Pour redresser une économie, il ne suffit pas de réduire la facture d’importation. Il convient aussi de diversifier l’offre exportable et trouver des débouchés commerciaux à l’étranger.
La promotion du commerce extérieur a constitué, durant l’année 2016, le cheval de bataille du gouvernement qui en fait sa manière de parer à la crise induite par la chute des prix du pétrole et un instrument de redémarrage de l’économie nationale.
Toutefois, l’essentiel de ce qui a été fait concerne la limitation des importations. Il est bien clair que l’équipe Sellal, qui n’a raté aucune occasion de pointer du doigt les «barons de l’importation», a beaucoup misé sur la réduction des importations qui ont été présentées comme étant un obstacle majeur au décollage de la production nationale. Dans ce sillage, de grandes restrictions dans l’importation des véhicules, du ciment et du rond à béton ont été enregistrées. Ces restrictions, qui se sont exprimées à travers l’institution de la licence d’importation, ont permis à l’Algérie d’économiser six milliards de dollars par rapport à l’année 2014 durant laquelle les importations de ces trois produits avaient enregistré un pic.
Au total, indique le ministère du Commerce, 225 licences d’importation ont été attribuées par la commission interministérielle chargée de la délivrance de ces documents au titre de l’année 2016, dont 40 licences pour l’importation de véhicules. Ainsi, le contingent initial d’importation des véhicules qui avait été fixé à 152.000 unités a été réduit finalement à 98.374 unités, pour clôturer l’année 2016 avec une facture d’importation d’un milliard de dollars alors que les importations de véhicules ont été de 265.523 unités en 2015 pour un montant de 3,14 milliards de dollars, et 417.913 unités en 2014 pour un coût de 5,7 milliards de dollars. On peut donc dire sans baragouiner que le défi lancé par Sellal a été relevé avec succès et sa promesse de réduire davantage la facture d’importation en 2017 est la bienvenue. Toutefois, il est loin d’être suffisant que les importations soient limitées pour que la production nationale explose ou que notre économie décolle. Le gouvernement est, semble-t-il, conscient de ceci.
Mais sa politique économique reste toujours, selon certains observateurs, timide. Les mesures prises par la Banque d’Algérie pour encourager les exportateurs, notamment le rallongement du délai de rapatriement des devises qui était de 180 jours à 360 jours ainsi que la suppression de son accord préalable pour le paiement en devises des factures d’importation des matières premières par ces opérateurs, sont à saluer.
En levant ces contraintes à l’exportation, le gouvernement a permis aux exportateurs potentiels d’agir en assurance et de gagner du temps dans l’accomplissement de leurs démarches. Les différents forums d’affaires qui ont été organisés au cours de l’année 2016, notamment le Forum algéro-britanique, le Forum algéro-qatari et le Forum africain d’investissement, ont également permis de nouer des contacts entre les opérateurs économiques algériens et leurs homologues à l’étranger, lesquels contacts peuvent leur permettre de trouver des opportunités de partenariats et des débouchés commerciaux pour leurs produits. Mais la situation est si difficile que de simples mesures visant à réduire les importations et à desserrer l’étau sur les exportateurs potentiels ne suffisent plus. «La limitation des importations n’a pour but que de limiter les sorties de devises.
Une solution administrative à un problème économique. C’est une mesure qui illustre l’absence de vision économique chez nos bureaucrates», estime dans ce sens Samir Bellal, économiste.
En effet, Samir Bellal considère que la mise en place de la licence d’importation comme moyen de réguler le commerce extérieur est malvenue car, «dans les pays qui se respectent, quand on veut réduire les importations, on agit sur la fiscalité ou sur le taux de change». «Si on veut réduire les importations, on institue des taxes sur les produits importés pour décourager leur consommation, on peut aussi dévaluer la monnaie nationale pour rendre les produits importés plus chers. Limiter les importations aura surtout pour effet de créer des situations de monopole, ce qui va générer des rentes au profit des importateurs,» explique-t-il.
Ceci étant, la licence d’importation étant déjà entrée en vigueur et ayant donné des résultats plus ou moins probants en matière de réduction de la facture d’importation, l’enjeu est ailleurs, à savoir développer les exportations. Or, pour ce faire, les conditions ne sont pas toutes réunies et des efforts considérables doivent être consentis par le gouvernement afin d’y parvenir. Il convient, selon Samir Bellal, d’une part, «d’ouvrir laccès au marché, dévaluer le dinar puisqu’il est toujours surévalué et, d’autre part, protéger le marché national par une politique fiscale». Il s’agit, en somme, pour lui, de créer des incitations à exporter et faire en sorte qu’exporter devienne une opération plus rentable qu’importer.
Toutefois, M. Bellal a fait savoir que la dévaluation de la monnaie comporte des risques politiques. «La dévaluation entraîne une hausse générale des prix. Les dernières dévaluations effectuées par la Banque d’Algérie n’ont pas entraîné une grande hausse des prix car elles ont coïncidé avec une baisse générale des cours sur le marché international, ce qui fait que l’effet de la dévaluation n’a pas été ressenti. Mais le risque existe et il est permanent,» estime -t-il.
Le gouvernement relèvera -t-il le défi de la promotion des exportations en 2017 comme il a relevé celui de la limitation des importations en 2016? la question reste posée.