veut l’assainissement des médias”, pouvait-on lire sur les pancartes.
Plusieurs hauts responsables du parti se sont adressés à la foule, multipliant les attaques contre les partisans de l’ancien régime qui contrôleraient les médias et l’Appel de la Tunisie, le parti de Béji Caïd Essebsi, chef du deuxième gouvernement postrévolutionnaire, qui gagne en popularité. “Il n’est pas logique, qu’après une révolution, l’information soit entre les mains des ennemis de la révolution”, a lancé Habib Ellouze, une des figures d’Ennahda, prônant la fermeté “contre les forces qui complotent, notamment dans les médias”.
Ennahda est en conflit ouvert avec plusieurs rédactions après avoir nommé des proches à leur tête, laissant craindre une ingérence du pouvoir politique. Les islamistes assurent simplement écarter des personnalités corrompues. Riadh Chaïbi, un autre haut responsable islamiste, a, lui, lancé une attaque en règle contre l’Appel de la Tunisie, promettant une loi pour interdire de vie politique les tenants de l’ancien régime tel Béji Caïd Essebsi. “L’Appel de la Tunisie est le nouvel RCD !”, a-t-il lancé, “nous œuvrons pour que l’Assemblée nationale constituante adopte une loi empêchant les RCDistes de faire de la politique pendant dix ans”, a-t-il ajouté.
L’opposition accuse pour sa part Ennahda de recruter des anciens du RCD et proches de l’ancien régime dont quelques caciques ont été emprisonnés.
Une première manifestation similaire avait été organisée la semaine dernière. Si celle de vendredi a réuni plus de monde, elle était loin d’être “millionnaire”, l’objectif affiché des organisateurs avant le rassemblement du 1er septembre. La manifestation a eu lieu alors qu’Ennahda, qui domine la coalition au pouvoir, est accusé par une partie de la société civile et l’opposition de tenter d’accaparer les pouvoirs en vue des élections prévues en 2013.
Elle a aussi lieu dans un contexte d’impasse institutionnelle, la rédaction de la nouvelle Constitution, qui devait être adoptée fin octobre à l’origine, ayant pris, semble-t-il, des mois de retard. Les islamistes sont en conflit ouvert avec plusieurs médias publics après avoir nommé des proches à leur tête, faisant craindre aux rédactions l’ingérence du pouvoir politique dans leurs lignes éditoriales. Ennahda assure simplement écarter des personnalités corrompues de l’ancien régime.
I. O